Intervention de Marlène Schiappa

Réunion du mercredi 20 janvier 2021 à 21h00
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi confortant le respect des principes de la république

Marlène Schiappa, ministre :

J'aimerais formuler plusieurs observations.

Tout d'abord, si passionnant que soit ce débat philosophique, que nous aimerions tous prolonger pendant plusieurs semaines, il ne s'agit pas ici de définir la laïcité, qui est un principe d'ordre philosophique, politique et juridique. Il me semble que chacun s'emploie à partager sa vision philosophique de la laïcité. La question que nous devons nous poser, à mon humble avis, est de savoir si l'ajout du mot « laïcité » à l'alinéa 2 apporte ou non quelque chose, et attrape ou non, pour ainsi dire, quelque chose de plus. La question n'est pas de savoir si l'on est pour ou contre la laïcité. Il ne s'agit pas non plus de la définir, ni de savoir s'il faut ou non la qualifier. La laïcité, à mes yeux, ne se qualifie pas. Elle est la laïcité, un point c'est tout. Au demeurant, il n'y a pas d'un côté des croyants et de l'autre des athées. Certaines personnes changent de religion au cours de leur vie, d'autres sont sceptiques, agnostiques ou membres d'organisations philosophiques. Ce débat philosophique est passionnant, mais il n'est pas d'actualité.

Le préambule du contrat d'engagement républicain rappelle que l'article 1er de la Constitution dispose que la République française est laïque. Je ne balaie pas d'un revers de main les arguments de celles et ceux qui tiennent absolument à y introduire la mention explicite de la laïcité. Ils ne sont pas sans intérêt. Je me pose la question de savoir comment nous parviendrons, ensemble, à inclure ce que nous voulons inclure, en évitant les effets de bord. Il me semble que nous sommes tous d'accord sur les objectifs et sur la nécessité d'éviter les effets de bord, ce qui est plutôt une bonne nouvelle. Je me demande de quelle façon nous pourrons demander aux associations de faire en sorte que la foi ne soit pas au-dessus de la loi, et de bannir des pratiques coutumières contraires aux valeurs de la République, telles que l'excision et les mutilations génitales. De telles pratiques m'ont incitée, dans mes précédentes fonctions, à proposer une charte aux associations : les responsables de l'une d'elles, non loin de Marseille, avaient répondu à une jeune fille qui l'interrogeait sur l'excision : « ton corps, ton choix ». Des associations universalistes s'étaient insurgées, à juste titre, et nous avons élaboré une charte rappelant les grands principes que doivent respecter les associations, au premier rang desquels la supériorité des lois de la République, en l'espèce celles qui interdisent l'excision, sur toute règle religieuse ou coutumière.

Lorsque vous m'avez auditionnée, j'ai rappelé que le premier engagement du contrat est de garantir la liberté de conscience. Sa mention en toutes lettres me semble répondre aux questions soulevées alors. Par ailleurs, le sixième engagement est le respect de la légalité et de l'ordre public, qui suppose notamment de ne pas revendiquer sa soustraction aux lois de la République pour un motif quelconque, notamment religieux.

Je comprends que l'on regrette l'absence du mot « laïcité » dans le contrat d'engagement républicain, mais il me semble qu'avec le rappel, dans le préambule, que la République est laïque, et la mention de la liberté de conscience et de l'impossibilité de se soustraire à ses lois pour un motif religieux, nous répondons globalement à la commande, ainsi qu'aux questions posées par les auteurs des amendements.

Enfin, j'aimerais exprimer une opinion personnelle, même si elle est un peu éloignée du cœur du débat : je n'accepte pas que l'on refuse, pour des motifs religieux, de serrer la main de quelqu'un en raison de son sexe.

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