Il importe que nous soutenions les agents publics qui portent plainte. J'en ai rencontré beaucoup sur le terrain ; la plupart envisagent le dépôt d'une plainte avec réticence. Il faut donc s'assurer que chaque agent public, si nécessaire, porte plainte lui‑même et signale les faits au procureur de la République.
Par ailleurs, il faut mener une réflexion à ce sujet pour que l'administration puisse, avec l'accord de l'agent concerné, faire un acte allant au-delà du symbolique. Lorsque l'agent signale les faits au procureur de la République, la machine judiciaire, pour ainsi dire, se met en branle ; il importe que nous soutenions cette démarche. En l'état actuel du droit, l'application de la disposition proposée serait assez complexe. Certaines structures, telles que les collectivités locales, les opérateurs publics et les établissements publics, sont dotées d'une personnalité morale ; comme telles, elles peuvent porter plainte. S'agissant d'une direction départementale au sein d'une préfecture, dépourvue de personnalité morale, les choses sont plus complexes. En outre, la constitution de partie civile peut soulever certaines difficultés : l'État, dans la salle d'audiences, pourrait simultanément être du côté du procureur et du côté de la partie civile. Les dispositions proposées doivent s'articuler avec celles du code pénal.
En tout état de cause, il nous semble essentiel de protéger véritablement les agents publics, indépendamment d'un éventuel dépôt de plainte et du signalement des faits relevant de l'article 40 du code de procédure pénale. Nous devons nous inscrire dans une logique opérationnelle d'activation de la protection.
S'agissant du périmètre de l'article 1er, j'estime qu'il ne faut pas chercher à inscrire dans le droit ce que la jurisprudence a clarifié. Le présent projet de loi n'a pas pour objet d'aborder des sujets particuliers, tels que la place du voile dans l'espace public. L'essentiel est de nous assurer que quiconque dépend contractuellement et financièrement d'un service public, parce qu'il est délégataire d'une mission de service public, soit astreint aux mêmes obligations de neutralité, de laïcité et d'égalité de traitement que les agents publics. S'agissant des collaborateurs occasionnels du service public, leurs relations avec l'administration ne sont pas encadrées par un contrat, et leurs activités sont ponctuelles. Si elles acquièrent un caractère régulier, elles font l'objet d'un contrat et s'inscrivent dès lors dans le champ de l'article 1er. La jurisprudence à leur sujet est claire. Il s'agit d'une activité ponctuelle, volontaire et bénévole – aucune rémunération n'y est attachée, et très peu bénéficient d'un défraiement. Le projet de loi présente un équilibre correspondant à des besoins réels ; il n'a pas vocation à rouvrir des débats tranchés précédemment.