Intervention de Delphine Batho

Réunion du mardi 22 septembre 2020 à 17h35
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDelphine Batho :

Monsieur le ministre, je connais par cœur tous ces éléments. Je veux bien croire que ce sont vos services qui vous ont expliqué cela, mais ce raisonnement est totalement faux, et je vais essayer de vous expliquer pourquoi.

La loi de 2016 n'a jamais interdit les néonicotinoïdes, mais l'utilisation des produits à base de néonicotinoïdes. En cela, elle est totalement conforme au règlement européen sur la répartition des compétences entre l'autorisation des substances, qui relève du niveau européen, et l'autorisation des produits, qui relève de l'État membre. Par conséquent, c'est le décret, pas la loi, qui a créé la brèche que vous évoquez, c'est-à-dire le contentieux avec les firmes de l'agrochimie. Ce décret n'aurait jamais dû exister, il n'avait pas lieu d'être.

À l'origine, il servait à sortir d'une des étapes du long combat, que je vous raconterai si vous le souhaitez, qui a été mené pendant trente ans par les apiculteurs. À l'époque, il y a eu des subterfuges et des entourloupes juridiques. Avec ce projet de loi, on assiste à une nouvelle entourloupe puisqu'il s'agit d'autoriser l'acétamipride en France – actuellement autorisé en Europe, il est interdit en France. Au mois de décembre prochain, un nouveau décret paraîtra qui modifiera l'actuel décret fixant la liste des produits interdits. Sur ce nouveau décret, on trouvera l'imidaclopride – ce produit est interdit en Europe, mais on fera une dérogation –, le thiaméthoxame – lui aussi est interdit en Europe, mais on fera une dérogation –, la clothianidine et le thiaclopride, mais pas l'acétamipride. Ainsi, cet insecticide sera autorisé en France. C'est exactement ce que le législateur de 2016, qui comptait dans ses rangs MM. Christophe Castaner et Richard Ferrand, souhaitait éviter. Ce que nous visons, c'est l'interdiction, non pas de telle ou telle molécule, mais le principe d'un insecticide systémique persistant, extrêmement toxique, et son mécanisme d'action, notamment sur les insectes, les vers de terre, les oiseaux, etc. Tel est l'objet de l'amendement que nous défendons.

Mes chers collègues, en 2016, on s'est émancipé des consignes des groupes et du Gouvernement. Si les collègues de la majorité de l'époque ne l'avaient pas fait, jamais les néonicotinoïdes n'auraient été interdits en France – je rappelle qu'au départ le gouvernement de l'époque était contre l'interdiction. Regardez bien ce que le Gouvernement vous demande de voter : il s'agit d'autoriser de nouvelles substances néonicotinoïdes en France. Et je précise que l'on n'est plus dans un débat « limité » à la filière betteravière.

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