Intervention de Yves Veyrier

Réunion du mercredi 3 juin 2020 à 9h30
Commission des affaires économiques

Yves Veyrier, secrétaire général de Force ouvrière :

Sur le télétravail, nous n'avons pas d'approche négative. Nous distinguons la mise en condition de télétravail soudaine, non encadrée, avec ce que devrait être un télétravail régulé. Nous sommes d'autant moins négatifs que FO avait signé avec l'ensemble des confédérations syndicales et patronales une délibération en 2017 sur le télétravail. À la suite de celle-ci, nous appelions de nos vœux l'ouverture d'une négociation en vue de la signature d'un accord-cadre. Les employeurs ont mis du temps à répondre favorablement à notre proposition de négociation, mais les choses ont évolué. Une première réunion sera consacrée au diagnostic de la situation créée, tant du point de vue des aspects positifs que négatifs.

Le télétravail permet notamment d'éviter de trop longues journées liées aux transports en commun, et cet intérêt concerne aussi bien les salariés que l'écologie. Néanmoins, il importe que le télétravail s'associe au collectif de l'entreprise, et ne crée ni tensions, ni discriminations. Nous sommes très dubitatifs sur une forme de généralisation du télétravail, qui conduirait à une forme d'ubérisation du salariat.

Je me suis exprimé à maintes reprises sur le contexte de reprise de l'activité, qu'il est dommageable de ne pas avoir pu coordonner entre États membres de l'Union européenne. Nous craignons qu'une reprise en ordre dispersé ne conduise une nouvelle fois à une course à la compétitivité.

FO est toujours présente dans les entreprises privées, et pas uniquement dans la fonction publique. Nous avons aujourd'hui une représentation équilibrée entre secteur public et secteur privé. Néanmoins, le tissu de l'entreprise s'est beaucoup parcellisé en raison des phénomènes d'externalisation et de sous-traitance.

Il serait satisfaisant que l'initiative du plan de relance conduise l'ensemble des pays européens à s'estimer solidaires sur le plan budgétaire, mais à la condition que cette solidarité ne se traduise pas par un retour à l'austérité et aux mécanismes de restructurations massives. Nous avons d'ailleurs insisté sur l'importance de refinancer les politiques publiques, notamment de santé, après la crise sanitaire.

Sur la transition écologique, FO est présente depuis longtemps dans ce débat. Nous avons milité avec la Confédération syndicale internationale pour faire valoir la situation sociale dans le contexte des politiques d'adaptation au changement climatique. De plus, la conférence FO environnement et climat a pour objectif, en invitant des intervenants extérieurs, d'entamer des réflexions et d'obtenir des réponses à des questions restées en suspens.

En ce qui concerne le coût économique de la crise et a contrario les éventuelles hausses de prélèvements obligatoires, je rappelle la position constante de FO. Le ministre chargé des comptes publics évaluait le niveau des aides publiques aux entreprises à 140 milliards d'euros annuels sous forme de crédits d'impôt ou d'allègements de cotisations sociales. Or jusqu'à présent, aucune évaluation n'a fait la démonstration que ces aides publiques aient été efficaces pour favoriser l'emploi, conformément à leur objectif initial. En tout état de cause, le niveau des prélèvements obligatoires est à peine supérieur à celui des aides publiques aux entreprises. De plus, ces aides devraient être soumises à conditions et sanctionnées quand elles n'ont pas été respectées, en particulier du point de vue de l'emploi.

Les accords de performance collective, d'un point de vue local, sont difficiles à commenter. Chez Derichebourg, la négociation s'est ouverte hier et je n'ai pas l'information selon laquelle le treizième mois serait en jeu. Dans le secteur aérien et aéronautique, le plan de relance est attendu au premier chef car les inquiétudes à moyen terme pour l'emploi sont fortes. Le plus mauvais signal serait celui de la modération des salaires car les engagements ne sont pas toujours tenus, loin s'en faut, du point de vue des entreprises. De plus, la responsabilité des donneurs d'ordre sur l'ensemble de la chaîne de valeurs et des actionnaires ne doit pas être négligée. Nous portons d'ailleurs cette question à la fois au niveau national et international. Chez Ryanair, le syndicat FO, qui est majoritaire parmi les personnels navigants et commerciaux, n'a pas obtenu la réunion d'un CSE extraordinaire qui lui aurait permis de diligenter une expertise sur la situation économique et financière de l'entreprise.

Sur les contreparties sociales aux aides de l'État, l'important est d'évaluer et de contrôler, éventuellement de sanctionner lorsque les conditions ne sont pas respectées.

Je ne crois pas aux grands-messes, et mon avis n'est pas différent pour l'organisation d'une conférence de transformation sociale et écologique. FO est très attachée à la République, la séparation des pouvoirs et la démocratie représentative. Les institutions, dont fait également partie le Conseil économique, social et environnemental (CESE), sont suffisamment nombreuses.

Nous avons adressé une série de propositions à la ministre du travail sur la situation actuelle des jeunes et sur les difficultés de l'apprentissage, en situation de crise. Nous avons cru comprendre que des réponses pourraient être apportées demain, dans le cadre de la réunion avec le Président de la République. Il faut également être en capacité de financer la formation, qui doit permettre de déboucher sur un emploi de qualité et pérenne.

Enfin, s'agissant de l'activité partielle et de la contrepartie en matière de formation, il pourrait effectivement s'agir d'une piste de réflexion.

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