Intervention de Thibault Bazin

Réunion du mercredi 21 octobre 2020 à 15h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaThibault Bazin :

Quel est le bilan en matière de logement depuis trois ans ? Notre pays est tombé, avant même la crise sanitaire, sous la barre des 400 000 logements par an. Les dispositifs annoncés en grande pompe peinent à se concrétiser, à l'instar des opérations de revitalisation du territoire, des logements dans les cœurs de ville ou encore du Denormandie dans l'ancien.

Vous connaissez l'adage : « Quand le bâtiment va, tout va ». Une crise du logement couve ; le choc d'offre n'a pas eu lieu. D'un côté, la réforme brutale des APL au début du quinquennat a mis un frein aux investissements des bailleurs sociaux, et les menaces pesant sur Action Logement renforcent l'instabilité et la peur pour l'avenir de ce secteur. D'un autre côté, les mesures réduisant les aides à l'accession à la propriété – PTZ, APL accession, Pinel – ont limité la demande de logement. Le problème de la solvabilité de la demande s'accentuera dans les prochains mois, avec une hausse du risque sur les crédits immobiliers et une conjoncture inquiétante pour l'emploi. Les nouvelles prises de commande se font rares. La conséquence se fera ressentir sur l'activité, et donc l'emploi, dans les prochains mois si la relance n'est pas efficace.

Il y a une dimension psychologique majeure dans l'immobilier. La pierre doit être mieux considérée fiscalement, socialement et économiquement. Le discours doit changer et l'investissement dans la pierre doit être valorisé. Le plan de relance sera réussi pour la construction si les Français en sont les acteurs. Pour cela, il faut des ambitions clairement affichées et l'accession à la propriété doit en être une : être propriétaire, ce n'est pas un gros mot. Un élargissement réel du PTZ serait souhaitable, non seulement aux classes moyennes, mais aussi à l'ensemble du territoire. Un rétablissement de l'APL accession faciliterait aussi le parcours résidentiel. Il ne faut pas opposer le neuf à l'ancien, l'accession à l'investissement : c'est une dynamique vertueuse, qui permet une réelle mixité d'occupation et de morphologie du bâti, tout en créant une émulation dans la production de meilleurs logements, avec de belles opérations offrant de la densité, y compris avec des maisons individuelles.

L'État doit surtout appréhender la nouvelle demande de nos concitoyens à la suite du confinement : ils veulent de l'espace. La demande de logements à haute qualité d'usage, avec des espaces extérieurs privatifs, doit être davantage prise en compte. Le développement du télétravail engendre un besoin d'espaces prévus à cet effet. Il faut revenir à des densités raisonnées et surtout permettre à tous les territoires de se développer. Pour cela, un État davantage aménageur du territoire permettrait de diminuer les tensions du marché, par exemple sur les maisons individuelles. Un meilleur soutien à l'accession à la propriété rendrait à terme les Français moins dépendants des aides de l'État. L'APL accession en est l'illustration : la charge représentée par le versement des APL disparaît dans le temps, et leurs bénéficiaires bénéficient à la retraite d'un logement dont ils sont propriétaires.

Nous devons nous assurer que la relance sera efficace : il y a encore du travail, et nous attendons toujours les amendements du Gouvernement.

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