Intervention de Alexis Corbière

Réunion du lundi 7 juin 2021 à 16h00
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi confortant le respect des principes de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlexis Corbière :

Les profondes modifications introduites par le Sénat renforcent considérablement l'opposition du groupe La France insoumise à ce texte. La laïcité et la République ont de vrais ennemis, mais aussi de faux amis, qui se réclament de ces principes mais leur rendent un bien mauvais service. Nous nous opposons, pour ces raisons, aux amendements du Sénat et à la philosophie du texte, dans sa première comme dans sa deuxième mouture.

Les mots « République » et « laïcité » reviennent sans cesse mais, finalement, le citoyen s'y perd, parce que ces termes sont souvent employés pour aller à l'encontre de ce qu'est, selon nous, la réalité de la laïcité. La laïcité, en France, s'exprime d'abord à travers le respect de la loi du 9 décembre 1905, qui garantit la liberté de culte et de conscience. La République doit permettre aux citoyens de pratiquer leur religion en toute liberté, mais les religions ne peuvent bénéficier de financements publics. C'est à cela, d'abord, que nous devons veiller scrupuleusement.

Ensuite, il y a la question du terrorisme. Le fondamentalisme islamiste a armé la main de gens qui ont assassiné un certain nombre de nos concitoyens. Il doit être traité par les services de police et de renseignement, auxquels le texte ne fait absolument pas référence. M. le Premier ministre et M. le ministre de l'intérieur ont reconnu qu'un grand nombre des attentats qui nous ont frappés n'auraient pas pu être empêchés par ce texte.

Ce projet de loi procède de la volonté politique de faire débat, de donner le sentiment à nos concitoyens que le Gouvernement agit, en sous-entendant que certaines choses n'avaient pas été faites auparavant. On crée souvent un sentiment de suspicion généralisée en ratant les cibles et en manquant d'efficacité. Le texte que nous renvoient les sénateurs est, de ce point de vue, assez caricatural. Ils proposent, par exemple, de dissoudre les associations « qui interdisent à une personne ou un groupe de personnes à raison de leur couleur, leur origine ou leur appartenance ou non‑appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée de participer à une réunion ». Est-ce à dire que des familles espagnoles immigrées en France n'auraient plus le droit de se regrouper en associations ? Il revient aux services de police ou de renseignement d'apprécier si une association a une visée délictueuse.

L'interdiction du port de signes religieux par les accompagnatrices scolaires est tout aussi arbitraire et liberticide. Quelle est cette confusion entre le service public, qui doit garantir la laïcité, et ses usagers, auxquels on fait parfois appel pour pallier les défaillances du système scolaire ? Cela ne vise en réalité qu'une religion, ce qui heurte les principes républicains. Imagine-t-on, en effet, qu'un instituteur refuserait la présence d'un papa porteur d'une kippa lors d'une sortie scolaire ? Cela ne viendrait à l'idée de personne – du moins, ce n'est pas ma conception des choses. On a le droit de participer à une sortie scolaire, à la condition de ne pas faire de prosélytisme religieux.

De nombreuses autres dispositions procèdent de la même confusion.

Nous étions en désaccord radical avec la première version du projet de loi, car il ne renforçait ni la laïcité ni la République. Cette nouvelle mouture ne fait qu'aggraver les choses. Nous présenterons des amendements pour y remédier.

Ce qui renforcerait la laïcité – nous espérons être entendus sur ce point – serait l'application de la loi de 1905 dans les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle. De surcroît, cela ferait économiser 60 millions d'euros chaque année aux contribuables.

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