Délégation aux outre-mer

Réunion du samedi 30 mai 2020 à 17h30

Résumé de la réunion

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La réunion

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La réunion, en visioconférence, débute à 17 heures 30 (heure de Paris)

- à 5 h 30 en Polynésie, à 11 h 30 aux Antilles, à 12 h 30 en Guyane, à 13 h 30 à Saint-Pierre-et-Miquelon, à 18 h 30 heures à Mayotte, à 19 h 30 à La Réunion, à 2 h 30 (le lendemain) en Nouvelle-Calédonie et à 3 h 30 (le lendemain) à Wallis et Futuna. -

Présidence de M. Olivier Serva, président

Les débats sont accessibles sur le portail vidéo du site de l'Assemblée nationale à l'adresse suivante :

http://assnat.fr/K10xEh

La Délégation procède à l'audition de Mme Annick Girardin, Ministre des Outre‑Mer.

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Chers collègues, la délégation accueille maintenant pour son audition Mme Annick Girardin, Ministre des Outre‑Mer.

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Madame la ministre, nous avons le sentiment que, sur le plan sanitaire, à l'exception de Mayotte et de la Guyane, les outre-mer ont échappé au pire. Le nombre de cas y a été relativement limité et certains territoires, comme Wallis-et-Futuna, ont été épargnés. Seule Mayotte a été fortement touchée. Pouvez-vous nous dire quelques mots sur la situation de l'archipel et les leçons à en tirer ?

Les effets les plus tangibles de la crise sont économiques. La pandémie, qui a eu pour conséquences le confinement et la raréfaction des liaisons aériennes et maritimes, a aggravé une situation déjà sombre outre-mer, en particulier dans les secteurs du tourisme et de la restauration. On a constaté une augmentation des prix des produits importés, parfois une pénurie de certaines denrées.

Plusieurs mesures d'urgence prises par le Gouvernement pour aider les entreprises en difficulté ont été corrigées, notamment à la demande de notre délégation, afin de tenir compte des réalités locales, comme l'existence de nombreuses entreprises sans salarié. Mais cela ne suffit pas. Les chambres de commerce et des métiers, ainsi que les organisations professionnelles lancent un cri d'alarme sur les dégâts de la crise en termes d'emploi et de faillites.

Comment voyez-vous la saison touristique à venir ? Les vols vont-ils reprendre ? Les touristes seront-ils soumis à une quatorzaine dissuasive ou à des tests ? Les hôtels, restaurants et musées ultramarins rouvriront-ils rapidement ? Nicole Sanquer, qui ne pouvait être présente aujourd'hui, souhaiterait savoir où en sont les rapatriements des étudiants polynésiens se trouvant dans l'hexagone ou à l'étranger et quelles décisions vous comptez prendre pour sauver Air Tahiti. Je souhaiterais avoir connaissance, pour ma part, des mesures qui seront prises pour les restaurateurs.

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Annick Girardin, ministre des outre-mer

Nous partageons la volonté de protéger les territoires d'outre-mer et d'assurer la relance de leur activité. La propagation du virus a été contenue. Nous devons trouver un équilibre entre le respect des consignes sanitaires et la reprise de la vie sociale et économique. Mayotte, où je me suis rendue du 18 au 20 mai, réclame une attention particulière, comme la Guyane, qui connaît une recrudescence de cas, notamment dans la zone frontalière avec le Brésil.

Face à la crise, nous avons pris des mesures historiques, tel le soutien aux collectivités. Les mesures nationales sont adaptées depuis le premier jour aux territoires ultramarins, parfois à la demande des parlementaires. Les préfets y travaillent avec les élus locaux.

Le conseil scientifique a estimé, dans ses avis du 8 avril et du 12 mai, que la propagation du virus avait été maîtrisée. Les livraisons de masques, notamment de Santé publique France, se poursuivent. On a éprouvé quelques difficultés en matière d'acheminement du matériel, qui s'expliquent en partie par la baisse du nombre de vols.

Sur le plan économique, des milliers d'entreprises ultramarines ont bénéficié des aides d'urgence du Gouvernement, notamment par le biais des cellules de crise économique instituées dans tous les territoires, qui font du cas par cas. Nous entendons continuer à soutenir les entreprises, éviter les faillites et la recrudescence du chômage.

Sur le plan social, la prestation d'aide à la restauration scolaire (PARS) est versée directement aux familles les plus modestes, une aide est versée aux bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) et de l'allocation de solidarité spécifique (ASS), et une aide alimentaire spécifique est apportée aux habitants de Mayotte, de la Guyane et de Saint-Martin.

Nous travaillons d'arrache-pied pour faciliter le retour des étudiants ultramarins, notamment polynésiens, restés dans l'hexagone. Depuis deux jours, des vols desservent les Antilles, la Guyane, Saint-Pierre-et-Miquelon et La Réunion. Les jeunes encore présents partiront dès que possible. Les quatorzaines parisiennes ont eu pour objet, je le rappelle, d'alléger la pression pesant sur les territoires.

S'agissant de la deuxième phase du déconfinement, Mayotte et la Guyane, classées en zone orange, restent en vigilance renforcée et continuent à recevoir une protection spécifique à l'entrée. Jusqu'au 22 juin, les déplacements vers les territoires ultramarins restent soumis à un motif impérieux et à une quatorzaine à l'arrivée, à domicile ou en centre d'hébergement. Des élus et des acteurs socioéconomiques souhaitaient une meilleure conciliation de la protection sanitaire et de la continuité économique. Aussi allons-nous proposer très rapidement aux territoires volontaires d'expérimenter un protocole prévoyant un test covid dans les 48 heures avant l'embarquement, ainsi qu'une septaine et un nouveau test à l'arrivée, ce qui permettrait, en cas de résultat négatif, de réduire les restrictions lors de la deuxième septaine. Ce dispositif n'a pas encore été validé par le conseil scientifique et nécessitera un décret.

À partir du 22 juin, si les conditions sanitaires le permettent et que l'aéroport d'Orly rouvre, j'ai bon espoir que le nombre de vols augmente – même s'il ne faut pas s'attendre à un retour immédiat à la normale. Les collectivités du Pacifique, compétentes en matière de santé, envisagent, pour leur part, une reprise plus tardive du trafic aérien. La réouverture de nos territoires doit se faire en toute sécurité ; c'est aussi une nécessité pour la relance économique.

Le premier ministre a annoncé un plan de soutien d'ampleur au tourisme, qui s'appliquera pleinement dans les territoires ultramarins. Nous nous attachons à déterminer les mesures qui pourraient être adaptées en priorité, d'ici à quelques semaines, pour renforcer l'efficacité du dispositif. Nous augmenterons certaines aides. Le plan inclut les cafés et les restaurants, qui peuvent continuer de recourir à l'activité partielle et au fonds de solidarité jusqu'à la fin 2020. Jusqu'en juin, les TPE-PME du secteur touristique bénéficient d'une exonération de cotisations sociales, qu'elles soient fermées ou en phase de reprise, tant que l'activité est jugée faible. Par ailleurs, le prêt garanti par l'État (PGE) « saison » offre des conditions plus favorables que le PGE classique, puisqu'il est plafonné aux trois meilleurs mois de 2019.

Le Gouvernement apportera dans le prochain projet de loi de finances rectificative (PLFR) une réponse inédite aux difficultés des collectivités. Les communes bénéficieront d'adaptations du droit commun, à savoir d'une compensation des pertes d'octroi de mer et de taxe sur les carburants, à partir de la moyenne des recettes fiscales perçues entre 2017 et 2019. Les régions ultramarines se verront appliquer une garantie ad hoc sur les ressources d'octroi de mer et de taxe sur les carburants. Les départements d'outre-mer, quant à eux, bénéficieront, comme en métropole, du dispositif national d'avances destiné à compenser l'effondrement des droits de mutation à titre onéreux. Les collectivités relevant de l'article 74 de la Constitution bénéficieront également d'une compensation de leurs pertes de recettes. Par ailleurs, nous avons octroyé, par le biais de l'Agence française de développement (AFD), un prêt de 240 millions d'euros à la Nouvelle-Calédonie. Nous envisageons le même dispositif pour la Polynésie française ; il figurera dans le PLFR 3. Tous les territoires seront accompagnés en fonction de leurs difficultés et spécificités. Nous soutenons les collectivités, en matière de trésorerie et d'investissement, avec la Banque des territoires et l'AFD ; nous lançons avec cette dernière l'initiative « Outre-mer en commun ».

La Polynésie ayant rapidement fermé son territoire, nous avons déployé un pont aérien – acheminant des passagers et du fret médical – avec Paris, pendant trois mois, pour un coût de 3,2 millions. La gestion très protectrice de cette collectivité n'a pas permis de rapatrier suffisamment de Polynésiens chez eux. Le vol de ce jour ramène 155 personnes mais 627 Polynésiens attendent encore leur retour ; il faut donc aller plus loin, en accord avec le gouvernement local.

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La situation des étudiants antillais, bloqués au Canada, s'aggrave. Il faut revoir la doctrine française, selon laquelle, lorsque des solutions commerciales – même plus coûteuses ou plus longues – existent, aucun rapatriement n'est organisé. Nous sollicitons l'intervention rapide du Gouvernement. Si Air Canada ne peut effectuer le rapatriement, il faut demander à Air France de le faire.

Un passeport sanitaire doit être imposé à tout passager désirant se rendre en Martinique, en Guadeloupe ou en Guyane pour les vacances. Un test doit être effectué lors du départ pour éviter que le virus ne se propage à nouveau dans nos territoires.

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La maladie progresse dangereusement en Guyane, principalement à la frontière avec le Brésil, qui n'a toujours pas atteint son pic épidémique. Le bras de fer engagé par le président Bolsonaro contre les gouverneurs ayant adopté des mesures de confinement laisse présager le pire, alors que la frontière, longue de 750 kilomètres, reste désespérément poreuse et difficile à contrôler.

En Guyane, le décalage entre le discours rassurant de l'État et la réalité suscite de l'incompréhension, voire de la colère : les masques restent introuvables et le gel hydroalcoolique n'arrive pas en quantité suffisante. Le préfet de la Guyane refuse de constituer le comité local de levée de confinement. Quels moyens financiers ou réglementaires les services de l'État en Guyane ont-ils sollicité afin d'endiguer l'épidémie ? J'ai l'intime conviction que la vérité n'est pas dite aux élus de Guyane.

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Le covid-19 arrive au plus mauvais moment pour le BTP, dont l'activité a baissé des deux tiers dans les outre-mer, et même de plus de 95 % à La Réunion. L'apathie de la relance devient inquiétante. Les bailleurs sociaux sont très silencieux. Or tous les moyens du monde ne suffiront pas à rétablir une activité dans les entreprises si les projets de construction ne reprennent pas.

Êtes-vous à l'origine du rapport sur l'octroi de mer, arrivé comme un cheveu sur la soupe dans ce débat sur la reprise économique, ou bien est-ce Bercy ? Que va-t-il devenir ?

Concernant le couloir sanitaire, des tests sérologiques seront-ils effectués au moment du départ ? Ne peut-on diminuer la durée de la septaine prévue pour les touristes ? Il faut naturellement se prémunir contre toute nouvelle vague de l'épidémie mais il faut aussi assurer la reprise économique en juillet et en août car il serait dommage que les touristes se rendent à l'île Maurice plutôt qu'à La Réunion.

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Annick Girardin, ministre

Si l'État n'a pas compétence sur les compagnies aériennes locales, les aides qui leur sont destinées sont les mêmes que pour toutes les entreprises, aussi bien les dispositifs nationaux que les dispositifs régionaux complémentaires. Il y a plusieurs niveaux de compagnies aériennes : Air France a été traitée au plan national ; Air Austral a été accompagnée par le comité interministériel de restructuration industrielle (CIRI) ; une table ronde est prévue la semaine prochaine avec les « petites » compagnies aériennes.

Nous avons proposé aux étudiants ultramarins présents sur le territoire hexagonal différents dispositifs d'accompagnement financier et associatif, ainsi que des aides au retour. Les étudiants antillais ou polynésiens présents au Canada ont dû passer par Paris pour rentrer chez eux : ce n'est pas la meilleure des solutions pour un monde plus vert mais c'est la seule qui soit prête commercialement. Le ministère des affaires étrangères n'a rapatrié aucun étudiant car la situation sanitaire du Canada ne présente pas un très fort risque. Air Canada a souhaité reprendre des vols commerciaux vers les Antilles, mais la France n'a pas rouvert ses frontières. On ne peut entrer sur un territoire ultramarin que pour motif impérieux. Il n'y aura pas de dérogation pour acheminer des touristes. Peut-être par la voie diplomatique pourrait-on amener Air Canada à affréter un vol pour rapatrier ces étudiants aux Antilles, les Polynésiens poursuivant leur voyage ensuite depuis la Guadeloupe.

À la notion de passeport sanitaire, je préfère celle de couloir sanitaire avec protocole de tests liés à cette épidémie et circonscrits dans le temps. Une expérimentation sera réalisée dans certains territoires, et nous préparons un décret pour lui donner une base juridique. Il s'agira de pratiquer un test PCR quarante-huit heures avant de quitter la métropole, puis de respecter une septaine, avant un nouveau test et un temps d'observation dans les sept jours qui suivent. Ma priorité est de protéger le territoire ultramarin sans l'étouffer, en permettant un tourisme familial et affinitaire cet été.

La Guyane compte deux foyers à la frontière du Brésil et quelques clusters familiaux à Kourou et à Cayenne. Le déconfinement a été adapté : pas de reprise des écoles, recherche active des cas dans l'Oyapock, utilisation d'un automate pour augmenter notre capacité de tests, mobilisation de la réserve sanitaire nationale, isolation des cas positifs. Il n'y a pas de saturation, avec trente-quatre lits actifs sur trente-huit et soixante-quatre lits mobilisables. Les déplacements sont restreints et il est interdit de circuler de vingt-trois heures à cinq heures du matin ; les transports urbains sont suspendus ; la vente d'alcool à emporter est interdite de dix-huit heures à huit heures du matin.

Le préfet et l'ARS adressent directement leurs besoins au ministère de la santé. L'organisation nationale a changé : une seule structure statue désormais sur l'ensemble des demandes, l'épidémie ayant largement été maîtrisée. Des moyens en équipements et en personnels sont régulièrement envoyés dans tout le territoire. Le fonds de 1 milliard de l'AFD comportera un volet sanitaire. Nous aidons nos voisins avec des livraisons de bouteilles d'oxygène et des tests côté brésilien. Je demanderai au préfet de réaliser un bilan précis, que j'adresserai à l'ensemble de la délégation.

Il est nécessaire de relancer très rapidement le BTP et la rénovation de logements. En 2018 et 2019, nous avons versé, au titre du fonds exceptionnel d'investissement (FEI), 30 % d'avance aux collectivités pour leurs projets. J'ai demandé que cette avance passe à 50 %, soit 11 millions de plus pour ces mêmes projets dans la trésorerie des collectivités, et donc des entreprises. Le FEI est engagé à 100 % dans des opérations concernant l'eau, les déchets, la construction scolaire, les routes, dans le cadre de la trajectoire outre-mer 5.0. Il faut maintenant que ces chantiers soient lancés. J'ai réuni les hauts conseils de la commande publique des cinq départements et régions d'outre-mer afin que les bonnes pratiques soient partagées.

La ligne budgétaire unique doit aussi être mobilisée. J'ai demandé aux préfets d'estimer l'impact de la crise sur la production de logements. Il s'agit d'accélérer l'application territoriale du plan logement outre-mer 2019-2022. CDC Habitat projette de racheter des immeubles en construction à des promoteurs, ce qui représentera 5 000 à 6 000 logements pour un engagement de crédits entre 100 et 120 millions en 2020 et 2021.

L'État a annoncé qu'il allait compenser les recettes d'octroi de mer et de taxes sur les carburants. Il y aura aussi un programme de rebond : ce sera un investissement de plus d'un milliard d'euros à destination de toutes les collectivités, avec une part outre-mer. Sur le rapport demandé par la direction générale du Trésor sur l'octroi de mer, je n'ai pas encore rencontré les rapporteurs. Le moment n'est pas venu d'ouvrir ce chantier : je ne fais pas partie de ceux qui refusent systématiquement d'ouvrir ce dossier, mais cela n'a rien d'une urgence.

Enfin, nous devons permettre aux Français de partir en vacances cet été, tout en protégeant les territoires ultramarins.

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Votre réponse, notamment sur l'octroi de mer, me satisfait. La question n'est pas soulevée au bon moment et les auteurs du rapport n'ont certainement pas eu le temps de se rapprocher des réalités ultramarines. Nous invitons à respecter l'autonomie fiscale des collectivités territoriales et à réfléchir avec elles, dans l'intérêt des territoires ultramarins, comme vous l'avez fait récemment avec le Premier ministre.

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Le plan de relance de l'automobile comporte un objectif écologique louable, celui de promouvoir les véhicules propres. À La Réunion, où les véhicules électriques ne représentent que 2 % du marché, l'urgence est toutefois de résoudre le surstockage résultant du confinement, dont le coût diminue la trésorerie des entreprises. Or le renforcement de la prime à la voiture électrique ne rassure pas les acteurs. Quant aux autres mesures, elles ne sont pas adaptées aux spécificités locales et ne permettront pas la reprise immédiate de la filière.

Quant aux transports en commun, ils ont contribué au maintien des services publics et des activités essentielles, mais les exploitants comme les autorités organisatrices de la mobilité ont subi des pertes de recettes considérables. Des milliers d'emplois sont ainsi menacés. J'ai rédigé à ce sujet plusieurs courriers au Président de la République et aux membres du Gouvernement, qui sont restés sans réponse.

Quelles mesures spécifiques et adaptées l'État est-il susceptible de prendre en faveur de ces deux secteurs à La Réunion ?

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L'accès à l'eau est déterminant pour respecter les gestes barrières. Depuis le début du confinement, près de 10 % des Martiniquais en sont partiellement privés alors qu'un Guadeloupéen sur quatre subit des coupures d'eau, depuis des années. À Mayotte, outre les quartiers défavorisés privés d'eau courante, le sud est confronté à des coupures d'eau persistantes. Un plan est-il prévu pour sortir de cette situation, qui mécontente de plus en plus les populations ?

Par ailleurs, une solution a-t-elle été trouvée pour les Mahorais bloqués en métropole, comme elle l'a été pour ceux retenus à La Réunion ? Quand le ciel mahorais sera-t-il rouvert, notamment pour les parlementaires ?

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Je salue les efforts financiers du Gouvernement, notamment l'initiative « Outre-mer en commun », dotée de près d'un milliard d'euros d'aides à destination des collectivités locales et des entreprises ultramarines.

En Guadeloupe, les hôteliers ont toutefois le sentiment d'être écartés de la destination France, du fait de la limite des 100 kilomètres et de la quatorzaine. Cinquante emplois et 3 millions de recettes sont perdus chaque jour. C'est dire le drame auquel les acteurs du secteur, quoique soutenus par le Gouvernement, doivent résister jour après jour.

Nous attendons beaucoup de vous dans ces territoires, notamment sur la question du passeport sanitaire. Sans tourisme, il n'y a pas d'octroi de mer, même si le troisième PLFR prévoira une réponse à hauteur des pertes des collectivités territoriales ainsi qu'une taxe sur les carburants. Il importe que le secteur puisse repartir, en maintenant l'équilibre entre économie et garantie sanitaire. Votre réponse à ce sujet nous donne espoir.

Par ailleurs, les outre-mer ne sont pas représentés aux réunions du Ségur de la santé des 3 et 12 juin. Pouvez-vous convaincre le ministre des solidarités et de la santé de nous laisser exposer par visioconférence la situation de nos hôpitaux et personnels soignants ?

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Annick Girardin, ministre

Dans une dynamique de verdissement, le Gouvernement a créé un bonus écologique de 7 000 euros pour les véhicules électriques, un autre de 2 000 euros pour les véhicules hybrides rechargeables ainsi qu'une prime à la conversion de 5 000 euros. Cette volonté se matérialise par des aides spécifiques pour soutenir le secteur automobile, avec 200 millions d'euros de subventions pour la digitalisation, la robotisation et la transformation industrielle, notamment écologique, 150 millions d'euros pour accompagner l'effort de recherche ainsi que la création d'un fonds d'investissement de 600 millions d'euros.

Si le secteur automobile des outre-mer présente des spécificités, nous devons saisir cette occasion pour aller plus loin, expérimenter, transformer, avec les soutiens financiers adéquats. S'agissant du surstockage, le Gouvernement ne changera pas sa vision du verdissement : le milliard d'investissement dont le Premier ministre précisera les conditions pour les collectivités sera vert et solidaire. Après le covid-19, plus rien ne sera comme avant. Certes, des difficultés se poseront chez certains. C'est pourquoi nous devons réfléchir à la façon d'accompagner ces acteurs.

Le choix des véhicules mis en circulation, qui nous engage pour cinq à dix ans, relève toutefois des territoires. Nous ne pouvons pas forcer les importateurs détenteurs de stocks à ce changement de paradigme qu'est la trajectoire outre-mer 5.0. Outre à l'urgence économique, la crise nous met face à la nécessité d'apporter une réponse dans le temps. Aussi, je vous propose d'examiner, ensemble, la meilleure façon d'accompagner les entreprises, en tenant compte des spécificités locales de La Réunion.

S'agissant des transports en commun, vous recevrez une réponse écrite dans les jours qui viennent.

Pour ce qui concerne Mayotte, après la fermeture rapide des liaisons aériennes, un pont aérien avec La Réunion, pris en charge par l'État, ainsi que des bateaux et des avions militaires ont apporté le soutien logistique nécessaire.

J'ai pris des engagements lorsque je me suis rendue à Mayotte, que je tiendrai. Tout d'abord, comme les Réunionnais présents à Mayotte, les Mahorais présents à La Réunion ont pu rejoindre leur territoire, sur les derniers vols du pont aérien. De même, les Mahorais bloqués à Dubaï ont pu rentrer par les Comores. Une fois de retour à Paris, j'ai recensé les 1 314 étudiants et 87 autres Mahorais qui, restés en métropole, souhaitaient rentrer dans leur territoire. Un avion sera affrété autour du 8 ou 9 juin – du moins avant le 15.

Le second engagement était de tester ces personnes à leur départ. Pour cela, j'ai besoin d'un texte, grâce auquel je pourrai monter l'opération, avant de rouvrir les vols commerciaux à destination de Mayotte.

L'eau est un enjeu majeur, pour tous les acteurs de nos territoires. La problématique du manque d'eau s'est croisée avec celle d'équipements vieillissants, peu entretenus et peu gérés, d'une sécheresse et de la nécessité de se laver les mains pour faire barrière au covid-19. Les situations varient d'un territoire à l'autre. L'eau est toutefois de la compétence des communes, des élus des territoires. L'État est à leurs côtés et y restera, mais il est un peu facile de lui renvoyer la question.

Dans 77 villages de Mayotte, 14 rampes d'eau ont été installées durant la crise, avec des cartes d'accès aux bornes-fontaines, en pleine saison sèche. Des travaux ont été engagés pour renforcer les capacités de production, avec des forages, des unités de dessalement, notamment pour augmenter la capacité de retenue d'eau. Tous les partenaires doivent travailler davantage ensemble, afin de traiter jusqu'au bout les projets relatifs aux structures, qui ne rendent pas les services visés.

De fortes tensions existent en Guadeloupe, depuis de nombreuses années. Le planning des tours d'eau, qui concerne plus de 100 000 habitants, n'est pas respecté. À la suite de manifestations, le préfet s'est substitué à certaines communes, pour installer d'autres points d'eau et réquisitionner les opérateurs concernés, afin d'établir un diagnostic et de réaliser des travaux d'urgence. Avec Emmanuelle Wargon, j'ai annoncé au préfet des moyens supplémentaires.

L'urgence est d'accélérer le retour à une situation moins dégradée, en particulier de fiabiliser le calendrier des tours d'eau, comme l'ont demandé l'ensemble des élus. Les différents échelons doivent travailler de manière consensuelle car, si l'État a pris largement sa place dans le règlement de ces difficultés en Guadeloupe, la mobilisation doit être générale.

A la Martinique, les coupures d'eau ont concerné près de 20 000 habitants, et duré jusqu'à six jours d'affilée. Les communes ont installé un système de citernes d'eau sanitaire et de distribution d'eau en bouteille, avec l'accompagnement des forces armées des Antilles. Le plan d'urgence opérationnel, signé entre l'État et les opérateurs, pour augmenter la production d'eau potable, notamment par une remise en service de points de forage, et pour garantir l'équité des tours d'eau a été renforcé, pour une efficacité et une transparence accrues du système de distribution.

Dans tous les territoires, nos populations demandent des comptes. Elles veulent sortir de la spirale où des communautés aux recettes insuffisantes investissent peu, ce qui conduit les administrés, mécontents, à ne pas payer, baissant encore les recettes.

Avec le Ségur de la santé, le Président de la République, le premier ministre ainsi que le ministre des solidarités et de la santé ont débuté un nouveau chantier, pour faire face à l'après-crise et répondre aux revendications du monde médical et hospitalier, que nous avons entendues. La santé est centrale pour nos territoires dont les hôpitaux présentent des difficultés budgétaires et des dettes. De premières réponses avaient été apportées. Outre les constructions d'hôpitaux qui sont en cours en Guadeloupe et à Mayotte, des rénovations sont programmées. Des crédits d'investissement sont prévus pour les directions des hôpitaux.

Le Ségur de la santé doit aussi avoir son volet ultramarin. Le ministre, très impliqué dans nos problématiques, m'a apporté son aide chaque fois qu'une difficulté était signalée. Attentif à l'expérimentation, il veille aussi au maintien de la quatorzaine. Je découvre pour ma part les dates des réunions que vous citez, mais dès que l'obligation de quatorzaine sera supprimée, le ministre se rendra dans un des territoires ultramarins. Je lui demanderai une rencontre particulière, pour les élus et les présidents de région et de département.

Quant au sentiment d'être écarté, le Premier ministre a annoncé sa volonté que les Français puissent se rendre dans les territoires ultramarins cet été. L'ouverture des territoires dépendra alors de leur volonté d'en prendre le risque, en garantissant la protection des ultramarins, notamment ceux utilisant leurs congés bonifiés, et des touristes.

Face au drame que vivent les entreprises du tourisme, des réponses sont apportées. J'ai aussi entendu vos demandes complémentaires et suis prête à accompagner l'ouverture des territoires, ce qui justifie une expérimentation. Nous devons avancer car le dispositif de quatorzaine limite le nombre de voyageurs. Pourtant, le premier frein est non pas de notre côté, mais dans les territoires, où tous les acteurs ont à construire une réponse.

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Plus de 300 étudiants s'ajoutent aux 627 Polynésiens en attente d'un retour, sans compter ceux « coincés » à l'étranger, notamment au Canada. Les trois vols du dispositif de continuité, prévu par l'État, pourront-ils être prolongés car ceux de juin ne suffiront pas ?

L'initiative « Outre-mer en commun », en partenariat avec l'AFD, consiste-t-il en un redéploiement ou des crédits nouveaux ? Il est essentiel de connaître l'effort supplémentaire réalisé, notamment en vue du printemps de l'évaluation, dont nous souhaiterions suivre les travaux en visioconférence.

L'aérien est primordial pour la Polynésie car, si le tourisme s'arrête, de nombreux secteurs cesseront leur activité. À cet égard, l'aide à Air Tahiti Nui comme à la compagnie locale, Air Tahiti, est capitale, notamment pour garantir la continuité intérieure de notre territoire. Nous vous demandons depuis plusieurs années de considérer l'exception que représente la Polynésie, seul territoire grand comme l'Europe, qui doit desservir 76 îles habitées.

Avec près de 1 300 emplois, 60 % de passagers résidents et une desserte de plus de 40 îles, Air Tahiti rend un réel service public. Quant à Air Tahiti Nui, malgré les efforts réalisés, les réponses apportées sont insuffisantes car la compagnie subira demain une distorsion de concurrence au profit d'Air France. Nous demandons au ministère des outre-mer de défendre nos compagnies régionales auprès de l'État, afin qu'elles soient aussi inscrites sur la liste des compagnies d'intérêt stratégiques, puisqu'elles font œuvre d'utilité publique en soutenant nos activités économiques, le fret et le lien avec nos territoires.

Il y a deux semaines, vous avez évoqué la création d'un groupe de travail sur le sujet avec chaque entreprise. Les compagnies indiquent que le travail n'est pas engagé, alors que chaque heure compte pour elles. Sans compagnie aérienne, il n'y a pas de touristes, donc pas de moyen de réactiver hôtels et prestataires d'activité.

Contrairement à d'autres, les compagnies du Pacifique sont locales : elles ont leur siège social dans nos territoires, elles y paient des impôts. Mais elles devront faire face à une distorsion de concurrence lorsque le flux touristique reviendra, puisque les autres compagnies auront bénéficié du chômage partiel et des aides exceptionnelles de l'État – Air France peut tout de même compter sur 7 milliards de prêts garantis.

Par ailleurs, la délégation a auditionné des représentants des médias audiovisuels, qui ont assuré l'information du public pendant la crise et garanti le pluralisme des expressions. Puisqu'ils maintenaient des activités, ils n'ont pas eu recours au chômage partiel. Il serait bon qu'une attention leur soit prêtée lors du prochain projet de loi de finances, pour prendre en compte la spécificité de leur métier.

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La délégation s'associe à cette interpellation pour l'audiovisuel ultramarin.

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La crise aura une incidence durable dans nos territoires sur le plan social et économique. De nombreuses personnes, notamment les professionnels de santé, se sont investies pour accompagner les publics isolés et fragiles. Outre les associations ultramarines qui ont développé des initiatives innovantes, le régiment du service militaire adapté a représenté un repère pour les populations et les acteurs sociaux. Auditionnée le 15 mai, Mme Voynet a ainsi souligné que l'agence régionale de santé de Mayotte a bénéficié de ce soutien, et mobilisé de nombreuses équipes, pour lesquelles des formations ont été dispensées.

Les initiatives vont dans le sens d'une nouvelle filière d'aide aux personnes âgées, ouverte aux participants du service militaire adapté, une des propositions du rapport d'information sur le grand âge dans les outre-mer, que j'ai rédigé avec Ericka Bareigts en février.

Comment comptez-vous intégrer ces différents volets dans le plan d'aide qui s'annonce ? D'autres types d'implication, notamment associatives, sont-ils envisagés ?

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Le rapport sur l'octroi de mer, paru en plein confinement, a donné aux parlementaires guadeloupéens le sentiment que le ministère de l'économie et des finances avait profité d'un moment de faiblesse pour ressortir ce serpent de mer, comme si nous étions incapables de comprendre l'économie. Pourtant, le Parlement est l'expression de la démocratie, dont nous sommes les représentants.

S'agissant du tourisme, compte tenu de la fragilité de nos îles et du nombre de cas importés, je vous demande de vous engager fortement. Le secteur touristique, en difficulté, rue dans les brancards. Nous devons connaître le protocole, même si l'appellation de passeport sanitaire n'est pas utilisée. L'obligation existe bien déjà, par exemple pour la vaccination au BCG lors d'un voyage en Guyane. Entre faire vivre le secteur touristique et préserver une population inquiète, certains disent que les touristes ne doivent pas venir. Nous n'en sommes pas là. Il faut trouver un juste milieu, par exemple avec des tests.

Le comportement d\'Air France, qui n'accomplit pas entièrement sa mission de service public, est préoccupant. Plusieurs familles de Martinique et de Guadeloupe se sont vu refuser le rapatriement d'un proche décédé dans l'hexagone, même si celui-ci n'était pas mort du covid-19. De plus, la compagnie dépasse les limites des vols hebdomadaires et double le nombre de passagers autorisés. Les autres compagnies risquent d'augmenter le coût des billets pour ne pas faire faillite lors de la réouverture du ciel.

Quant aux chiffres du chômage, l'INSEE donne l'impression de ne pas faire son travail dans nos territoires.

Les étudiants ultramarins au Canada, souvent boursiers, vivent parfois dans des conditions précaires. Une solution pourrait être trouvée grâce à la diplomatie, puisque cette question relève bien de la compétence de l'État, à défaut de celle de la ministre des outre-mer. Or les mesures de protection ont été négligées lors de certains rapatriements.

Nous avons le sentiment de n'être pas associés. Les respirateurs promis ne sont toujours pas arrivés, alors qu'ils pourraient être utilisés si une deuxième vague survient après l'ouverture du ciel.

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À Saint-Pierre-et-Miquelon, le Gouvernement a pris des mesures considérables, adaptées à nos spécificités, pour soutenir l'économie. Depuis le déconfinement, la consommation reprend dans les commerces. L'État et les collectivités ont travaillé ensemble pour relancer les activités. Le tourisme risque en revanche d'être touché par l'arrêt des dessertes maritimes avec Terre-Neuve, ainsi que par la réduction des dessertes aériennes. Les hôtels éprouvent beaucoup d'inquiétude du fait de l'annulation des touristes nord-américains, qui représentaient plus de 80 % des flux. Ne pouvant compter sur la consommation locale, ils mériteraient vraiment un accompagnement spécifique.

Enfin, je soutiens les propos de ma collègue concernant les médias privés. Ils ont joué un rôle essentiel durant la crise, remplissant presque une mission de service public.

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Annick Girardin, ministre

Les aides financières inédites – les plus généreuses en Europe – accordées par l'État sont applicables aux compagnies aériennes locales. Nous regardons de très près la situation d'Air Tahiti et d'Air Tahiti Nui. Nous avons tenu une première réunion avec M. Djebbari et les compagnies sur l'ouverture du ciel, la préparation de la saison estivale et les contraintes de sécurité dans les avions. J'espère organiser une deuxième rencontre cette semaine avec le ministre de l'économie pour répondre aux demandes des compagnies.

Je peux sensibiliser les élus, le monde économique, les populations à l'intérêt de la réouverture des territoires, tout en définissant des mesures de protection avec le ministre de la santé. Je souhaite que les entreprises, qui ont déjà bénéficié du report des charges sociales et fiscales et du moratoire sur certaines taxes aériennes, soient davantage accompagnées. Une équipe interministérielle élaborera des mesures allant au-delà des prêts de trésorerie garantis par l'État. Toutefois, les principales difficultés tiennent à la réouverture d'Orly et aux fortes réticences des territoires à rouvrir leurs frontières rapidement.

Je me préoccupe depuis de nombreux mois de la filière audiovisuelle, qui connaissait des difficultés avant l'épidémie. Elle n'a pu bénéficier du chômage partiel, car elle s'est trouvée en première ligne, sans quasiment percevoir aucune recette. Avec le ministère de la culture, nous avons proposé un plan, qui fait l'objet d'un arbitrage interministériel, prévoyant une réduction du coût du travail, la restauration de la trésorerie, une aide directe ponctuelle et un crédit d'impôt communication pour les annonceurs.

Nous avons commencé à rapatrier des Polynésiens grâce au pont aérien que nous avons mis en place, de manière exceptionnelle, quand le territoire a coupé ses relations avec le reste du monde – un second pont aérien reliant Mayotte à La Réunion. Nous avons financé des associations, mis en place des cellules d'accompagnement, des quatorzaines à Paris et des couloirs sanitaires, et testé les jeunes concernés. J'ajoute que tous les étudiants bénéficient de tarifs négociés sur les vols. Nous souhaitons pouvoir ramener à présent un plus grand nombre de Polynésiens.

L'initiative « Outre-mer en commun » est dotée de 1 milliard d'euros, dont 750 millions sont mobilisables rapidement. L'urgence sanitaire et économique, ainsi que la relance durable, bénéficieront d'un apport de 500 millions d'euros, tandis que des financements déjà octroyés seront décaissés en toute urgence, à hauteur de 250 millions d'euros. S'agissant de l'urgence sanitaire, nous avons engagé un plan national de désendettement des hôpitaux, auquel participe l'AFD, et sommes attentifs aux enjeux transfrontaliers que constituent le suivi épidémiologique et la coopération régionale.

Au titre de l'urgence économique, nous aidons les acteurs publics et privés à faire face aux conséquences immédiates de la crise. Les collectivités locales bénéficieront, en sus des annonces du premier ministre, d'une aide supplémentaire de 250 millions d'euros, de prêts de préfinancement et de prêts d'urgence d'aide à l'investissement. S'y ajoutent des prêts garantis par l'État pour les collectivités du Pacifique et le soutien aux entreprises les plus fragiles et au secteur informel, notamment grâce à un apport de 28 millions d'euros à l'association pour le droit à l'initiative économique (ADIE). Il faut aider les entreprises à rejoindre l'économie formelle par des aides à l'investissement et à la formation.

Par ailleurs, il convient de favoriser la relance inclusive et décarbonée pour accélérer la trajectoire 5.0, par l'assistance à la maîtrise d'ouvrage et la formation. Une étude de Carbone 4 sera réalisée dans tous les territoires.

Enfin, 500 000 euros seront affectés aux projets post-crise des associations.

Des étudiants ultramarins se trouvent dans le monde entier, qui doivent être traités équitablement. Le ministère des affaires étrangères n'a rapatrié aucun étudiant, hormis ceux qui se trouvaient dans des zones présentant un risque élevé. Il ne fera pas d'exception pour ceux qui sont bloqués au Canada. On peut toutefois travailler en bonne intelligence avec ce pays, le Québec, Air Canada pour qu'un vol soit proposé à tous les Ultramarins ayant un motif impérieux de rentrer aux Antilles et en Polynésie. Vous pouvez sensibiliser à ce sujet Air Canada, en Guadeloupe et en Martinique. Le cas échéant, je serai à vos côtés pour engager une action complémentaire.

Le rapport sur l'octroi de mer n'est qu'une simple analyse macroéconomique, à laquelle je n'ai pas participé. Il s'agit d'un rapport parmi tant d'autres, qui alimentera la réflexion ; mais le moment n'est pas venu.

Les chiffres de l'emploi publiés le 28 mai sont mauvais, mais moins que dans l'hexagone. Nous devons poursuivre l'application du plan Pétrel dans tous les territoires d'outre-mer pour lutter contre le chômage. Les enveloppes de contrats aidés n'ont pas été suffisamment consommées du fait de l'épidémie. L'État prend déjà en charge une part importante de certaines actions, comme la lutte contre la dengue ; nous réfléchirons à augmenter cette part pour les projets liés à la crise sanitaire.

Instaurer un passeport sanitaire, un protocole de test, ou imposer de voyager avec un carnet santé, comme cela se fait en Guyane pour la fièvre jaune : pourquoi pas ? Mais se posera alors la question de la durée de conservation des données.

Concernant le matériel, seuls les masques ont posé problème – la tension était mondiale – mais le retard a été comblé. Les lits en réanimation sont en nombre suffisant et des respirateurs ont été livrés, permettant un doublement des capacités dans les territoires ultramarins. J'ai veillé à ce que chaque territoire bénéficie des mêmes mesures qu'à l'échelle nationale : les chiffres le démontreront. Nous devons inspirer confiance à la population et aux touristes, en leur assurant qu'ils pourront être pris en charge en cas de contagion et que nous nous sommes équipés pour assumer des flux supplémentaires. Il faut également prévenir l'arrivée de nouveaux cas, en testant avant le départ, puis à nouveau sur place. Nous pourrons ainsi accueillir des touristes cet été, même si ce n'est pas à la hauteur des attentes. En outre, les aides de l'État continueront jusqu'à la fin de l'année pour les entreprises liées aux activités touristiques.

Le fret aérien se fait principalement dans les soutes d'avions transportant des passagers, ces derniers assurant l'équilibre budgétaire de la compagnie. Nous avions fixé avec les compagnies les prix du fret réservé en priorité au sanitaire et à l'alimentaire périssable. D'autres vols étaient assurés par cargo, avec des tarifs beaucoup plus élevés puisque les compagnies ne transportaient pas de passagers. Mais le surcoût lié au transport a eu moins d'effet que l'augmentation des prix des marchandises elles-mêmes, qui est un phénomène mondial. Nous devons veiller à ce que personne ne profite de cette crise pour s'engraisser, mais il n'y a pas eu de dérapage : il n'est donc pas nécessaire de demander aux préfets de contrôler les prix.

À Saint-Pierre-et-Miquelon, il n'y a qu'un vol de quarante-cinq passagers tous les quinze jours, et aucune amélioration n'est prévue avant la mi-juin. Les relations maritimes avec le Canada ne sont pas possibles puisque celui-ci a fermé ses frontières. Une douzaine de vols directs de Paris à Saint-Pierre-et-Miquelon sont opérés en été par la société Air Saint-Pierre, mais ils concernent davantage un tourisme affinitaire, qui va peu à l'hôtel. Le fonds de solidarité sera ouvert aux hôteliers jusqu'à la fin 2020 ; cela peut aller jusqu'à 10 000 euros par mois. J'ai demandé de la souplesse dans la négociation avec les régions qui cofinancent ce fonds de solidarité. Les entreprises touristiques pourront recourir à l'activité partielle jusqu'à la fin du mois de septembre 2020.

Pour les entreprises qui ne pourraient pas reprendre leur activité, 1,3 milliard d'euros seront mis à leur disposition pour investir. Certaines taxes ont été allégées mais Saint-Pierre-et-Miquelon n'est pas concernée. L'exonération des cotisations sociales en cas de fermeture ou de faible activité, applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon, est prévue jusqu'au mois de juin, dans un premier temps ; le montant total est de 2,2 milliards d'euros pour l'ensemble du territoire national. Sur le volet fiscal, je ne peux pas apporter de réponse au secteur touristique puisque Saint-Pierre-et-Miquelon a sa propre fiscalité en la matière.

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Merci beaucoup, madame la ministre, pour vos réponses détaillées et exhaustives aux nombreuses questions des députés de la délégation.

La réunion s'est achevée à 20 heures.

Membres présents ou excusés

Présents. – Mme Ramlati Ali, Mme Stéphanie Atger, Mme Nathalie Bassire, Mme Justine Benin, M. Stéphane Claireaux, Mme Claire Guion-Firmin, M. Rodrigue Kokouendo, M. David Lorion, M. Max Mathiasin, M. Jean-Philippe Nilor, Mme Maud Petit, M. Alain Ramadier, M. Pierre‑Alain Raphan, Mme Maina Sage, M. Olivier Serva, M. Gabriel Serville.

Excusés. – M. Raphaël Gérard, M. Philippe Gosselin.