En préambule, je tiens à vous remercier, Monsieur le ministre, pour votre efficacité et votre réactivité concernant la résolution rapide de la situation de crise dans les transports liée au Brexit que nous avons connue en fin d'année 2020. En effet, nous nous souvenons encore trop bien des milliers de routiers bloqués aux portes de l'Europe à la veille des fêtes de fin d'année.
Depuis le 1er janvier 2021, le Brexit a définitivement été acté et négocié, non sans douleur. Néanmoins, l'histoire si particulière entre le Royaume-Uni et l'Europe n'est pas tout à fait close. Je parlerai ici de la situation inédite que connaît la compagnie Eurostar, que vous avez déjà évoquée. Disons-le sans équivoque : la situation est grave. Depuis mars 2020, Eurostar a vu son trafic chuter de 85 %, n'assure plus qu'un aller-retour par jour entre Londres et Paris et ses rares trajets sont vides à près de 80 %. La compagnie transmanche a d'ailleurs alerté, le 18 janvier, sur un risque de cessation de paiement à la fin du premier semestre 2021. Selon son directeur général, M. Jacques Damas, l'entreprise a perdu 82 % de son chiffre d'affaires en 2020.
Il est donc urgent d'agir pour éviter la disparition de cette liaison rapide, et ce à de nombreux égards. D'abord, d'un point de vue économique et social, la perte d'Eurostar emporterait des conséquences dramatiques sur l'emploi et les entreprises sous-traitantes locales. Au plan écologique, un report modal de ce mode de transport décarboné vers l'avion serait inévitable, entraînant alors une hausse des émissions de gaz à effet de serre, alors même que nous ambitionnons, via le projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, de réduire celles-ci.
Le Gouvernement s'est engagé, par la voix du ministre de l'économie, des finances et de la relance, M. Bruno Lemaire, à soutenir la compagnie ferroviaire. De son côté, le Royaume-Uni semble envisager d'accorder des prêts à la compagnie. Ainsi, au regard de l'importance stratégique de cette liaison européenne, pouvez-vous nous en dire davantage quant au soutien de la France en faveur du maintien de l'Eurostar ?
Une autre interrogation concerne le duty free au terminal de la liaison fixe transmanche, sujet que vous avez d'ailleurs évoqué. À cet égard, j'ai présenté un rapport en commission des affaires européennes, avec M. Pierre-Henri Dumont, dans lequel nous alertions le Gouvernement sur de possibles distorsions de concurrence entre la France et le Royaume-Uni, mais aussi entre les différents modes de transport sur notre territoire. En effet, les liaisons en ferry disposent d'ores et déjà de cette possibilité, de cet avantage concurrentiel finalement, tandis que les boutiques duty free fleurissent déjà au terminal anglais du tunnel. Dans ces conditions, il paraît nécessaire de travailler à une nouvelle interprétation du droit européen afin d'harmoniser le régime fiscal applicable notamment aux zones sous douane des liaisons ferroviaires internationales directes. Je souhaiterais donc connaître votre position sur le sujet. Vous paraît-il pertinent de permettre à la liaison fixe transmanche d'ouvrir des comptoirs de vente hors taxe dans les mêmes conditions que ses concurrents portuaires ?