Intervention de Stéphanie Do

Réunion du mercredi 21 octobre 2020 à 15h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphanie Do, rapporteure pour avis :

Je tiens, tout d'abord, à remercier le président Roland Lescure et les parlementaires pour leur confiance renouvelée à mon égard. Je remercie également les acteurs du logement qui ont répondu présent pour la quatrième année consécutive.

Le plan de relance et le projet de loi de finances pour 2021 tirent les leçons de la période éprouvante que nous traversons. Je salue la mobilisation du Gouvernement sur le volet du logement. Ces crédits sont à la hauteur des enjeux qui attendent le secteur du bâtiment, l'un des plus affectés par la crise de la Covid-19.

Les mesures correspondent également à la volonté du Gouvernement de lutter plus efficacement contre le mal-logement, qui concerne malheureusement une partie encore trop importante de la population. En effet, cet habitat, dans lequel tous se sont retrouvés confinés, représente encore trop souvent pour des milliers de personnes vulnérables un environnement insalubre aux effets délétères, aussi bien socialement que du point de vue de la santé publique.

Des améliorations sont certes possibles, et j'ai déposé des amendements en ce sens, tant les enjeux sont considérables face aux défis posés par le réchauffement climatique et la transition énergétique, sans oublier les difficultés conjoncturelles du secteur du bâtiment. Mais ce budget témoigne, in fine, de notre capacité à affronter l'avenir avec détermination et à optimiser notre politique au mieux des attentes des Français. Pour toutes ces raisons, je salue les efforts très importants consentis dans cette loi de finances en faveur du logement.

Les crédits du programme 109 « Aide à l'accès au logement », d'abord, enregistrent une progression de 3,65 % par rapport à l'an dernier. La hausse de la contribution de l'État aux aides personnelles au logement (APL) sera de 439 millions d'euros. Le Gouvernement s'engage de cette façon à un accompagnement soutenu des personnes modestes dans cette période difficile. Rappelons enfin qu'au cours de la crise sanitaire, l'État et la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) ont mené une politique volontariste de maintien des droits aux APL.

Deux chantiers retiennent particulièrement mon attention, comme chaque année. La mise en œuvre, au 1er janvier 2021, du versement contemporain des APL permettra une meilleure adéquation de l'aide aux besoins des allocataires. Il a été considéré, à juste titre, que faire intervenir une réforme techniquement lourde pouvait être disruptif dans une période déjà difficile. Cette réforme est techniquement prête et la CNAF a fourni un effort considérable pour adapter ses systèmes d'information. Les bailleurs sociaux ont également eu le temps nécessaire pour prendre leurs dispositions. Il n'en demeure pas moins qu'aucune baisse des revenus des ménages ne pourra être tolérée dans une période de crise économique, point sur lequel je resterai vigilante.

La trajectoire de la réduction de loyer de solidarité (RLS) est conforme aux engagements pris par le Gouvernement. C'est une réforme importante pour les organismes de logements sociaux. Comme convenu, le montant de la RLS sera bloqué à 1,3 milliard d'euros en 2021, de façon à en modérer les effets dans cette période particulière.

Saluons, enfin, le renforcement par la CNAF de son action de lutte contre la fraude aux aides au logement, qui est le fait de marchands de sommeil sans scrupule. La lutte contre ces agissements constitue désormais une priorité pour la CNAF.

Les crédits du programme 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » connaissent une forte progression, qui s'explique principalement par des changements de périmètre. L'adaptation de ce programme aux réalités du terrain montre que l'État, en mettant la priorité sur la rénovation énergétique des logements, entend résorber les disparités dans les conditions de logement des ménages et soutenir le secteur du logement.

La prorogation du dispositif « Pinel », qui est rattaché à ce programme, doit contribuer à la maîtrise des loyers. En effet, si le plan relance fait la part belle à la thématique du logement, c'est essentiellement la rénovation énergétique qui est mise à l'honneur. Or la seule rénovation énergétique ne permettra pas d'apporter une réponse satisfaisante au besoin de logements pour les publics modestes. C'est pourquoi je plaide pour une prorogation jusqu'en 2024 du dispositif Pinel, afin d'envoyer un signal de confiance et de permettre une relance pérenne des investissements, et donc du marché.

Concernant le prêt à taux zéro (PTZ), je défends sa prolongation depuis le début de mon mandat car c'est un dispositif très populaire, qui agit en faveur de l'accession à la propriété des ménages modestes. Son extension aux zones B2 et C, que nous avons adoptée l'année dernière, a été un bon signal pour les ménages situés en dehors des zones tendues. Cependant, sa suppression après décembre 2021 pèse sur la solvabilité des ménages, à qui les banques accordent moins facilement des prêts quand ils ne sont pas adossés au PTZ. C'est pourquoi je propose la prolongation de l'entièreté de ce dispositif, pour toutes les zones, sans date fixe.

Par ailleurs, je demande, comme les années précédentes, le rétablissement de l'APL accession en métropole et en outre-mer. Cette aide était une réponse efficace à l'objectif gouvernemental de développement de la vente de logements sociaux. En outre, sa suppression n'aurait engendré, selon diverses estimations de la CNAF, qu'entre 18 et 70 millions d'euros d'économie, soit une très faible part des dépenses du logement. Cette suppression n'a donc pas eu l'impact budgétaire souhaité, alors même qu'elle affecte de manière significative les foyers modestes. En tout état de cause, l'APL accession demeure un levier performant qui permet à 35 000 ménages par an d'accéder à la propriété, et son rétablissement paraît particulièrement justifié dans cette période tourmentée.

Les crédits du programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » ne cessent d'augmenter depuis plusieurs années, signe d'une mobilisation ininterrompue des pouvoirs publics sur ces sujets. Cette année marque la pérennisation de nombreuses places d'hébergement et la création de nouvelles places de logement dans le cadre du plan Logement d'abord. Ce plan, qui arrive à mi-parcours, a largement fait ses preuves et, comme en 2020, 7 000 nouvelles places de logements seront ouvertes en 2021, dont 1 000 places à destination des femmes victimes de violences.

La seconde partie de mon rapport porte sur l'importance du soutien au secteur du logement comme vecteur de la relance. L'effort mené sur le front de la rénovation énergétique des logements du privé contribuera à améliorer la qualité de l'habitat. Le Gouvernement a décidé, dans son plan de relance, d'initier un mouvement, inédit par son ampleur, en faveur de la rénovation énergétique des logements. Ce soutien est absolument vital pour l'économie du bâtiment et du logement.

Concernant la réforme du soutien à la rénovation énergétique dans le parc privé, le plan de relance est une occasion de revoir à la hausse les objectifs assignés. Une dotation d'un milliard d'euros par an pendant deux ans par rapport à la trajectoire initialement prévue permettra de financer un triple élargissement de la prime de transition énergétique appelée « MaPrimeRénov' ». Ainsi, tous les foyers y seront désormais éligibles sans condition de ressources, les copropriétés pourront bénéficier de la prime ainsi que les propriétaires bailleurs, et la prime financera les travaux de rénovation globale, en plus des financements par « geste » existants. Ce triple élargissement constitue une occasion historique de donner un coup d'accélérateur déterminant à la transition énergétique. C'est pourquoi j'ai également déposé un certain nombre d'amendements visant à proroger le dispositif « Coup de pouce ». En effet, les opérations par « geste », plus accessibles pour les ménages modestes, ne doivent pas être délaissées au profit de l'approche globale, et c'est la synergie des deux approches qui sera la plus efficace.

Cette impulsion contribuera à relancer le secteur du logement, qui a été fortement ébranlé. Je tiens cependant à alerter sur le fait que la rénovation énergétique à elle seule ne suffira ni à pérenniser l'activité du secteur, ni à répondre au fort besoin en logements, bien qu'elle constitue également une mesure hautement sociale, au-delà de son seul aspect écologique.

Il convient donc, en complément de ces mesures, de continuer à encourager la construction de logements sociaux et intermédiaires. Malheureusement, la réalisation de ces programmes est caractérisée, à l'heure actuelle, par des délais excessifs de traitement des dossiers d'agrément, raison pour laquelle j'ai proposé l'aménagement et l'assouplissement de cette procédure.

Pour se relever, le secteur doit également mieux lutter contre la fraude, aux côtés des pouvoirs publics. Je plaide donc, à travers mes amendements, pour l'adoption de plusieurs mesures afin, d'une part, de lutter contre les comportements frauduleux de la part des entreprises de rénovation énergétique et, d'autre part, d'envoyer des signaux de fermeté et de mise en garde aussi bien en direction des fraudeurs que des donneurs d'ordre, l'objectif étant d'assainir ce milieu et de rediriger les flux financiers vers des entreprises vertueuses.

Par ailleurs, je consacre une réflexion à l'avenir du groupe Action Logement, actuellement sous le feu des critiques. Après beaucoup de rumeurs, le PLF opère un prélèvement de 1,3 milliard d'euros sur sa trésorerie, au profit, partiellement, du Fonds national d'aide au logement. Nous ne devons pas nous habituer à des prélèvements exceptionnels opérés dans l'urgence. Il faut clarifier l'avenir du groupe Action Logement et de sa ressource, la participation des employeurs à l'effort de construction (PEEC), afin d'optimiser son rôle fondamental d'impulsion et de moteur pour toute l'économie de ce secteur. Si une nouvelle réforme devait voir le jour, elle ne pourrait être acceptée par les parlementaires et le groupe que dans le cadre d'une coconstruction et d'un dialogue vertueux entre les élus du peuple et le Gouvernement.

Pour conclure, je souhaite insister sur la bonne volonté et l'esprit collectif qui ont animé les acteurs du logement pendant la crise sanitaire. C'est avec cette mentalité que nous pouvons espérer sortir de la crise par le haut, avec une filière sereine et renforcée.

J'émets un avis favorable à l'adoption des crédits des programmes 109, 135 et 177 de la mission « Cohésion des territoires ».

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