Intervention de Cédric O

Réunion du jeudi 21 janvier 2021 à 21h00
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi confortant le respect des principes de la république

Cédric O, secrétaire d'État :

Avis défavorable. Les sous-amendements, comme les parallèles de Mme Ménard, traduisent une incompréhension profonde de ce que défendent les amendements du Gouvernement et de la rapporteure.

La censure du Conseil constitutionnel n'a porté que sur l'article 1er de la loi Avia ; l'ensemble des autres articles a été censuré par effet de domino, sans que le Conseil constitutionnel se prononce sur le fond.

Ni la gravité, ni la qualification juridique du contenu ne changent selon l'importance du réseau social. Vous serez sanctionné de la même manière, que vous ayez insulté ou menacé de mort quelqu'un sur une petite plateforme ou sur une grande. Il est cependant vrai, compte tenu des mécanismes d'accélération et de la visibilité qui est donnée aux contenus sur une très grande plateforme, que la même insulte ou menace de mort y est plus dangereuse. Le résultat n'est pas le même quand des algorithmes accélèrent vos propos auprès de millions de Français ou dans des cercles plus confidentiels. Nous considérons donc qu'à grand réseau social, grandes responsabilités. Le DSA prévoit d'ailleurs des obligations renforcées pour les grands réseaux sociaux et un système transversal pour les plus petites plateformes. Compte tenu de la complexité juridique, nous avons choisi de nous concentrer sur les grands réseaux sociaux, où les Français sont les plus nombreux et qui font le plus de mal. Mais, encore une fois, un contenu est tout autant illégal qu'il soit diffusé sur une petite ou sur une grande plateforme, et le risque pénal est le même.

S'agissant du CSA, vous faites un parallèle entre réseau hertzien et grandes plateformes de l'internet, arguant que celles-ci ne sont pas un service public. Vous commettez une erreur historique. C'est précisément lors du passage du monopole public de l'ORTF à la privatisation de la première chaîne, que la nécessité du pluralisme d'expression s'est fait sentir, et que le CSA a été chargé de le garantir. On a considéré qu'il y avait une asymétrie avec la mainmise importante d'une chaîne sur le marché de l'information.

C'est la même chose ici. Il n'est pas totalement vrai que vous avez le choix d'aller ou non sur un réseau social dominant ; des effets de réseau font que chacun va où tout le monde se trouve. Pour certaines personnes, quitter Facebook c'est perdre une partie de leur sociabilité. Même en ayant conscience d'être exposé à des contenus dangereux ou problématiques, il est difficile de quitter les très grands réseaux sociaux. C'est d'ailleurs pour cela qu'il n'existe pas plusieurs Facebook, Twitter ou Tik Tok. Dès lors, on considère que les grands réseaux, qui sont pourtant des entreprises privées, ont certaines obligations, sous la supervision du pouvoir public. Et il est logique que le CSA, compte tenu de son historique et de son action, en soit chargé.

Enfin, le texte contient non seulement des dispositions de protection, de régulation et de modération, mais aussi des mesures d'encadrement de la modération, notamment en matière de suppression des comptes. On sait que certaines personnes ou associations, y compris des victimes de la haine en ligne, ont pu être censurées et leurs comptes supprimés par les plateformes de manière indue. Le texte introduit une forme d'équilibre, en obligeant les plateformes à instituer des procédures très normées de suppression de compte, avec des mécanismes d'appel, pour défendre la liberté d'expression.

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