Intervention de Damien Pichereau

Réunion du mardi 22 juin 2021 à 21h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDamien Pichereau, rapporteur :

Dans notre travail de législateur, nous voyons chaque jour combien le droit européen est présent et important. Ce projet de loi nous donne l'occasion de rappeler ce qui peut paraître une évidence : les deux systèmes juridiques sont étroitement imbriqués. C'est probablement le dernier texte d'adaptation que nous adopterons avant que la France prenne, le 1er janvier 2022, la présidence du Conseil de l'Union européenne – un rôle primordial qui nous permettra d'inscrire de nombreux sujets à l'agenda européen.

Au-delà de la préparation de cette échéance politique, le Gouvernement et le législateur doivent sans cesse veiller à adapter le droit national aux actes législatifs et d'exécution de l'Union européenne. Ce texte, assez technique, vise à transposer ou à achever la transposition de douze directives, à mettre le droit interne en conformité avec quinze règlements européens et à procéder aux modifications nécessaires. Il est en grande partie consacré à la réglementation des transports, tant aérien que terrestre et maritime.

En modifiant les règles d'accès à la profession et en traitant la question du détachement des travailleurs dans le transport terrestre, autrement dit le cabotage, ce projet de loi permet de finaliser la transposition du « paquet Mobilité I ». J'ai eu la chance d'y participer comme rapporteur de la proposition de résolution adoptée à la quasi-unanimité des députés en 2018. Je m'inscris aujourd'hui dans la continuité de ce travail et défends les ambitions qui sont toujours les nôtres.

Transport international par excellence, l'aviation civile est un sujet technique largement organisé et réglementé par le droit européen. Celui-ci évolue en permanence pour harmoniser les règles, garantir une sécurité maximale et renforcer les droits des passagers. La sûreté et la sécurité sont à l'origine de plusieurs articles qui adaptent le code des transports aux nouvelles dispositions des règlements européens et suppriment des références obsolètes. Des préoccupations nouvelles émergent : des dispositions visent à prévenir et à condamner les comportements de passagers indisciplinés ainsi que les intrusions sur les pistes, préjudiciables à la sûreté et à la sécurité – l'actualité récente nous en a fourni des exemples.

L'article 6 suscitera sans doute des débats puisqu'il traite de la régulation des redevances aéroportuaires, donc des rapports entre compagnies aériennes et gestionnaires d'aéroports. Modifié par les sénateurs, il renforce les pouvoirs et les compétences de l'Autorité de régulation des transports (ART) pour lui donner les moyens d'évaluer, en toute indépendance, la pertinence du montant des redevances. Il me paraît souhaitable de rapprocher les compétences de l'ART dans le secteur aérien de celles qui sont les siennes dans les autres secteurs.

Le chapitre II concerne les transports terrestre et maritime. Les articles 13 à 15 procèdent à la transposition de la directive du 19 mars 2020 concernant l'interopérabilité des systèmes de télépéage routier. Ces évolutions concernent notamment les obligations qui pèsent sur les prestataires du service européen de télépéage, les percepteurs de péage et la transmission d'informations entre États membres pour lutter contre la fraude.

L'article 16 actualise le régime de sanction en cas de violation par les navires de la réglementation relative à la teneur maximale en soufre des combustibles marins et clarifie le régime dérogatoire applicable aux navires prenant des mesures pour réduire leurs émissions. Il vise à inciter le secteur du transport maritime à consommer de façon plus propre et durable.

Plusieurs mesures concernent les employés et les usagers. S'agissant du niveau minimal requis pour délivrer une qualification, les obligations pesant sur les organismes de formation professionnelle maritime sont mises en conformité avec le droit européen. Il est aussi proposé d'adapter notre droit à la réalité du travail en mer et de le conformer, pour ce qui est du travail de nuit des marins de moins de 18 ans, au contenu des directives européennes. Enfin, pour limiter les effets de la crise sur le niveau des retraites, les périodes d'activité partielle seront intégrées dans le calcul des droits à pension des marins.

D'autres dispositions permettent de sécuriser, dans le cadre du Brexit, la possibilité pour les ferries transmanche battant pavillon français d'exploiter exclusivement des appareils de jeu de type « machine à sous ». Il est également prévu de renforcer la capacité d'intervention de l'autorité de surveillance des équipements marins sur les matériels présentant un risque ou un danger pour le consommateur.

Les articles 22 et 23 transposent les dispositions du « paquet Mobilité I », importantes pour les droits des salariés du secteur du transport routier. Notre objectif est clair : traduire en droit national les avancées des textes européens afin de garantir aux conducteurs des conditions de travail qui respectent les impératifs de sécurité et de santé, et d'éviter les distorsions de concurrence. Ces articles, rien moins qu'anodins, révèlent une Europe sociale qui protège ses travailleurs en leur conférant un statut unique et harmonisé.

L'article 24 permet de pérenniser les installations douanières mises en place dans la perspective du Brexit et du rétablissement des contrôles aux frontières.

Le chapitre II bis est principalement consacré à la prévention des risques. Les articles 25 à 27, qui actualisent le droit national en garantissant le respect des régimes de sanction prévus par les règlements européens relatifs au mercure, aux fluides frigorigènes et aux polluants organiques persistants (POP), sont en adéquation totale avec le projet de loi « climat et résilience ». Ces dispositions nous apporteront un appui précieux lorsque nous valoriserons, dans le cadre de la présidence française, une Europe plus durable.

L'article 28, au chapitre III, vise à adapter le droit national au règlement 2017/821 sur les minerais de conflit, dont l'importation a pu financer pendant longtemps des conflits armés et ignorer ainsi de graves violations des droits de l'homme. Ces dispositions mettent en œuvre des procédures de contrôle du respect par les importateurs du devoir de diligence à l'égard de la chaîne d'approvisionnement.

Le chapitre IV comporte des dispositions relatives à la protection et à l'information environnementales. Les articles 31 et 32 proposent des modifications permettant de nous conformer au contenu et aux objectifs des directives afin d'éviter de nouvelles procédures de mise en demeure. Le premier est relatif aux dispositifs permettant de mesurer et de contrôler les captures accidentelles d'espèces protégées – la France ne les met en œuvre aujourd'hui que pour certaines espèces. Le second modifie la définition de ce qu'est une information environnementale.

Je partage la grande majorité des modifications apportées par le Sénat et défendrai un certain nombre d'amendements pour approfondir et poursuivre cet utile travail de coconstruction.

Ce texte illustre une ambition européenne qu'avec le Président de la République et le Gouvernement nous avons toujours mise en avant. Il ne s'agit pas de réaliser la transposition de dispositions sorties de tiroirs obscurs mais bien de défendre une vision, celle d'une Europe écologique, sociale et protectrice.

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