Si je félicite Mme Barbara Bessot Ballot pour son engagement en faveur de l'ESS, je voudrais exprimer un léger désappointement, non sur le fond, mais quant à la forme : du fait de la ventilation des crédits destinés à l'ESS entre différentes thématiques, on finit par s'y perdre. Je salue néanmoins, dans ce maquis budgétaire, les innovations signalées, notamment concernant les coopératives d'activité et d'emplois.
Je voudrais vous faire part de deux préoccupations.
D'abord, il est nécessaire d'apporter un soutien au secteur associatif, qui est aujourd'hui l'une des sentinelles de la cohésion sociale, voire de la République. Partout où il y a besoin de renforcer le lien social, de tendre la main aux plus précaires ou à ceux qui perdent pied, les associations jouent un rôle fondamental. Or, qu'il s'agisse des clubs de sport, des associations culturelles ou des œuvres de charité, toute sont très durement affectées par la crise. Restrictions budgétaires, capacités d'autofinancement réduites, manifestations annulées… Nous devons être très vigilants quant à la survie économique du tissu associatif. Un euro investi dans le secteur, c'est l'équivalent de neuf sous forme de bénévolat : il ne faudrait pas que cet euro manque aujourd'hui.
Deuxième préoccupation : il convient de distinguer l'ESS de l'économie que vous avez appelée avec pudeur, Madame la rapporteure pour avis, « classique ». J'appelle de mes vœux un monde où l'économie capitaliste traditionnelle sera l'exception et l'économie sociale la règle. Celle-ci est tout aussi performante ; simplement, elle s'attache au partage de la valeur et, dans ses processus de fabrication, au respect de l'environnement et de la société. C'est pourquoi elle doit devenir demain le modèle de référence.
Pour ce faire, on peut bricoler – c'est ce qu'on fait depuis des années. On peut aussi engager de grandes réformes. Il y en a eu, et l'on observe une sorte de continuum législatif en la matière. Il me semble ainsi que le rendez-vous que nous avons à honorer aujourd'hui s'inscrit dans la dynamique des lois Hamon ; il s'agit de promouvoir la démocratie interne dans l'ensemble de l'économie – et les statuts des structures d'ESS ne répondent pas toujours à cette exigence. L'ESS doit être exemplaire en matière de codétermination et de participation des salariés et des actionnaires.
L'autre forme de démocratisation réside dans le dialogue de l'entreprise avec les autres acteurs sociaux que sont notamment le consommateur, l'épargnant ou le collaborateur. Au sein du groupe Socialistes et apparentés, nous promouvons une certification en matière de responsabilité sociétale des entreprises (RSE), afin que chaque citoyen puisse, en toute transparence, privilégier le modèle économique de son choix. Nous souhaitons notamment, rejoints en cela par M. Roland Lescure et d'autres députés issus de diverses familles politiques, faire écho aux travaux du Mouvement impact France, qui a organisé une sorte de contre-congrès du MEDEF en vue de promouvoir un autre modèle économique. Que pensez‑vous, Madame la rapporteure pour avis, de l'idée de mettre en place, sur le modèle du Nutri-Score, un « score » de la RSE, qui serait fondé sur une centaine de critères et permettrait à tout un chacun de se positionner en tant qu'épargnant, consommateur ou collaborateur ? Associée à une réforme des marchés publics et à l'instauration d'une taxe sur la valeur ajoutée (TVA) circulaire, une telle mesure contribuerait à transformer l'économie à la source et à faciliter les transitions attendues.