Par cet amendement – peut-être aussi un amendement de repli, même si le lien avec la rhétorique guerrière n'est pas sûr – , nous proposons de remplacer les mots « non négligeable » par le mot « substantiel », et, en conséquence, de rédiger ainsi la seconde phrase de l'alinéa : « Pour apprécier l'existence d'un tel risque, le préfet peut notamment prendre en compte les éléments suivants : ». Quelle est la philosophie de cet amendement ? C'est une modification rédactionnelle assez mineure en apparence, mais qui aurait un impact réel sur l'application de ces dispositions par les administrations préfectorales.
En effet, la rédaction proposée à ce stade dans le texte tend à forcer la main au préfet pour l'obliger à mettre en rétention un demandeur d'asile faisant l'objet d'une procédure Dublin. Mais pourquoi donc forcer la main au préfet, sinon pour contribuer à la stratégie d'endiguement qu'a clairement dénoncée ma collègue Clémentine Autain ? Vous voulez que le préfet mette automatiquement le demandeur en rétention s'il y a un risque « non négligeable », autrement dit s'il existe ne serait-ce qu'un petit soupçon de doute. De même, vous citez des cas où le risque de fuite peut être considéré comme établi « sauf circonstance particulière ».
Nous trouvons que ces expressions induisent un risque réel de traitement automatisé de chaque dossier de demande d'asile, qui serait déshumanisant et irait à l'encontre de tout ce que vous avez pu nous raconter sur la France, terre d'accueil, etc. Le préfet serait encouragé à cocher des cases dans des arrêtés de mise en rétention préremplis, comme le fait d'ailleurs déjà, à Paris, la préfecture de police. Nous proposons de redonner au préfet le pouvoir souverain d'appréciation de la situation en faisant référence à un risque substantiel plutôt que non négligeable et en rappelant que le préfet est toujours pleinement libre de prendre ou non une décision de mise en rétention.