Je souscris à ce qui vient d'être dit. Je vous rappelle que notre pays avait l'un des réseaux les plus denses au monde d'entrepôts logistiques, grâce à la force de notre grande distribution – les géants de la grande distribution française se sont d'ailleurs implantés sur tous les continents. Or un acteur est parvenu, en dix ans seulement, à les supplanter sur le e -commerce. Pourquoi nos acteurs commerciaux n'ont-ils pas réalisé cette transition numérique plus rapidement ? Pourquoi ne se sont-ils pas lancés plus tôt dans la livraison ? Pourquoi ont-ils tardé à créer des sites internet à l'ergonomie plus attractive ? Le problème, c'est que dans les administrations comme dans les grandes entreprises françaises, les gouvernances n'ont pas pris conscience suffisamment tôt de l'importance de ce virage numérique. Cela fait seulement cinq ans qu'elles s'y sont mises sérieusement et qu'elles investissent. Dans l'hôtellerie, on a eu exactement le même problème avec l'entreprise Booking, qui a réussi à prendre le leadership dans un secteur qui était, a priori, à l'abri des délocalisations.
En tant que politiques, nous devons protéger la France, mais aussi l'Europe, face à cette concurrence déloyale. Je vous rappelle que nous parlons d'entreprises qui ne paient pas d'impôt sur les sociétés et qui sont fondées sur un modèle d'optimisation fiscale agressive. Le moratoire permettrait de créer un petit espace, tout comme la fiscalité qu'il est question d'introduire à l'article 4 : elle ne serait pas très élevée, bien loin de ce qui est envisagé à l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) depuis 2012. Mme Delphine Batho et moi-même sommes lessivées d'attendre que des décisions soient prises sur ces questions. Face à un acteur aussi puissant, comme face à Google, il faut absolument fixer des limites, sinon les choses vont très mal se passer pour tous nos acteurs économiques.