La laïcité, c'est d'abord la liberté de croire ou de ne pas croire, de pratiquer un culte ou pas. On la trouve dans cette phrase de Condorcet : « Nous ne demandons pas que les hommes pensent comme nous ; mais nous désirons qu'ils apprennent à penser d'après eux-mêmes ». Elle est l'esprit de la loi de 1905, un esprit libéral qui a guidé les travaux d'Aristide Briand et selon lequel tout ce qui n'est pas interdit est par principe autorisé, et ce qui est interdit l'est dans un but d'intérêt général : la sauvegarde de l'ordre public.
La laïcité est également de nature contractuelle, et certaines dispositions du projet de loi, comme celle créant le contrat d'engagement républicain, le rappellent. J'emprunterai donc au lexique du droit des contrats pour présenter les dispositions relatives à la police des cultes. Il y a tout d'abord les « clauses noires », celles qui ont pour objet de lutter contre le terrorisme. Ce texte n'en comporte pas directement puisque ces dispositions relèvent soit de la loi de 1955 relative à l'état d'urgence, soit de la loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, dite loi SILT, que nous avons adoptée au début du quinquennat.
Viennent ensuite les « clauses blanches », les plus libérales, instituant toutefois un régime déclaratoire, avec des obligations administratives ou comptables nouvelles pour les associations : certification des comptes, obligation de tenir des comptes séparés pour les financements provenant de l'étranger, établissement d'une liste des lieux de culte. Des moyens sont donnés à l'administration en cas d'infraction, ainsi que le droit de s'opposer à des financements étrangers. Le but recherché est celui de la transparence.
Les « clauses grises », c'est la principale novation de ce texte, visent à moderniser les dispositions de la loi de 1905 devenues obsolètes, dans le but de tenir les prêcheurs de haine éloignés des lieux de culte et des associations qui en ont la charge, et pour prescrire des sanctions efficaces et proportionnées.
En conservant l'essentiel de cette construction, et à la lumière des auditions que nous avons conduites, je souhaite que nous discutions de la possibilité d'élargir le contrôle des financements étrangers aux associations relevant de la loi de 1901 lorsque ces financements proviennent d'États tiers à l'Union européenne. Je proposerai l'alignement des peines prévues au titre de la police des cultes en cas d'incitation à la haine ou à la violence sur celles de la loi de 1881 sur la liberté de la presse : il y va de la clarté de la réponse pénale, comme l'indique le Conseil d'État dans son avis.
Je proposerai également le prononcé plus systématique de la peine complémentaire d'interdiction de paraître dans les lieux de culte, lorsque ces infractions ont été commises en lien avec les cultes.
Il conviendrait de fixer à trois mois la durée maximale de la fermeture des lieux de culte introduite par l'article 44 du projet de loi ; elle serait non renouvelable, sauf en cas d'éléments nouveaux.
Enfin, il serait nécessaire de préciser le régime d'opposition dans le but de protéger les collaborateurs des banques qui auront à l'exercer, d'exonérer les établissements de leur responsabilité puisqu'ils agiront sur ordre de l'administration, et de garantir l'effectivité du droit nouveau en appliquant le blocage aux paiements par chèque et par carte bancaire.