Dans une période aussi anxiogène, difficile que celle que nous vivons, la parole publique doit être parcimonieuse, notamment quand elle évoque les grands principes. Avez-vous remarqué à quel point ce qui vient de l'État est immédiatement suspect aux yeux de certains, et le rapport particulier que certains autres entretiennent avec la verticalité du pouvoir, tout cela encouragé par quelques-uns ? On essaye de passer par une entreprise privée pour répertorier les personnes qui doivent être vaccinées ? C'est du « fichage » ! Ces propos font peur aux gens.
Ici, nous parlons de liberté, de séparatisme ou de valeurs de la République. Je remercie la très grande majorité d'entre vous qui s'est exprimée avec beaucoup d'intelligence et de modération, et dans un esprit de concertation alors même que nos débats n'ont pas encore commencé. Il a fallu – je le redoutais – que l'on entende le mot : « liberticide ». Posture ! Entraver la liberté d'un haineux qui menace la petite Mila, je ne trouve pas cela liberticide ; je trouve cela normal. Entraver la liberté de ceux qui menacent nos fonctionnaires pour obtenir l'application d'autres règles que celle de la République, ce n'est pas liberticide.
Nous protégeons quelques belles libertés. Marlène Schiappa défendra le consentement éclairé. La liberté d'aimer qui l'on veut, ce n'est pas rien ! Cette petite qui a été tondue car elle avait commis l'infraction suprême d'aimer un homme qui n'était pas de la religion de sa famille, oui, nous la protégeons ! Je n'ai pas honte d'aller dans ce sens et je ne me considère pas comme liberticide. Il faut arrêter de se gargariser de mots ; la liberté mérite autre chose que cela.
Le fait que ce texte ne traite pas de la radicalisation ni de la déradicalisation dans les prisons ne signifie pas que nous ne nous intéressons pas ou que nous ne travaillons pas sur ce sujet. Je viens de constituer un groupe de travail, auquel participent notamment les magistrats du pôle antiterroriste du tribunal judiciaire de Paris, pour réfléchir et agir sur cette question très importante. Comme l'a rappelé Gérald Darmanin, notre projet de loi s'intéresse à ce qui se passe en prison, de même qu'il s'intéresse à ce qui se passe dans les hôpitaux, dans les écoles et partout ailleurs.
Vous souhaitez, madame Florennes, que l'administration puisse déposer une plainte en lieu et place de l'agent public victime d'agression. Vous avez raison, car les victimes ont parfois peur, à juste titre d'ailleurs – l'actualité récente nous l'a malheureusement montré. Je suis donc tout à fait favorable à ce que l'administration se substitue à l'agent lors du dépôt de la plainte.
Nous n'avons pas évoqué les cas où la haine vise les mineurs, que nous devons absolument protéger. Je propose de faire de cette situation une circonstance aggravante de l'infraction.
Certains ont regretté que nous n'abordions pas la question du voile. Je n'en dirai que quelques mots. Ce projet de loi est un texte de principes. Le port du voile peut traduire un asservissement, mais il peut aussi résulter d'un choix. Si nous engagions cette discussion maintenant, nous nous enliserions dans des débats qui ont déjà eu lieu. Après son discours des Mureaux, le Président de la République a répondu à certaines questions posées par des journalistes, et il a alors affirmé très clairement que le sujet du voile ne serait pas évoqué dans ce texte. Si nous nous mettions à discuter des tenues vestimentaires et de tout ce qui peut distinguer les uns et les autres dans la pratique de leur foi, alors nous sortirions de ce texte et nous nous perdrions. Ce beau projet de loi doit être consensuel : les clivages politiciens doivent être dépassés au profit d'une avancée commune pour les valeurs de notre République.