Intervention de Annick Girardin

Réunion du samedi 30 mai 2020 à 17h30
Délégation aux outre-mer

Annick Girardin, ministre :

Les aides financières inédites – les plus généreuses en Europe – accordées par l'État sont applicables aux compagnies aériennes locales. Nous regardons de très près la situation d'Air Tahiti et d'Air Tahiti Nui. Nous avons tenu une première réunion avec M. Djebbari et les compagnies sur l'ouverture du ciel, la préparation de la saison estivale et les contraintes de sécurité dans les avions. J'espère organiser une deuxième rencontre cette semaine avec le ministre de l'économie pour répondre aux demandes des compagnies.

Je peux sensibiliser les élus, le monde économique, les populations à l'intérêt de la réouverture des territoires, tout en définissant des mesures de protection avec le ministre de la santé. Je souhaite que les entreprises, qui ont déjà bénéficié du report des charges sociales et fiscales et du moratoire sur certaines taxes aériennes, soient davantage accompagnées. Une équipe interministérielle élaborera des mesures allant au-delà des prêts de trésorerie garantis par l'État. Toutefois, les principales difficultés tiennent à la réouverture d'Orly et aux fortes réticences des territoires à rouvrir leurs frontières rapidement.

Je me préoccupe depuis de nombreux mois de la filière audiovisuelle, qui connaissait des difficultés avant l'épidémie. Elle n'a pu bénéficier du chômage partiel, car elle s'est trouvée en première ligne, sans quasiment percevoir aucune recette. Avec le ministère de la culture, nous avons proposé un plan, qui fait l'objet d'un arbitrage interministériel, prévoyant une réduction du coût du travail, la restauration de la trésorerie, une aide directe ponctuelle et un crédit d'impôt communication pour les annonceurs.

Nous avons commencé à rapatrier des Polynésiens grâce au pont aérien que nous avons mis en place, de manière exceptionnelle, quand le territoire a coupé ses relations avec le reste du monde – un second pont aérien reliant Mayotte à La Réunion. Nous avons financé des associations, mis en place des cellules d'accompagnement, des quatorzaines à Paris et des couloirs sanitaires, et testé les jeunes concernés. J'ajoute que tous les étudiants bénéficient de tarifs négociés sur les vols. Nous souhaitons pouvoir ramener à présent un plus grand nombre de Polynésiens.

L'initiative « Outre-mer en commun » est dotée de 1 milliard d'euros, dont 750 millions sont mobilisables rapidement. L'urgence sanitaire et économique, ainsi que la relance durable, bénéficieront d'un apport de 500 millions d'euros, tandis que des financements déjà octroyés seront décaissés en toute urgence, à hauteur de 250 millions d'euros. S'agissant de l'urgence sanitaire, nous avons engagé un plan national de désendettement des hôpitaux, auquel participe l'AFD, et sommes attentifs aux enjeux transfrontaliers que constituent le suivi épidémiologique et la coopération régionale.

Au titre de l'urgence économique, nous aidons les acteurs publics et privés à faire face aux conséquences immédiates de la crise. Les collectivités locales bénéficieront, en sus des annonces du premier ministre, d'une aide supplémentaire de 250 millions d'euros, de prêts de préfinancement et de prêts d'urgence d'aide à l'investissement. S'y ajoutent des prêts garantis par l'État pour les collectivités du Pacifique et le soutien aux entreprises les plus fragiles et au secteur informel, notamment grâce à un apport de 28 millions d'euros à l'association pour le droit à l'initiative économique (ADIE). Il faut aider les entreprises à rejoindre l'économie formelle par des aides à l'investissement et à la formation.

Par ailleurs, il convient de favoriser la relance inclusive et décarbonée pour accélérer la trajectoire 5.0, par l'assistance à la maîtrise d'ouvrage et la formation. Une étude de Carbone 4 sera réalisée dans tous les territoires.

Enfin, 500 000 euros seront affectés aux projets post-crise des associations.

Des étudiants ultramarins se trouvent dans le monde entier, qui doivent être traités équitablement. Le ministère des affaires étrangères n'a rapatrié aucun étudiant, hormis ceux qui se trouvaient dans des zones présentant un risque élevé. Il ne fera pas d'exception pour ceux qui sont bloqués au Canada. On peut toutefois travailler en bonne intelligence avec ce pays, le Québec, Air Canada pour qu'un vol soit proposé à tous les Ultramarins ayant un motif impérieux de rentrer aux Antilles et en Polynésie. Vous pouvez sensibiliser à ce sujet Air Canada, en Guadeloupe et en Martinique. Le cas échéant, je serai à vos côtés pour engager une action complémentaire.

Le rapport sur l'octroi de mer n'est qu'une simple analyse macroéconomique, à laquelle je n'ai pas participé. Il s'agit d'un rapport parmi tant d'autres, qui alimentera la réflexion ; mais le moment n'est pas venu.

Les chiffres de l'emploi publiés le 28 mai sont mauvais, mais moins que dans l'hexagone. Nous devons poursuivre l'application du plan Pétrel dans tous les territoires d'outre-mer pour lutter contre le chômage. Les enveloppes de contrats aidés n'ont pas été suffisamment consommées du fait de l'épidémie. L'État prend déjà en charge une part importante de certaines actions, comme la lutte contre la dengue ; nous réfléchirons à augmenter cette part pour les projets liés à la crise sanitaire.

Instaurer un passeport sanitaire, un protocole de test, ou imposer de voyager avec un carnet santé, comme cela se fait en Guyane pour la fièvre jaune : pourquoi pas ? Mais se posera alors la question de la durée de conservation des données.

Concernant le matériel, seuls les masques ont posé problème – la tension était mondiale – mais le retard a été comblé. Les lits en réanimation sont en nombre suffisant et des respirateurs ont été livrés, permettant un doublement des capacités dans les territoires ultramarins. J'ai veillé à ce que chaque territoire bénéficie des mêmes mesures qu'à l'échelle nationale : les chiffres le démontreront. Nous devons inspirer confiance à la population et aux touristes, en leur assurant qu'ils pourront être pris en charge en cas de contagion et que nous nous sommes équipés pour assumer des flux supplémentaires. Il faut également prévenir l'arrivée de nouveaux cas, en testant avant le départ, puis à nouveau sur place. Nous pourrons ainsi accueillir des touristes cet été, même si ce n'est pas à la hauteur des attentes. En outre, les aides de l'État continueront jusqu'à la fin de l'année pour les entreprises liées aux activités touristiques.

Le fret aérien se fait principalement dans les soutes d'avions transportant des passagers, ces derniers assurant l'équilibre budgétaire de la compagnie. Nous avions fixé avec les compagnies les prix du fret réservé en priorité au sanitaire et à l'alimentaire périssable. D'autres vols étaient assurés par cargo, avec des tarifs beaucoup plus élevés puisque les compagnies ne transportaient pas de passagers. Mais le surcoût lié au transport a eu moins d'effet que l'augmentation des prix des marchandises elles-mêmes, qui est un phénomène mondial. Nous devons veiller à ce que personne ne profite de cette crise pour s'engraisser, mais il n'y a pas eu de dérapage : il n'est donc pas nécessaire de demander aux préfets de contrôler les prix.

À Saint-Pierre-et-Miquelon, il n'y a qu'un vol de quarante-cinq passagers tous les quinze jours, et aucune amélioration n'est prévue avant la mi-juin. Les relations maritimes avec le Canada ne sont pas possibles puisque celui-ci a fermé ses frontières. Une douzaine de vols directs de Paris à Saint-Pierre-et-Miquelon sont opérés en été par la société Air Saint-Pierre, mais ils concernent davantage un tourisme affinitaire, qui va peu à l'hôtel. Le fonds de solidarité sera ouvert aux hôteliers jusqu'à la fin 2020 ; cela peut aller jusqu'à 10 000 euros par mois. J'ai demandé de la souplesse dans la négociation avec les régions qui cofinancent ce fonds de solidarité. Les entreprises touristiques pourront recourir à l'activité partielle jusqu'à la fin du mois de septembre 2020.

Pour les entreprises qui ne pourraient pas reprendre leur activité, 1,3 milliard d'euros seront mis à leur disposition pour investir. Certaines taxes ont été allégées mais Saint-Pierre-et-Miquelon n'est pas concernée. L'exonération des cotisations sociales en cas de fermeture ou de faible activité, applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon, est prévue jusqu'au mois de juin, dans un premier temps ; le montant total est de 2,2 milliards d'euros pour l'ensemble du territoire national. Sur le volet fiscal, je ne peux pas apporter de réponse au secteur touristique puisque Saint-Pierre-et-Miquelon a sa propre fiscalité en la matière.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.