Intervention de Marie-Pierre Rixain

Réunion du mercredi 10 mars 2021 à 16h00
Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Pierre Rixain, présidente :

Mes chers collègues, notre ordre du jour appelle l'audition de M. Cédric O, secrétaire d'État chargé de la Transition numérique et des communications électroniques.

Monsieur le ministre, nous sommes ravis de vous accueillir. Le sujet que vous portez est particulièrement précieux pour la délégation aux droits des femmes.

Cette audition intervient dans le cadre de la mission d'information « Travailler, entreprendre, gouverner : accélérer l'égalité économique et professionnelle », que Mme Trastour-Isnard et moi-même menons depuis cet automne. Dans ce cadre, nous nous attachons à décomposer les mécanismes à l'œuvre derrière les inégalités économiques et professionnelles, à travers trois grands axes : l'entrepreneuriat, l'accès au marché du travail et la gouvernance économique. Nous entendons dresser un panorama général, assorti de propositions très concrètes – notamment sur les plans législatif et réglementaire – susceptibles de permettre à notre pays de franchir un nouveau cap en matière d'égalité économique et professionnelle.

Depuis quarante ans, la part des jeunes femmes a fortement progressé dans les disciplines où elles étaient auparavant minoritaires, telles que le droit, la médecine ou la gestion. Elles n'ont, en revanche, que peu investi les filières scientifiques et techniques. Ainsi, les filles, qui connaissent en moyenne une meilleure réussite scolaire que les garçons, continuent de s'orienter vers des filières professionnelles moins rentables sur le marché du travail.

En France, les femmes ne représenteraient que 28 % des salariés dans les secteurs du numérique. Pire, alors qu'il y a trente ans, les femmes occupaient 30 % des fonctions techniques, cette part est divisée par deux aujourd'hui. Les femmes sont actuellement surreprésentées parmi les fonctions support. Très peu d'entre elles sont ingénieures ou techniciennes.

Ce déséquilibre se constate également à la tête des entreprises innovantes. Depuis 2008, seulement 5 % de ces entreprises ont été fondées par une équipe féminine et 10 % par une équipe mixte. 85 % des start-ups ont donc été créées par une équipe entièrement masculine. Cette répartition se retrouve dans la ventilation des investissements réalisés par la banque publique d'investissement (Bpifrance) en 2020. En effet, 79 % des investissements concernent des start-ups fondées par un ou des hommes, 19 % concernent des start-ups fondées par une équipe mixte et seulement 2 % concernent des start-ups fondées par une ou des femmes.

Ces chiffres sont évidemment préoccupants car, selon le conseil d'orientation pour l'emploi, près de la moitié des emplois devraient être profondément bouleversés par les technologies d'automatisation et de numérisation dans les quinze années à venir. Ce bouleversement concernera a fortiori des emplois occupés par des femmes. Ces technologies transforment les emplois, mais elles créent également les emplois de demain. Il est donc essentiel que les femmes disposent des mêmes opportunités, atouts et compétences que les hommes pour les concevoir et en bénéficier pleinement.

Cet impératif est identifié depuis plusieurs années, et récemment encore par Mme Chiara Corazza dans son rapport Les femmes au cœur de l'économie et par nos deux collègues Céline Calvez et Stéphane Viry dans leur rapport sur Les femmes et les sciences.

Cet état des lieux soulève plusieurs problématiques, et en premier lieu celle de l'enseignement supérieur. Comment expliquer et surtout, comment attirer davantage de jeunes femmes vers ces formations ? Je pense ici à certaines initiatives vertueuses. Par exemple, après un effort considérable en matière de lutte contre les violences sexistes et sexuelles, Sophie Vigier a offert une attractivité nouvelle à l'école 42. Je pense évidemment également au secteur du jeu vidéo, où les studios de création ne comptent que 15 % de femmes, et qui fait régulièrement l'objet de dénonciations de la part de victimes de violence sexiste et sexuelle.

Ensuite, cet état des lieux soulève la problématique du financement des entreprises, et plus particulièrement des entreprises innovantes. Depuis la signature de la charte Sista en octobre 2019, avez-vous constaté une amélioration des objectifs visés ? Faut-il aller plus loin en contraignant davantage les acteurs de l'investissement afin d'accélérer la meilleure représentativité de l'économie à laquelle nous aspirons ? Faut-il plutôt commencer par les opérateurs de l'État, devant être exemplaires ? Je pense évidemment ici à Bpifrance.

Enfin, pourriez-vous nous détailler les actions de votre ministère pour lutter contre l'illectronisme, touchant 17 % de la population ? Il s'agit d'un véritable sujet de formation et d'adaptation des compétences à un marché de l'emploi en pleine mutation. Sur ce point, j'ajouterais également que la Délégation a organisé, le 25 novembre dernier, un colloque sur la lutte contre les violences économiques dans le couple. Nous avons constaté combien la numérisation des activités du quotidien pouvait également aggraver les inégalités entre les femmes et les hommes en cas de maîtrise insuffisante des nouvelles technologies ou de difficultés pour y accéder.

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