Monsieur le professeur, votre expertise est parfaitement reconnue sur le sujet que nous évoquons. Dans le prolongement de la question de mon collègue, qui s'était ému du fait que, lors d'une audition précédente, une intervenante avait dit que la République était laïque, mais que la France ne l'était pas. Cela rejoint les interrogations de nombreux cultes. Cette réflexion sur la laïcité et sur la neutralité ne développe-t-elle pas un sentiment antireligieux ? En traitant de façon prioritaire les désordres liés à l'épanouissement exponentiel de certaines religions, le risque est de jeter le soupçon sur toutes les religions. Dans l'exemple présenté par mon collègue, il faut distinguer ce qui relève de l'expression d'une opinion religieuse, ce qui ne doit pas être le cas de la part d'élus, tenus à une forme de neutralité, et toute la dimension historique et traditionnelle susceptible de justifier la décision de l'élu d'installer une crèche ou de porter une écharpe lors d'une manifestation tout autant patrimoniale que religieuse. Je souhaite interroger votre sentiment sur le lien existant entre laïcité, neutralité, liberté religieuse et respect des religions. Nous sommes nombreux à ne pas souhaiter que la lutte contre le radicalisme islamiste aboutisse à un soupçon généralisé à l'égard des religions.
Ma deuxième question interroge la constitutionnalité de certaines mesures. Sur ce point, divers intervenants ont formulé des opinions différentes. Je pense aux articles consacrés à l'éducation et à la fin de l'enseignement en famille ou à domicile, qui suscite pour les uns une question de constitutionnalité, alors que d'autres estiment que cette mesure ne comporte pas de risque d'anti constitutionnalité. Je souhaite avoir votre sentiment sur ce point.
Enfin, j'ai porté, comme rapporteure, la proposition de loi constitutionnelle émanant du Sénat sur la modification de la Constitution pour rappeler la règle commune, selon laquelle les partis politiques ne pouvaient pas avoir une dimension religieuse. Cette proposition de loi constitutionnelle n'a pas été validée par l'Assemblée nationale, comme vous le savez. J'ai néanmoins souhaité réintroduire ces notions par voie d'amendements dans le texte de la loi. Je souhaite que cette notion soit réintroduite dans le présent projet de loi. Si le législateur en était d'accord, pensez-vous que cette notion aurait une force utile ?