Intervention de Philippe Bolo

Réunion du mardi 25 janvier 2022 à 17h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Bolo :

Personne ici ne conteste les conséquences sur la biodiversité et la santé humaine de la pollution plastique. Nous connaissons tous votre engagement dans la lutte contre celle-ci, et le débat est utile. Chacun d'entre nous peut vérifier, dans son territoire, que ce sujet mobilise l'attention de nombreux citoyens.

Toutefois, les membres du groupe MoDem et Démocrates apparentés estiment que la proposition de loi manque sa cible.

L'article 1er vise à interdire, à partir de 2030, les plastiques issus du pétrole. Du point de vue chimique, il s'agit en réalité de substituer aux atomes de carbone des polymères issus du pétrole des atomes de carbone d'une autre origine. À nos yeux, une telle substitution ne permettra pas de résoudre le problème de la pollution plastique. Premièrement, elle place tous les plastiques au même niveau, sans distinguer ceux qui contribuent plus fortement à la pollution, notamment des océans. Deuxièmement, elle escamote le sujet des fuites de plastique. L'usage de polymères dont le carbone est issu des végétaux et non du pétrole n'empêchera pas les pertes des granulés de matière vierge dans les océans ou sur les continents.

La substitution proposée ne résoudra pas le problème des microplastiques ajoutés intentionnellement dans certains produits cosmétiques. Elle ne neutralisera pas l'usure de certains objets en plastique, tels que nos vêtements fabriqués hors de France qui perdent, lors des lavages en machine, des microparticules que l'on retrouve dans les stations d'épuration, les sols et les eaux superficielles. Cette substitution ne résout pas le problème des déchets.

Par ailleurs, il manque au texte une étude d'impact permettant de déterminer, en cas de remplacement des atomes de carbone des polymères issus du pétrole par des atomes de carbone issus de la biomasse, la quantité de biomasse qu'il faudrait produire pour obtenir la même quantité de polymères. Ne faut-il pas s'attendre à des effets de concurrence et à des effets de bord ?

S'agissant de l'article 4, le sujet des emballages doit impérativement être pris en considération dans le cadre de la lutte contre la pollution plastique, en raison des problèmes soulevés par leur usage unique, leur durée de vie courte, la gestion de leur fin de vie et les risques de fuite. Toutefois, est-il nécessaire de passer par la loi pour organiser la concertation sous la forme d'états généraux ? La Commission nationale du débat public (CNDP) pourrait s'en saisir.

La création d'une Agence nationale du plastique comblerait un vide, selon l'exposé des motifs. Or vous avez rappelé que l'ADEME travaille sur le sujet ; il suffirait de renforcer les effectifs, certes réduits, qui s'y consacrent. La France dispose aussi d'institutions compétentes, notamment les éco-organismes et les instituts de recherche sur les polymères et les composites. Chacun agit dans son domaine de connaissance, de recherche et d'expertise, au profit des particuliers, des entreprises ou des pouvoirs publics. Tous ces gens pourraient se réunir, dans une perspective d'écoconception, pour déterminer le meilleur plastique qu'il est possible de produire pour éviter qu'il ne se retrouve dans la nature.

Le groupe MoDem et Démocrates apparentés votera contre la proposition de loi, tout en réaffirmant la nécessité de lutter contre la pollution plastique, notamment à l'échelle internationale, en concrétisant la résolution relative à l'engagement de la France pour le renforcement d'une action internationale de lutte contre la pollution plastique, que nous avons adoptée à l'unanimité le 29 novembre dernier.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.