Je m'exprime au nom du groupe UDI et indépendants.
Le retrait du recteur de la grande mosquée de Paris viendrait des réticences de plusieurs membres du CFCM à affirmer le primat de la loi républicaine sur les principes et préceptes religieux. Cela nourrit les inquiétudes quant aux possibilités d'aboutissement de la charte demandée par le Président de la République et démontrant la compatibilité entre l'islam et la République. J'en suis d'autant plus surpris que les musulmans de France que je rencontre régulièrement ne voient aucune contradiction entre l'un et l'autre, contrairement à ce qu'on lit dans la presse qui veut toujours faire sensation, et considèrent en très grande majorité que les principes de la République, comme les principes de l'État dans plusieurs de leurs pays d'origine, passent avant les principes religieux, qui concernent l'intimité. J'aimerais donc que vous nous apportiez des précisions à ce sujet.
Existe-t-il au sein du CFCM des réticences à dénoncer l'islam politique ? À l'opposé de ce qui se dit dans certains milieux islamistes, la laïcité à la française n'est pas hostile aux musulmans : c'est contre la religion catholique qu'elle s'est construite, parce que celle-ci s'immisçait dans le champ politique et voulait y imposer ses préceptes – on retrouve là l'enjeu de l'équilibre entre la loi des hommes et celle qui serait dictée par la religion. Ces éventuelles réticences seraient un problème, car la laïcité est la séparation de la chose publique, dirigée par les citoyens, et de la chose religieuse, régie par les cultes et par ceux qui les suivent.
Concernant la différence entre pratique religieuse et aide sociale au sein des organisations associatives, la religion musulmane a pour spécificité de considérer la charité comme découlant du respect du culte. Or, on l'a vu dans d'autres pays, certaines associations peuvent, sous couvert d'aide sociale, promouvoir une version politique de l'islam qui n'est pas souhaitable en France.
Une dernière question, peut-être plus dérangeante. Bien souvent, les musulmans que je rencontre ne se sentent pas représentés par le CFCM. Son mode d'élection, imposé par l'État lors de sa constitution, favorise les mosquées qui disposent de grands espaces ; en somme, il fait que l'on vote au mètre carré au lieu d'attribuer une voix à chaque citoyen musulman. Vous paraît-il envisageable qu'il soit réformé ? Car rivaliser de mètres carrés, c'est rivaliser d'argent, d'où une lutte d'influence entre puissances étrangères qui nuit au fonctionnement du Conseil comme à sa représentativité. Les musulmans préféreraient choisir eux-mêmes leurs représentants que le faire par délégation selon ce système, assez original en démocratie, qui veut que le vote dépende de la capacité à obtenir des surfaces foncières, c'est-à-dire de la capacité financière.