Intervention de Marie-George Buffet

Réunion du lundi 7 juin 2021 à 16h00
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi confortant le respect des principes de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-George Buffet :

Le projet de loi, tel qu'il revient du Sénat, est inquiétant. Il se caractérise par une surenchère d'affichage. Loin de rassembler sur les principes de la laïcité et de la République, il blesse notre conception de la laïcité et se transforme en une arme de suspicion à l'égard d'une partie de nos compatriotes, soit en raison de leur religion, soit en raison de leurs activités associatives, sportives, d'éducateur, d'enseignant, etc.

Je me réjouis que les rapporteurs entendent revenir sur une série de dispositions du Sénat, mais il faudra aller plus loin. Ce texte présente une grande fragilité : il ne traite pas l'aspect éducatif et social. Or la fracturation de notre société a des causes sociales ; elle est liée à l'ignorance, à l'absence d'ouverture à la connaissance, au débat contradictoire et critique. Le groupe GDR s'opposera à certaines dispositions adoptées par le Sénat, mais proposera aussi des amendements pour améliorer le projet de loi.

Nous nous opposerons très nettement à l'interdiction du port de signes religieux, tant pour les parents accompagnateurs des sorties scolaires que, plus généralement, dans l'espace public. La République française reconnaît la liberté de croire ou de ne pas croire, qui est consacrée par la loi de 1905, par une certaine conception de la laïcité. Je ne vois pas au nom de quoi on interdirait « les signes religieux » – j'emploie à dessein le pluriel, car il y a d'autres signes religieux que le voile. Va-t-on interdire à un curé de sortir en soutane dans l'espace public ? Soyons sérieux, oublions le voile et parlons de la laïcité et des principes de la République.

Je voudrais insister sur la question de l'école. Lorsqu'une jeune fille refuse d'aller à la piscine, cela peut s'expliquer par le fait qu'elle éprouve des difficultés dans son rapport au corps, qu'elle peine à accepter le regard des autres. Il ne faut pas sanctionner la famille, en cas d'absentéisme, en supprimant les allocations familiales, car cela revient à punir l'enfant ; il faut éduquer, débattre, comprendre, accompagner la jeune fille ou le jeune homme pour lui permettre de reprendre sa pratique sportive. C'est dans cet esprit que le remarquable lycée Maurice-Utrillo de Stains a organisé une semaine de débats, auxquels j'ai participé, avec des élèves qui refusaient la pratique sportive. De jeunes champions et championnes avaient été invités à leur présenter leur parcours sportif et à leur expliquer ce que le sport avait fait pour leur corps, leur bien-être psychique et physique.

Le Sénat doit avoir quelque chose contre la pratique sportive, car il a adopté plusieurs dispositions étonnantes. L'une d'elles, qui vise les professeurs d'éducation physique et sportive (EPS), me fait honte. Pourquoi un professeur d'EPS devrait-il signer une charte des principes républicains, et non un professeur de français ou de mathématiques ? Les enseignants seraient-ils moins républicains, dans cette discipline ? Les sénateurs devraient lire la charte du Comité international olympique (CIO), qui interdit les signes religieux dans les pratiques sportives.

Je me réjouis que Mme la rapporteure ait affirmé que nous continuerions à soutenir les femmes victimes de polygamie.

Dans le cadre de ce débat, le groupe GDR s'efforcera d'être aussi constructif que possible.

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