Intervention de la ministre déléguée

Réunion du lundi 11 janvier 2021 à 11h30
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi confortant le respect des principes de la république

la ministre déléguée :

Monsieur le rapporteur général, nous aurions besoin de plusieurs heures pour débattre de la définition des principes de la République. Je suis toujours étonnée lorsque j'entends dire que la formule de « valeurs ou de principes de la République » serait vide de sens et relèverait des éléments de langage ou de la langue de bois. C'est bien triste, pour le débat public, en 2021, dans notre pays.

Pour moi, les valeurs de la République ont un sens, celui de la liberté, de l'égalité, de la fraternité, du respect de la laïcité, de l'égalité entre les femmes et les hommes, de la dignité humaine. La République, avant tout, est un système politique dans lequel le titulaire du pouvoir n'est pas désigné héréditairement mais en vertu d'une organisation démocratique garantissant que le pouvoir se trouve entre les mains du peuple à travers le processus électoral. Les récents événements aux États-Unis ont montré combien il importe d'y être attachés.

Ce projet, précisément, vise à conforter ces valeurs mais aussi à les redéfinir, à les détailler, à les expliciter, à les « actualiser ». Parce que les attentes sont fortes, nous avons décidé de les mettre en évidence dans le contrat d'engagement républicain, collectivement : ce n'est pas tant « ma » définition de ces valeurs qui importe mais celle qui est élaborée avec les élus locaux, les associations, les parlementaires. Nous avons d'ailleurs commencé les consultations avec les associations et nous les poursuivrons avec les représentants des élus locaux.

À nos yeux, monsieur Poulliat, il est fondamental que ce contrat ait valeur de loi. Lors de mes précédentes fonctions, j'ai publié une charte de la laïcité qui a été validée par toutes les associations subventionnées relevant du champ de l'égalité entre les femmes et les hommes. Il n'y a eu aucun problème, aucune contestation. Pensée collectivement, rédigée par l'Observatoire de la laïcité, elle a fait l'objet de consultations et chacun a donné son accord. L'antenne marseillaise du Planning familial avait toutefois considéré que l'excision relevait d'un choix. La direction nationale était revenue sur ces propos tenus par une jeune stagiaire non formée. Nous ne pouvions qu'entendre le droit à l'erreur mais un tel point de vue n'était et n'est pas admissible. Il nous semble donc fondamental de rappeler que toute grande association subventionnée par de l'argent public, qui a vocation, parfois, à participer à des actions relevant de la délégation de service public, doit respecter les valeurs de la République.

Vous avez eu raison, monsieur le rapporteur général, de revenir sur ce problème important qu'est celui des certificats de complaisance. Yannis Roeder, enseignant en Seine-Saint-Denis, membre du conseil des sages de la laïcité, nous a alertés sur le taux exponentiel de collégiennes allergiques au chlore dans son établissement. Manifestement, elles sont munies de certificats de complaisance pour échapper aux séances de piscine, les familles étant motivées d'après lui la plupart du temps par des considérations religieuses. De tels comportements sont d'ores et déjà sanctionnés puisque la médecine scolaire opère un certain nombre de contrôles, mais la loi que nous défendrons disposera qu'aucun certificat sans rapport avec la santé du patient ne pourra être délivré. Au-delà de la loi, l'action publique doit mener un accompagnement ; Jean-Michel Blanquer reviendra sur ce point.

Il n'est pas question d'arrêter de subventionner des associations non mixtes – par exemple, un club de football où ne jouent que des petits garçons ou une association de femmes enceintes. C'est le bon sens qui, avec les intentions des associations, doit nous guider, et ce sera le cas dans le cadre du contrat d'engagement. Les articles 10, 11 et 12 visent précisément à s'assurer que les associations séparatistes ne bénéficient pas des avantages prévus pour le champ associatif, lequel sortira renforcé par ce projet de loi.

Le principe de la dignité humaine, madame Dubré-Chirat, sera défini dans le contrat d'engagement. La jurisprudence de différentes grandes organisations est très dense à ce propos mais nous pourrons bien évidemment en débattre : si nous sommes attachés à cette expression, nous sommes ouverts à toutes vos propositions et, au final, c'est vous qui trancherez.

Je suis d'accord avec vous : en matière de polygamie, l'action publique doit accompagner la loi. Beaucoup de choses, dans notre pays, sont interdites par la loi mais n'en existent pas moins : il convient donc de renforcer et la législation, et l'action publique. Un accompagnement des élus locaux sera nécessaire – l'AMF sera reçue demain au ministère de l'intérieur.

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