Intervention de Pierre-Yves Bournazel

Réunion du jeudi 17 décembre 2020 à 12h00
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi confortant le respect des principes de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre-Yves Bournazel :

Alors que débutent nos travaux sur ce projet de loi, il me semble important de revenir sur ses fondements et sur la raison d'être de notre commission spéciale : la question du séparatisme, la multiplication des discours de haine qui remettent en cause les principes républicains, l'exacerbation des tensions communautaristes, la perte de repères sur ce qui fonde l'unité de notre nation, les attaques d'un islamisme radical qui frappent notre pays, les tentations d'amalgame, inconscient ou à dessein, qui traversent notre société. Ce sont des sujets complexes, sensibles, fondamentaux ; ils n'en sont pas pour autant nouveaux. Trop longtemps, ils ont fait l'objet d'indignations successives, qui n'ont pas été suivies de réponses ; trop longtemps, on les a réduits à de simples faits divers, refusant de voir la gravité de la situation.

C'est précisément pourquoi nous devons les traiter aujourd'hui. Je trouve cette démarche courageuse, et je la crois nécessaire : nous devons réparer les failles que chaque petit renoncement durant ces trente dernières années a contribué à creuser. Je souhaite que nous abordions ces débats intenses dans la sérénité, dans l'écoute de la diversité de nos sensibilités politiques. Il me semble possible de garder à l'esprit que l'avenir de la République mérite que nous dépassions les considérations électorales, car c'est un projet sur plusieurs générations qui se présente à nous.

Il s'agit non pas de traiter de tous les sujets, ce qui serait vain, ni d'entreprendre ce combat républicain à travers des cas particuliers, mais d'établir – ou de rétablir – des principes et des lignes directrices. Le groupe Agir ensemble partage la philosophie d'un texte qui, d'une part, place au cœur de son ambition la neutralité du service public et, d'autre part, vise à consolider l'exercice des cultes et à moderniser tout en le confortant le cadre de la loi de 1905. L'État ne reconnaît aucun culte, il protège la foi, mais celle-ci n'est jamais au-dessus de la loi. La laïcité est un principe de liberté : liberté de croire, liberté de ne pas croire, liberté de conscience ; elle assure ainsi une protection à tous les citoyens, sans aucune distinction.

L'école est le creuset de la République. Nous savons combien l'école de la République est l'engagement de votre vie. Si l'État ne reconnaît aucune religion, il existe une transcendance dans la République, une transcendance laïque, qui s'exerce à l'école, l'école qui élève, qui permet de dépasser sa condition sociale pour atteindre sa vocation de femme ou d'homme. C'est le lieu de la liberté, de la fraternité et de l'égalité. Pour tenir cette promesse des Lumières, il doit rester le lieu de la laïcité ; c'est un projet d'émancipation. L'école de la République est généreuse parce que sa vocation est de favoriser l'égalité des chances en accordant davantage à ceux qui ont moins de capital social et culturel au départ – tel est le sens du dédoublement des classes que vous avez engagé et qui fonctionne très bien : je le vois dans mon arrondissement, le dix-huitième de Paris. Mais si l'école de la République est généreuse, elle n'est pas pour autant naïve ; l'État doit être implacable envers ceux qui tentent de détruire le pacte républicain. C'est ce que vous soutenez avec force et avec conviction.

C'est pourquoi ce projet de loi ne se réduit pas, à mon sens, à un texte contre des ennemis de la République. Il s'inscrit dans une vision positive de ce que doit être notre Nation, de ce qu'elle peut produire de commun : mettre hors d'état de nuire des idéologies mortifères, séparatistes, radicales ; offrir à chaque enfant la liberté d'apprendre, donc d'être instruit, de comprendre le monde dans lequel il vit, en éveillant son esprit critique et en assurant ainsi son émancipation. Monsieur le ministre, nous travaillerons avec vous avec confiance et détermination.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.