Intervention de Jean-Baptiste Lemoyne

Réunion du mardi 3 novembre 2020 à 17h15
Commission des affaires économiques

Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État :

La communauté des Français établis hors de France est une communauté très importante, qui compte plusieurs millions de personnes, et qui fut d'ailleurs la première à être exposée à la covid-19 – souvenez-vous de nos compatriotes qui se trouvaient à Wuhan, en Chine ! Cette communauté continue sur les cinq continents à être soumise à la pandémie et à ses conséquences économiques et sociales. Avec M. Jean-Yves Le Drian, et avec M. Gérald Darmanin à l'époque, nous avions souhaité mettre en place un plan de soutien massif de 220 millions d'euros portant sur trois actions.

La première action concerne le soutien médical et consiste en la mise en place d'avions disponibles 24 heures sur 24 pour des évacuations sanitaires pour des compatriotes se trouvant dans des pays dont l'infrastructure de santé ne permettait pas la prise en charge ; et en la mise en place de télémédecine et d'acheminement de matériels – ceci pour 20 millions d'euros.

La deuxième action concerne le réseau de l'enseignement français à l'étranger. Elle prévoit l'augmentation significative du budget des bourses scolaires (+50 millions d'euros, quand le budget habituel se monte à 100 millions d'euros) et la mise en place d'aides aux établissements au travers d'aides remboursables et d'aides aux familles étrangères (à hauteur de 50 millions d'euros). Ces mesures ont trouvé à s'appliquer ces derniers mois.

Enfin, la troisième action consiste en un dispositif d'aide sociale individuelle pour ceux qui se trouveraient dans des situations compliquées d'un point de vue économique et social. Nous avons, là aussi, instauré une subvention de 50 millions d'euros. Pour l'instant, une somme de 1,8 million d'euros seulement a été dépensée, mais il s'observe une dynamique très forte dans la croissance des bénéficiaires chaque semaine. À ce jour, près de 12 000 personnes ont bénéficié de cette subvention, dont 2 777 nouveaux bénéficiaires la semaine dernière. Le dispositif prend donc de l'ampleur.

Nous avons également veillé à pouvoir mieux doter en subventions un certain nombre d'associations de bienfaisance, les OLES (organismes locaux d'entraide et de solidarité), car ces structures associatives, qui comptent beaucoup de bénévoles qui se donnent avec cœur, soutiennent également nos compatriotes. C'est le cas de la Société française de bienfaisance à Beyrouth, par exemple, ville qui a été exposée à d'autres malheurs avec les explosions. Ce plan de soutien est en train de se déployer. Il a permis une forme de résilience des communautés françaises. Nous craignions que certains Français soient contraints de regagner leur pays – je dis « contraints » car, souvent, leur choix est de construire leur vie hors de France, tout en gardant ce lien avec le pays. Aujourd'hui, nous voyons quelques expatriations qui prennent fin, mais globalement, les communautés françaises sont très résilientes.

Cet été, le tourisme en montagne a bien fonctionné. Les Français étaient en quête de grands espaces et voulaient s'oxygéner. En matière d'accompagnement, les acteurs de la montagne ont été totalement concernés par les mesures de soutien économique. S'agissant des perspectives, c'est l'évolution de la situation sanitaire qui commande. Un point sera fait tous les quinze jours, comme l'a dit le Premier ministre, et c'est à cette occasion que nous pourrons regarder quelles sont les perspectives qui se dessinent.

J'ai bien conscience du poids des vacances de Noël dans le chiffre d'affaires des stations de ski (entre 10 et 15 %). Il est difficile de faire des déclarations définitives aujourd'hui. Je rejoins tout à fait les propos de Mme Marie-Noëlle Battistel sur le fait que les acteurs du tourisme de montagne se sont préparés très soigneusement et méticuleusement. Je l'ai vu en me rendant à la rencontre de DSF à Grenoble, en échangeant avec l'ANEM (association nationale des élus de montagne) Je sais ce qu'ils ont fait et j'espère que l'on pourra leur offrir des perspectives le moment venu, lorsque les conditions sanitaires le permettront.

C'est pourquoi un certain nombre de campagnes de promotion à destination des Européens, menées avec Atout France, ont été interrompues et reportées à une période où les conditions le permettront. À plus long terme, nous avons, notamment avec M. Joël Giraud et Mme Jacqueline Gourault, le souci de bien structurer un programme montagne au sein de l'ANCT (Agence nationale de la cohésion des territoires), afin d'avoir une véritable offre de service pour accompagner les acteurs touristiques de la montagne et d'avoir une vraie stratégie face au changement climatique qui les affecte. Avec France tourisme ingénierie et Atout France, nous avons commencé à travailler, à faire des expérimentations sur la modernisation de l'immobilier de loisir des stations. Il faut maintenant passer à l'échelle, et le programme « montagne » de l'ANCT sera tout à fait précieux de ce point de vue.

Nous veillons, dès que cela est possible, à intégrer certaines activités aux listes S1 et S1 bis, qui correspondent aux métiers et activités éligibles aux mesures du plan tourisme. Certains commerces ont pu y être ajoutés. Ce fut le cas par exemple des commerces de souvenirs religieux en août. Je prends en compte les demandes qui viennent d'être portées à ma connaissance sur ce sujet. Nous allons les étudier. C'est à chaque fois un petit combat au niveau interministériel pour réussir à faire entrer de nouvelles activités, mais les acteurs du tourisme savent qu'ils peuvent compter sur nous pour mener tous les combats. Il y en a que l'on perd, d'autres que l'on gagne, mais nous les menons quoi qu'il arrive.

S'agissant du chômage partiel, une clause de revoyure a été fixée au mois de décembre afin de discuter des suites du dispositif, comme le Premier ministre l'a annoncé. Je ne peux donc pas vous en dire plus aujourd'hui.

Les centres de vacances constituent un sujet de préoccupation commun avec le ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse. Nous avons poursuivi le dispositif des « vacances apprenantes » pendant les vacances de la Toussaint. Près de 50 000 jeunes ont pu partir, ce qui était tout à fait utile. Nous avons mobilisé 7 millions d'euros, en complément des programmes menés cet été, qui avaient déjà permis à 125 000 jeunes de partir en colonie. Le ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse, ainsi que le secrétariat d'État à la jeunesse, travaillent à mettre en place un certain nombre de dispositifs complémentaires pour aider ces acteurs à bénéficier d'un soutien pour passer ce cap compliqué.

La France occupe la première place du podium en matière de fréquentation, mais pas en matière de recettes touristiques. Je dis régulièrement qu'il faut arrêter de considérer que le tourisme est comme la « cueillette ». Nous sommes dans un monde de plus en plus compétitif, de nouvelles destinations ont émergé. Face à cela, nous devons nous réinventer ; nous devons être à la pointe de l'innovation, prendre en compte les évolutions des consommateurs. Pour augmenter le volet des recettes, nous avions déjà pris plusieurs mesures en matière de détaxe, car il s'agit de l'un des leviers permettant de faire en sorte que les visiteurs internationaux dépensent plus sur notre territoire. Hélas, ces mesures ont été percutées de plein fouet par la crise épidémique, et nous n'avons pas pu en voir les effets.

Je voudrais donner des précisions sur le calendrier des mesures visant à favoriser le tourisme durable. S'agissant de l'opération « 1 000 restaurants durables », qui vise à aider un certain nombre d'établissements en matière de tourisme durable, plusieurs appels à projets sont prévus, dont le premier sera lancé ce mois-ci. L'objectif est de sélectionner des structures ayant vocation à communiquer autour du dispositif pour rechercher des projets susceptibles d'être financés par le fonds. L'appel à projets pour les restaurants existants ou en création sera lancé en janvier 2021. Nous ne manquerons pas de vous tenir informés, car le dispositif peut concerner des établissements dont vous auriez connaissance et qui pourraient en bénéficier sur vos territoires.

Le renforcement des dispositifs a été évoqué. Comme je l'ai dit dans mon propos liminaire, nous avons le souci de nous adapter continuellement. Depuis le mois de mars, de nombreux dispositifs ont évolué en fonction des retours du terrain des acteurs du tourisme et en fonction de vos retours. Nous allons continuer à être vigilants.

Sur le protocole sanitaire, j'ai salué le travail mené par les acteurs de la montagne. En ce qui concerne les centres de vacances, je pense avoir donné une réponse à travers celle apportée à M. Vincent Rolland.

Le tourisme de savoir-faire donne à voir de petits joyaux aux touristes, à travers l'ouverture d'entreprises. 4 000 entreprises sont comptabilisées dans ce secteur, dont 2 000 qui ouvrent très régulièrement. Nous avons d'ailleurs soutenu la campagne de promotion lancée par Entreprise et Découverte cet été. Il y a quelques jours, nous avons également engagé un appel à projets avec la DGE (direction générale des entreprises), afin de doubler le nombre d'entreprises ouvertes au public d'ici cinq ans.

Par ailleurs, je voudrais signaler que les entreprises de savoir-faire ont été ajoutées aux listes S1 et S1 bis qui permettent d'être éligibles aux aides du tourisme. Cette demande provenait notamment de Grasse. L'ajout de ces entreprises figure dans le décret du 2 novembre 2020 relatif au fonds de solidarité. Nous continuerons à être aux côtés d'Entreprise et Découverte pour favoriser la visite d'entreprises à la française. Nous faisons également la promotion de ces visites d'entreprises dans le cadre de la semaine de l'industrie, qui est un rendez-vous rituel.

J'en viens aux pertes d'exploitation. La relation contractuelle, nous l'avons vu, n'est pas toujours très simple. Une partie des assurés ayant souscrit à la clause particulière ont pu obtenir des dédommagements, mais d'autres n'en ont pas obtenu. Les professionnels du tourisme m'ont fait part de leur souhait – et d'ailleurs ce n'est pas qu'un souhait, puisque cela s'est matérialisé – que soit mise en place une plateforme visant à abréger les contentieux. J'ai toujours dit aux assurances que leur contribution était attendue. Elles se sont engagées, dans le cadre du CIT du 14 mai, à réaliser un certain nombre d'investissements dans le secteur du tourisme. Nous sommes très vigilants à la réalisation de ces éléments. Les attentes des acteurs sont très fortes, ce que nous rappelons régulièrement aux assureurs.

En ce qui concerne les loyers, il est très compliqué de prendre une mesure uniforme, les bailleurs étant très différents. Certains sont de grandes structures, et pourraient d'ailleurs faire plus facilement des efforts que les retraités dont la location contribue à la retraite. C'est pourquoi nous avons mis en place ce dispositif de crédit d'impôt, pour inciter les bailleurs à faire des abandons ou des exonérations au profit de leurs locataires. Cela est dans leur intérêt car s'ils ne le font pas, ils risquent de se retrouver sans locataire. La situation est compliquée pour certains, même si le fonds de solidarité a été considérablement augmenté, passant de 1 500 à 10 000 euros, notamment pour éponger une partie des charges fixes. Le loyer n'est pas le même dans une ville moyenne, une grande ville, une métropole, ou dans un petit village ; mais le fonds de solidarité peut, dans beaucoup de situations, apporter une réponse. Il sera renforcé, je l'espère, par les bailleurs qui se saisiront du crédit d'impôt.

Je tiens beaucoup à la mesure 21 du CIT du 14 mai. Je l'ai fait ajouter à minuit la veille car il me semblait indispensable qu'il existe une déclinaison territoriale du plan de relance là où les territoires avaient le plus souffert. Les préfets ont procédé à un travail de qualité sur ces territoires. Il nous appartient, en central, d'apporter notre pierre à l'édifice et de mettre en place, sous forme de contrats avec ces territoires, un certain nombre de dispositions complémentaires pour apporter notre soutien. Je mentionnerai en exemple l'enjeu des saisonniers, qui est particulièrement marqué à Lourdes.

S'agissant des feuilles de route sectorielles, nous travaillons sur le rebond, en vue de 2021. Initialement, nous voulions que ce contrat de transformation de la filière se fasse d'ici la fin de l'année. Étant donné la période que nous vivons, les acteurs travaillent davantage au sauvetage dans un premier temps, ce que nous comprenons. Nous continuerons néanmoins à travailler en temps masqué sur la question du rebond.

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