Intervention de Marie-Pierre Rixain

Réunion du mercredi 19 janvier 2022 à 16h45
Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Pierre Rixain, présidente :

Monsieur le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, merci d'avoir accepté de vous rendre disponible pour cette audition, afin d'échanger avec nous sur le sujet fondamental de la situation des femmes dans le monde agricole. Ce secteur est éminemment stratégique pour notre souveraineté nationale, et nous savons à quel point la place des femmes y est décisive. Si notre Délégation s'est régulièrement saisie de la question de la situation des femmes agricultrices, c'est avant tout à l'occasion de différents travaux particuliers, par exemple relatifs au système de retraite ou aux dispositifs permettant de concilier vie familiale et professionnelle. Nous avons également mené des réflexions sur les stéréotypes de genre et sur les conditions d'orientation professionnelle des jeunes filles. Votre audition nous donne l'occasion d'évoquer l'égalité femmes-hommes dans le monde agricole d'une façon globale.

L'agriculture compte certainement parmi les secteurs ayant connu les plus profondes mutations au cours des soixante dernières années. Si les femmes ont toujours été au cœur de cette activité, elles sont longtemps demeurées dans l'ombre, à l'écart de la direction des exploitations et des prises de décision, mais également de certains droits. Elles n'ont que très progressivement gagné en visibilité et en autonomie. Il a fallu par exemple soixante ans entre l'apparition du terme d'« agricultrice » en 1961 et l'alignement de leurs droits au congé maternité sur ceux du régime général.

Nous souhaiterions vous entendre sur la situation générale des femmes agricultrices. Le monde des exploitants agricoles compte parmi ceux qui connaissent une dynamique de féminisation. La proportion de femmes cheffes d'exploitation agricole est passée de 8 % en 1970 à 27 % en 2016. Cette hausse s'explique notamment par la reconnaissance de la place des femmes dans les exploitations, mais est également due à l'automatisation de certaines tâches, qui rend la profession plus attractive. Néanmoins, on estime que 160 000 fermes, soit un tiers des fermes françaises, sont appelées à arrêter leur activité d'ici trois ans. Ce constat est inquiétant pour notre souveraineté alimentaire et doit nous amener à reconsidérer la place des femmes dans l'agriculture d'aujourd'hui comme dans celle de demain.

Mieux formées et plus diplômées que leurs homologues masculins, les agricultrices aspirent à un autre statut, non plus à côté, mais au centre de l'exploitation et donner une place aux femmes dans l'agriculture me semble de nature à y ajouter de la valeur.

Dans quelle mesure ce mouvement se poursuit-il et comment nous situons-nous par rapport à nos voisins européens ? Quels sont les leviers d'action disponibles pour encourager davantage encore les jeunes femmes à construire et diriger leur exploitation ? Pourriez-vous nous indiquer dans quelle mesure les aides à l'installation profitent aux femmes et nous détailler les dispositifs qui leur sont spécifiquement destinés ?

Le législateur s'est efforcé, par étapes, de combler les inégalités femmes-hommes dans ce secteur : un certain nombre d'avancées majeures ont sensiblement amélioré la situation des femmes. La création du statut de conjointe collaboratrice a permis de reconnaître le rôle de nombreuses épouses d'exploitants en leur conférant des droits autonomes de protection sociale. L'amélioration des petites retraites agricoles bénéficie avant tout aux femmes. La promesse, formulée en 2017, de réforme du congé maternité des agricultrices a été tenue, au travers d'une loi que j'ai eu le plaisir de défendre. Nous pouvons nous en réjouir. Notre Délégation a organisé un colloque consacré spécifiquement à ce sujet, et les associations sont unanimes pour se féliciter que les agricultrices bénéficient désormais d'un congé maternité d'une durée équivalente à celui du régime général. Toute la difficulté est celle du remplacement, qui se présente également en d'autres occasions, mais qui constitue l'une des clés pour que les agricultrices prennent effectivement leur congé maternité.

Peut-être pourriez-vous nous fournir des éléments statistiques montrant dans quelle mesure les femmes sollicitent et bénéficient du congé maternité, et de quelle façon il contribue à combler les écarts entre les femmes et les hommes ?

S'agissant des plus jeunes, il semble que les effectifs des lycées agricoles approchent de la parité, mais que des déséquilibres demeurent dans le choix des filières, les garçons étant surreprésentés dans les filières de production agricole et nettement minoritaires dans les filières des services à la personne et aux territoires. Nous nous en sommes rendu compte, monsieur le ministre, en visitant ensemble le lycée horticole de Marcoussis. Pourriez-vous nous préciser comment votre ministère agit pour favoriser la mixité des métiers agricoles et pour soutenir l'insertion professionnelle des jeunes ?

Par ailleurs, la profession se robotise et s'automatise – je pense ici au campus Hectar, qui pense un futur agricole durable, tant pour l'environnement que pour les hommes et les animaux, et dont la dirigeante, Audrey Bourolleau, a été identifiée par le collectif Sista comme l'une des dix femmes à suivre en 2022. Il convient de faire en sorte que les nouvelles technologies bénéficient également aux femmes et soient un facteur supplémentaire favorable à leur inclusion, tant dans le secteur du numérique que dans celui de l'agriculture.

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