S'agissant des critères de pénibilité, une négociation est en cours sous l'égide du Premier ministre, avec la ministre du travail et les syndicats. L'industrie est relativement en avance sur la question de l'ergonomie des postes de travail. Lorsque nous travaillons sur le concept d'industrie 4.0, nous procédons à des améliorations des conditions de travail tout à fait notables. Je pense notamment au déploiement des robots et des cobots, qui allègent les tâches des hommes et des femmes dans certains métiers de l'industrie et diminuent la nécessité d'avoir un potentiel physique important pour manœuvrer, par exemple, des lignes de production dans l'automobile. Nous devons encore augmenter les exigences en matière d'ergonomie des postes de travail et faire le lien avec les maladies professionnelles, les troubles musculo-squelettiques et l'absentéisme. Il y a là un coût caché, qui n'est pas toujours assumé par les entreprises. L'évolution des postes de travail permet de faire travailler les salariés plus longtemps à leur poste et de diminuer massivement le taux d'absentéisme. Ces observations ne se vérifient pas pour tous les métiers : dans le secteur de la métallurgie lourde, par exemple, les conditions de travail demeurent assez particulières compte tenu des process de production, mais une réflexion poussée sur les questions d'ergonomie devrait permettre de trouver des solutions. J'insiste sur le fait que ces améliorations ergonomiques permettent d'augmenter la productivité, de limiter tant l'absentéisme que la désorganisation des lignes de production, et de traiter le problème des séniors qui peinent à aller au bout de leur carrière.
En matière de gouvernance, il me semble que vous devez définir un objectif unique. Je rappelle que la fixation d'un quota de 30 % induit qu'un genre est deux fois plus représenté que l'autre ; ce n'est donc pas un objectif insurmontable. Bien évidemment, un temps d'adaptation doit être accordé. Un premier argument en faveur de l'établissement rapide de ces quotas est qu'il n'existe pas de renouvellement automatique des mandats. Par ailleurs, dans les plus petites entreprises, la question n'est pas de recruter des femmes, mais simplement de recruter. Certains patrons de PME m'ont dit qu'ils n'arrivaient pas à recruter et que si je leur proposais la candidature d'une femme, ils l'embaucheraient immédiatement ! Nous devons être conscients que, tant que nous n'aurons pas résolu le problème de l'attractivité des métiers de l'industrie, il ne sera pas possible d'exiger une réelle parité.
Nos travaux sur l'élaboration d'une norme AFNOR consistent à rédiger un document de référence définissant les bonnes pratiques permettant de faire progresser l'égalité femmes-hommes. Ces pratiques concernent l'éducation, la santé, la prévention et l'arrêt des violences, les droits des jeunes filles et l'autonomisation économique des femmes. Dans un paysage où se définissent des normes de responsabilité sociale et environnementale, il est essentiel de faire entendre une voix française et une voix européenne. En effet, les Anglo‑Saxons, qui ne s'intéressaient pas vraiment au sujet, sont en train de s'en emparer, avec des éléments qui vont probablement nous déstabiliser. Dans certains modèles américains, il est par exemple demandé aux patrons de démontrer la diversité de leurs employés en fournissant des statistiques ethniques. Ces statistiques étant interdites en France, les entreprises de notre pays sont forcément mal notées, quelles que soient d'ailleurs leurs pratiques en matière de diversité ; or cette note est prise en compte par les investisseurs potentiels. Tout cela est très dangereux. Olivia Grégoire s'occupe de cette question, je la laisserai donc vous en parler. Les travaux sur la norme AFNOR, placés sous le haut patronage du Président de la République, ont débuté et seront présentés en juin 2021, lors du forum Génération Égalité de l'Organisation des Nations unies (ONU) qui se déroulera à Paris.