Le Fonds européen de la défense fait partie des nouvelles prérogatives de la Commission. C'est l'une des directions générales dont je suis chargé, mais le sujet m'avait mobilisé avant même que je devienne commissaire. Ce fonds, qui permettra de mutualiser des investissements clés dans des technologies duales et spatiales, représente un pas important vers une plus grande autonomie de défense pour l'Europe. Il importe que chacun se sente concerné par un sujet qui, je le crains, sera de plus en plus prégnant dans les années à venir et pour notre avenir commun dans le cadre de nos alliances. Alors que l'OTAN va réduire son budget, il faudra que nous prenions davantage en charge notre défense. La présidence finlandaise avait ramené le fonds à 7 milliards d'euros. Il est proposé de le porter à 9 milliards. J'espère que la proposition du Parlement européen sera plus élevée, peut-être autour de 13 milliards.
Le plan de relance pourra également intervenir directement en augmentation de capital dans les industries de défense. Nous avons veillé à ce que les industries de défense, qui font partie d'un des 14 écosystèmes, bénéficient des autres budgets, le fonds de défense intervenant en plus.
Qu'ont fait les autres États européens ? Comparaison n'est pas toujours raison. L'information en amont est capitale. Les pays les mieux informés ont réagi le plus vite. J'ai regretté publiquement que nous n'ayons pas été bien informés de la situation en Chine. La Commission était d'ailleurs favorable à la création d'une mission à ce sujet. La Commission avait proposé des modélisations à partir des pandémies précédentes. Personne n'avait prévu que l'Italie serait profondément touchée ; en France, on n'a pas vu arriver le foyer de contagion dans l'Est. La modélisation montrant que l'Allemagne allait devenir le troisième pays touché, nous avons prévenu nos amis allemands qui ont réagi très vite. Il serait donc hasardeux de comparer ce qui s'est passé chez les uns et chez les autres. Certains pays informés avant d'être frappés en ont tiré bénéfice. Ceux qui ont moqué l'importance du virus paient aujourd'hui le plus lourd tribut, et je ne pense pas uniquement au Brésil. Une fois l'épidémie installée, la solution était le confinement.
Le respect de l'État de droit est toujours pris en considération par la Commission, y compris dans le cadre du Semestre européen. C'est pourquoi il est bon de mobiliser ces sommes dans le cadre de programmes existants qui intègrent cette dimension.
Nous souhaitons créer un fonds de 10 milliards d'euros pour accompagner le développement de médicaments. Cette proposition forte vise à constituer des stocks stratégiques et à participer au développement de médicaments.
Je ne cesse de dire que je ne suis pas favorable à une taxe multinationale. Les États reversent les droits de douane à la Commission européenne pour alimenter son budget. Dans le nouvel espace où les plateformes jouent désormais un grand rôle économique et social, il est pertinent d'envisager un juste retour à la contribution collective. Je suis favorable à ce qu'une solution soit trouvée dans le cadre de l'OCDE. À défaut, la Commission fera une proposition afin que chacun se voie immédiatement attribuer des ressources au moyen d'une taxation à l'échelle du continent. La crise a montré que c'était le périmètre pertinent pour être plus fort.
L'écosystème agricole est essentiel pour l'autonomie de notre continent. En tant que commissaire chargé du marché intérieur, je dois veiller à ce que les normes soient acceptées et à ce que le marché fonctionne bien. Nous accroîtrons donc les contrôles aux frontières.
Avant d'inventer de nouvelles règles, il faut améliorer ce qui pourrait fonctionner dans le cadre existant. J'interviens régulièrement pour des infractions sur le marché intérieur concernant des entreprises et, plus souvent, des États. Le DSA nous permettra d'agir de façon pragmatique envers les plateformes. Je souhaite utiliser davantage ma capacité à agir en cas d'infractions pour améliorer le fonctionnement du marché intérieur, notamment pour les PME. En outre, certaines plateformes sont des interfaces privilégiées pour des PME. Nous veillerons à ce que l'application des règles de concurrence permette à notre tissu de PME d'en bénéficier.
Concernant le respect de l'engagement environnemental, des États membres conditionnent l'octroi des primes à l'achat de véhicules propres. Dans l'Union, des millions de véhicules attendent des acheteurs. Certes, ils ne sont pas électriques. Conçus cependant selon de nouvelles normes environnementales, ils accéléreront l'atteinte des objectifs pour 2030 et de 2050 qui prévoit zéro rejet de CO2. Il faut combiner cela avec le développement des véhicules verts, hybrides et à l'hydrogène
Oui, les 250 milliards d'euros de prêts s'ajoutent aux 500 milliards de subventions. Nous entrons en discussion avec les États membres, non seulement au sujet de l'enveloppe mais sur la répartition entre le montant des subventions directes et celui des prêts. Il appartient au président du Conseil européen de mener ces discussions, mais mes contacts avec les écosystèmes et des chefs d'État et de Gouvernement laissent apparaître que le positionnement sera très différent de celui adopté à l'égard de la Grèce lors de la crise de 2008-2009. Il ne s'agira pas de mobiliser le contribuable néerlandais, danois, suédois ou autrichien, ou d'opérer des transferts.
La Présidente de la Commission a souhaité à maintes reprises une révision du droit de la concurrence, qui date de plusieurs décennies. Nous sommes contre la constitution de monopoles et de rentes. La concurrence stimule l'innovation mais elle doit être revisitée à l'aune du poids des écosytèmes, de ce que nous sommes devenus et de ce que nous voulons être dans le triptyque Chine-Europe-Amérique.
Un plan Marshall pour le secteur touristique, particulièrement touché, doit être décliné par chaque État membre. Il faut intervenir rapidement sous forme de subvention, comme le propose le plan français. Au mois de septembre, nous réunirons tous les acteurs européens pour réfléchir au tourisme de demain, plus vert, moins de masse, où sera pris en compte le rôle de la culture et des plateformes.