Intervention de Delphine Batho

Réunion du mardi 22 septembre 2020 à 17h35
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDelphine Batho :

Ce qui m'a choquée en lisant les documents de la filière et ceux de l'ITB, c'est que les solutions recherchées consistent à trouver quelque chose d'aussi efficace que les néonicotinoïdes. Je le dis tout de suite : il n'y en a pas, parce que ce sont les insecticides les plus puissants jamais inventés par l'espèce humaine et qu'ils sont 7 000, 10 000 fois plus toxiques que le DDT qu'on a interdit il y a cinquante ans. C'est donc une fausse perspective. Notre propos, monsieur le ministre, n'est absolument pas de remplacer les néonicotinoïdes interdits par une autre molécule chimique, mais de procéder comme les agriculteurs en agriculture biologique qui, contrairement à ce que vous avez dit, ont été moins touchés que la filière conventionnelle. La solution réside dans un changement du modèle agronomique et non dans une autre molécule.

On nous dit qu'on ne mettra pas de culture mellifère sur les surfaces concernées pendant deux ans. Or comment faire avec une rémanence de substances de vingt ans, voire près de trente ans pour le thiaméthoxame ? Hier, les scientifiques du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) de Chizé, dans les Deux-Sèvres, ont indiqué qu'on trouvait de l'imidaclopride sur des parcelles cultivées en agriculture biologique, là où il n'y a pas eu de néonicotinoïdes depuis des années et des années. Le problème de ce produit, outre sa toxicité à très faible dose, c'est, comme l'a très bien dit Mme Delphine Bagarry, sa rémanence dans l'environnement. Donc deux ans, ça ne suffira pas.

On nous dit encore qu'on doit s'aligner sur les autres, sur les pays qui seraient les plus en retard en Europe ou les plus rétrogrades dans le monde. Mais ce n'est pas possible car c'est une voie sans issue. Sinon, c'est M. Donald Trump qui a raison sur le climat, c'est M. Jair Bolsonaro qui a raison sur l'Amazonie. Si c'est la Pologne qui a raison sur les néonicotinoïdes, pourquoi avoir voté une loi française, pourquoi s'être battus en 2018 pour interdire des substances au niveau européen, et pourquoi se battre aujourd'hui pour un nouveau protocole d'homologation des produits chimiques tenant compte des risques chroniques sur les pollinisateurs ? À ce moment-là, il faut baisser les bras, il faut faire comme les autres. Je crois, moi, qu'il faut être cohérent : quand on interdit quelque chose en France, on doit mener le combat pour que la même interdiction s'applique dans l'ensemble de l'Europe. Et c'est ce qu'on fait : on mène le combat contre le Mercosur et contre le CETA qui créent aussi des concurrences déloyales pour la filière économique.

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