Commission des affaires économiques

Réunion du mardi 3 novembre 2020 à 17h15

Résumé de la réunion

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La réunion

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La commission des affaires économiques a auditionné M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État chargé du tourisme, des Français de l'étranger et de la francophonie.

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Nous tenons aujourd'hui notre première réunion dans le cadre de la nouvelle période de confinement décidée par le Gouvernement. Au regard des règles définies par la Conférence des présidents de vendredi dernier, cette réunion « en mixte » pour entendre un membre du Gouvernement est une dérogation, une exception, parce qu'elle était fixée déjà depuis quelques jours. Je remercie le ministre de s'y être plié. Mais à l'avenir, les auditions de ce type ne pourront avoir lieu que pour les travaux législatifs, comme ce sera le cas demain pour l'examen du projet de loi DDADUE (projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne). Seuls les membres de la commission qui seront présents dans la salle pourront voter, mais ceux qui participeront en visioconférence pourront prendre la parole et défendre des amendements.

Nos prochaines auditions – hors travail législatif – de ministres ou de dirigeants d'entreprises auront donc lieu en visioconférence. Je précise aux présidents et rapporteurs des diverses commissions d'enquête ou missions d'information en cours qu'ils sont astreints à la même règle. Toutes leurs auditions se tiendront en visioconférence. Les déplacements sont aussi suspendus. Nous avons tous un devoir d'exemplarité. Je compte sur vous.

Le format de la visioconférence sera également celui que nous utiliserons pour entendre le compte rendu hebdomadaire du groupe de suivi sur les conséquences économiques du confinement, comportant un membre de chaque groupe politique et conduit par MM. Stéphane Travert pour La République en Marche et Julien Dive pour Les Républicains.

Un certain nombre d'entre vous avait souhaité – vous vous en souvenez – reproduire l'organisation que nous avions adoptée au printemps. À l'époque, six groupes de travail suivaient en direct tous les sujets chers à notre commission. Nous avions alors suspendu les autres travaux de la commission, ce qui n'est pas le cas cette fois-ci. Les travaux législatifs et les missions d'information se poursuivent. Nous n'avions donc pas les moyens de remettre en activité six groupes de travail. J'ai donc proposé au Bureau, qui en a agréé vendredi, de créer un groupe de travail transversal, d'y nommer un représentant de chaque groupe parlementaire, de manière à ce que nous puissions suivre l'ensemble des sujets. Chaque semaine, le groupe de travail se saisira d'un sujet, mènera les auditions et nous communiquera les informations qui peuvent être partagées en provenance du Gouvernement. Dans l'autre sens, les signaux d'alerte que vous aurez fait remonter seront transmis au Gouvernement. Le groupe a décidé de commencer son travail par l'enjeu des commerces de proximité. Nous recevrons donc une communication sur ce sujet mardi prochain après les questions au Gouvernement. À l'avenir, les communications de ce groupe auront lieu le mercredi, à l'occasion de nos travaux habituels de commission. Mercredi prochain étant le 11 novembre, la prochaine communication du groupe aura lieu mardi 10.

Venons-en à notre « plat de résistance », si je puis m'exprimer ainsi. Votre audition, Monsieur le ministre, a été programmée avant ce nouveau confinement et devait s'inscrire dans le cycle nous permettant de questionner l'ensemble des membres du Gouvernement relevant du champ de compétence de notre commission. Le contexte modifie évidemment quelque peu l'approche retenue pour cette réunion.

Comme lors de votre précédente audition, le 5 mai dernier, des interrogations et des inquiétudes se font jour sur l'impact de la crise sanitaire sur le secteur du tourisme. La prolongation de cette crise, les mesures de reconfinement décidées un peu partout en Europe, les restrictions à la liberté – notamment à la liberté de circulation – rendent ces interrogations encore plus fortes et ces inquiétudes plus angoissantes pour les entrepreneurs et les salariés du secteur touristique, qui représente – vous le savez – 7 % de notre produit intérieur brut (PIB). Lors de la présentation de son avis sur le tourisme, notre rapporteur budgétaire, M. Vincent Rolland, indiquait que la prévision actualisée pour l'ensemble de l'année 2020 ne serait que de 36 millions de visiteurs et de 24 milliards d'euros de recettes dans le cas d'un impact sanitaire fort, ce qui semble être malheureusement l'hypothèse la plus probable aujourd'hui. Un contrat de relance et de transformation du tourisme s'impose donc.

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Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État chargé du tourisme, des Français l'étranger et de la francophonie

Le « plat » n'était pas forcément celui que nous attendions, en tout cas il n'est pas à la hauteur de ce que nous souhaitions pour le tourisme français en 2020, mais la « résistance » est bien là – en tout cas c'est l'esprit qui anime les professionnels, qui nous anime et vous anime, pour soutenir et défendre ce joyau de notre économie.

Nous avons vécu et nous vivons en 2020 des heures sombres et pleines d'incertitude pour le tourisme. Le rapporteur pour avis, M. Vincent Rolland, évoquait, à la première page de son rapport, une « année noire pour le tourisme », et je le suis dans cette affirmation. Chaque jour, vous êtes interpellés dans vos territoires par des entreprises et des salariés qui vivent du tourisme, et dont l'activité est menacée par la limitation des déplacements nationaux et internationaux qui a cours depuis des mois.

Cette crise va bien au-delà de la France ; elle est européenne, et même mondiale. L'OMT (Organisation mondiale du tourisme) a estimé fin octobre que les arrivées de touristes internationaux avaient diminué de 70 % dans le monde au cours des huit premiers mois de l'année 2020, par rapport à l'année précédente, sous l'effet de la pandémie de la covid-19. En France aussi, le choc causé par cette crise est violent pour un secteur qui, je le rappelle, compte plus de 300 000 entreprises, beaucoup de très petites et de moyennes entreprises (TPE et PME), représente plus de 3 millions d'emplois directs et indirects, et contribue à près de 8 % de notre produit intérieur brut.

Lors de nos échanges en mai dernier, je vous faisais part d'une forme de confiance dans l'avenir, parce que nous étions en train de travailler à la préparation de l'été, dans une phase de déconfinement progressif. Aujourd'hui, force est de constater qu'avec cette deuxième vague et la reprise de la pandémie, nous sommes revenus dans une situation de crise aiguë et d'urgence pour sauver notre tourisme, ainsi que ceux qui le font vivre et rayonner au quotidien. Les décisions prises par le Président de la République le 28 octobre étaient difficiles mais indispensables pour enrayer la « seconde vague ». J'entends une grande inquiétude, et parfois même un sentiment d'injustice, gagner les acteurs du tourisme, mais le Président de la République a tenu à être au rendez-vous depuis le mois de mars en érigeant le tourisme en priorité nationale en termes de soutien.

Le 14 mai dernier, à l'occasion du comité interministériel pour le tourisme, un véritable plan d'urgence et d'investissement de 18 milliards d'euros a été mis en place, comprenant un volet propre à la promotion de la destination « France » pour l'été. Depuis le début de cette crise, je me suis battu pour que nous puissions essayer de compenser la perte du tourisme international par ce que j'ai appelé le tourisme « bleu-blanc-rouge » afin que nos compatriotes repartent à la découverte de nos territoires. Un certain nombre d'outils de soutien ont également été mis en place à ce moment-là.

Finalement, ce plan fut le premier plan de soutien sectoriel à être annoncé, ainsi que le premier plan de relance, puisqu'au-delà du soutien immédiat, un certain nombre de mesures et de dispositions d'investissement, portées par la Caisse des dépôts et consignations et la Banque des territoires, ont été annoncées, afin de préparer l'avenir du tourisme. Outre le PGE (prêt garanti par l'État) affecté aux activités saisonnières et lancé le 5 août, un fonds de solidarité a été instauré, avec des spécificités pour le monde du tourisme s'agissant de l'exonération de charges sociales ou la prise en charge de l'activité partielle – mesures que vous connaissez parfaitement.

Cette période a été l'occasion de faire travailler de façon très coordonnée non seulement les services de l'État, les opérateurs, mais aussi l'écosystème du financement (BPIfrance, la Banque des territoires, etc.), ainsi que les collectivités territoriales et les partenaires privés. Beaucoup ont alors pris conscience du poids du secteur du tourisme. En tant qu'élus, nous en sommes tous convaincus parce que nous en faisons le constat dans nos territoires, mais chez les observateurs, cette conscience aiguë de l'importance du secteur – en amont comme en aval – n'existait peut-être pas. De ce point de vue, la crise a été un révélateur.

Quel bilan peut-on établir de la mise en place de ces aides ? Il est important de voir ce qui a effectivement été réalisé et décaissé. Le CIT (Comité interministériel du tourisme) du 12 octobre, qui s'est tenu sous la présidence de M. Jean Castex, a dressé un bilan. Il en ressort que les outils ont été très largement mobilisés par les acteurs de la filière. 13 des 18 milliards d'euros ont d'ores et déjà été mobilisés, avec 10 milliards d'euros de PGE pour le secteur du tourisme, 1 milliard d'euros au titre du fonds de solidarité pour le secteur du tourisme et 2 milliards d'euros injectés en prêts, fonds propres et quasi-fonds propres via des dispositifs ad hoc (Prêt Tourisme ; fonds mis en œuvre avec la Caisse des dépôts et la Banque des territoires, comme le fonds tourisme social investissement). Nous poursuivrons l'évaluation de ces dispositifs en décembre, car le soutien devra peut-être se prolonger. Il y a hélas fort à parier que la pandémie n'aura pas disparu au 31 décembre à minuit et qu'il sera nécessaire de réfléchir à la poursuite d'un certain nombre de dispositifs. Le Premier ministre a en tout cas donné une clause de revoyure lors de sa rencontre avec le secteur HCR (hôtels, cafés, restaurants) au début du mois d'octobre.

La saison estivale a été moins mauvaise que ce que l'on pouvait le redouter en mars‑avril, la clientèle domestique ayant été massivement au rendez-vous. 94 % des Français qui sont partis ont fait le choix de partir en France, ce qui représente 20 points de plus par rapport aux moyennes traditionnellement observées. Une clientèle européenne de proximité est également venue. De nombreux acteurs se sont mobilisés pour promouvoir le mot-dièse « #CetétéJeVisiteLaFrance », sur lequel Atout France a réalisé une campagne ayant généré 22 millions de vues. Les élus de circonscriptions de littoral, de montagne ou de zones rurales ont bien perçu l'assiduité de la clientèle française et européenne de proximité, à telle enseigne que dans certains territoires, les dépenses touristiques domestiques ont été en croissance par rapport à l'année 2019, qui était pourtant une bonne année.

Une certaine disparité s'observe toutefois. Certains territoires souffrent durablement, comme les métropoles, et notamment Paris, où le moteur touristique international était jusqu'alors important, et où le moteur événementiel est grippé compte tenu des contraintes actuelles.

Vous connaissez le dicton : « Quand on se regarde on se fait peur ; quand on se compare on se rassure ». La France a mieux résisté que ses principaux concurrents européens que sont l'Italie et l'Espagne. Comme le précise M. Vincent Rolland dans son rapport, la perte de recettes internationales enregistrée par la France s'élève à - 46,8 % sur les huit premiers mois de l'année, alors qu'elle se monte à - 66 % en Italie et à - 75 % en Espagne. Une certaine résilience s'observe donc, grâce aux clientèles européennes de proximité, qui ont répondu présentes.

Les prochaines semaines seront encore compliquées pour les acteurs du tourisme. Notre stratégie tient en deux mots : résister et préparer le rebond. La résistance s'opère notamment avec le renforcement des mesures de soutien, que le Premier ministre a annoncé le 29 octobre : l'attribution du fonds de solidarité à davantage d'entreprises grâce à la suppression de certains critères (suppression de la barrière que constituait le fait d'exiger un bénéfice annuel imposable inférieur à 60 000 euros ; suppression de la condition d'un chiffre d'affaires inférieur à 2 millions d'euros ; intégration des sociétés créées nouvellement) ; la poursuite de la prise en charge de l'activité partielle avec un reste à charge « zéro » dans le secteur du tourisme jusqu'au 31 décembre, avec une clause de revoyure en décembre ; l'exonération totale des cotisations pour les PME du tourisme ayant perdu 50 % de leur chiffre d'affaires ; l'adaptation du PGE, avec un nouveau différé d'un an, ce qui porte celui-ci à deux ans et permet de profiter de la nouvelle saison pour refaire des réserves et faire face à cette dette ; ou encore l'amortissement du PGE étalé sur plusieurs années supplémentaires, qui sera très précieux.

Parmi les autres dispositifs qui s'appliqueront, sont prévus des prêts directs par l'État et la prise en charge partielle des loyers, puisque la semaine prochaine vous allez examiner, dans les articles non rattachés du projet de loi de finances (PLF), des dispositions prévoyant d'instituer un crédit d'impôt pour les bailleurs qui renonceraient à percevoir des loyers – démarche qui est loin d'être systématique et qui revient souvent dans les demandes du secteur.

J'ai bien conscience des difficultés qui pèsent sur un certain nombre d'activités. S'agissant du monde de la nuit, nous avons mis en place en juillet, avec M. Alain Griset, un fonds de solidarité pouvant se monter à 15 000 euros par mois. Les acteurs de l'événementiel, des croisières, du thermalisme souffrent également de ne pas pouvoir relancer pleinement leurs activités.

Dans le cadre du CFT (comité de filière Tourisme), que je réunis très régulièrement, je continue à recueillir des demandes précises d'adaptation de notre dispositif, qui sont présentées par les professionnels et qui sont à l'étude. Je mentionnerai la prise en compte des holdings par le fonds de solidarité, et d'ailleurs le décret de ce matin permet de prendre en compte les holdings cumulant moins de 50 emplois. D'autres demandes se font jour. Les congés payés représentent une charge significative pour les entreprises. Mme Élisabeth Borne a appelé ce matin les partenaires sociaux à en discuter, et le secteur du tourisme souhaite également avancer sur ce sujet. Le secteur des assurances a donné lieu à de fortes attentes, que nous comprenons. Il est souhaitable que chacun puisse prendre sa part dans la prise en charge des pertes d'exploitation. Les compagnies d'assurances se doivent d'être toujours plus aux côtés des professionnels du tourisme.

Le CIT du 14 mai avait prévu de travailler sur des feuilles de route sectorielles et territoriales car certains territoires ont été plus durement touchés que d'autres – je pense à Lourdes, à la Corse et à l'Outre-mer. Ces feuilles de route font l'objet d'un travail intéressant au niveau local, sous l'égide des préfets. Il nous appartient de nous en emparer au niveau central. À Lourdes, les travaux ont bien avancé, d'abord sous l'égide du préfet, M. Blondel, puis de son successeur. Une grande réunion se tiendra d'ailleurs à Lourdes le 13 novembre sur le sujet. J'ai eu l'occasion d'échanger avec les acteurs de la Corse il y a quelques semaines. Nous sommes en train de peaufiner nos travaux avec l'ATC (Agence du tourisme de la Corse). S'agissant de l'Outre-mer, nous travaillons avec M. Sébastien Lecornu en vue de tenir un comité stratégique du tourisme en Outre-mer dans les prochaines semaines, afin d'arrêter ces feuilles de route.

J'aimerais parler de la préparation du rebond, de la relance, lorsque les conditions sanitaires le permettront. De nombreuses destinations ont émergé depuis vingt à vingt-cinq ans. Je pense que la concurrence sera féroce lorsque la reprise sera possible. Nous devons sentir les tendances à l'œuvre, comme la nécessité de prendre soin, de rassurer ; la digitalisation, qui a un impact sur la tenue des événements ; l'immersion virtuelle, qui joue également un rôle désormais dans la préparation de l'expérience touristique ou dans l'expérience touristique elle‑même. Nous devons nous préparer à ces tendances et évoluer vers un tourisme plus durable. C'est une partie importante du rapport qui vous a été présenté par M. Vincent Rolland, dont je salue la qualité des travaux. Nous allons nous en inspirer car nous partageons cette philosophie ; c'est pourquoi nous avons souhaité, dans le cadre du plan de relance, qu'un fonds de 50 millions d'euros consacré au tourisme durable soit mis en place. Ce fonds sera géré par l'ADEME (Agence de la transition écologique) et nous permettra de travailler à accompagner plusieurs centaines de restaurants et d'hôtels dans ces démarches, ainsi que d'avancer sur le concept de slow tourism, dont il faudrait trouver une traduction car étant en charge de la francophonie, je ne me satisfais pas de cet anglicisme.

Je pense que les acteurs doivent s'emparer toujours plus du numérique. Nous avons lancé un appel à projets avec Atout France et le Welcome City Lab pour favoriser la stimulation. 490 dossiers de candidature ont été reçus, et une dizaine d'entreprises, de « jeunes pousses », ont été distinguées, dont je vous incite à découvrir les technologies. Je citerai Patrivia, qui met en place un système de billetterie en ligne qui fonctionne très bien pour bon nombre de sites culturels, ainsi que Vaovert ou Solikend. Ces jeunes pousses réfléchissent au tourisme de demain et prennent en compte les contraintes de la période que nous traversons pour proposer des outils aux professionnels et aux territoires.

La France n'est pas une île. Il faut que nous travaillions à la reprise du tourisme au niveau européen. Nous avons déjà réussi à mieux harmoniser les pratiques au niveau européen, et des enceintes comme le G20 ou l'OMT accueillent régulièrement des concertations. Il reste beaucoup à faire, mais cette crise est aussi un accélérateur de la coopération internationale en faveur du tourisme.

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Nos compatriotes qui vivent à l'étranger ont été évidemment affectés comme ceux qui vivent en France par cette crise d'un genre nouveau, une crise sanitaire, mais aussi économique et sociale. J'aimerais vous entendre sur ce que la France a fait et fait encore pour soutenir ces compatriotes qui vivent à l'étranger. Les parlementaires représentant les Français de l'étranger ont eu l'occasion d'échanger avec vous hier lors d'une conférence téléphonique, mais je souhaiterais – pour le public et pour nos collègues de la métropole – que l'on sache ce qui a été fait pour les Françaises et les Français qui vivent à l'étranger.

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Le secteur du tourisme représente plus de 2 millions d'emplois directs et indirects sur notre territoire, et il est particulièrement affecté par la crise. 20 à 25 % des structures seraient en grande fragilité. Au niveau mondial, l'on enregistre une baisse de 70 % des arrivées de voyageurs entre janvier et août. La pandémie et les incertitudes liées à son évolution ont un impact de long terme sur nos activités touristiques. Dans ces conditions, le Gouvernement ne cesse d'adapter les mesures de soutien au secteur : plan de tourisme renforcé, investissements du plan de relance tournés vers le tourisme ; mobilisation de 614 millions d'euros en faveur du patrimoine, de 50 millions pour le tourisme vert, etc.

Il faudra poursuivre cet accompagnement en 2021 en fonction de l'évolution de l'épidémie et des secteurs d'activité. En cette période hivernale, je pense en premier lieu au secteur « montagne ». Notre expérience de maires et d'élus de la montagne nous permet de mesurer tous les enjeux de fonctionnement et d'attractivité que doivent relever les stations de montagne. Bien que l'été ait été à la hauteur des espérances, des difficultés ont surgi ces derniers mois, avec des fermetures prématurées. Cette saison, le confinement du mois de novembre fait craindre aux professionnels une période très compliquée, période qui était est déjà affectée, avant même les récentes annonces, par la baisse des réservations liée à l'incertitude de la situation sanitaire, aux annulations des voyages de groupes, notamment scolaires, et à la perte de la clientèle étrangère.

Quelles mesures envisagez-vous pour accompagner les stations de montagne et les professionnels ? Quelles sont les perspectives en termes de réouvertures post-confinement ?

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Vous avez fort bien résumé ce qu'est la situation du tourisme. Hélas, nous avons l'impression que celle-ci se dégrade jour après jour. Le Gouvernement, en mai dernier, a mis un véritable « Plan Marshall » en route pour soutenir les acteurs du tourisme. Néanmoins, les parlementaires de tous bords – je pense par exemple à Mme Frédérique Lardet, avec qui j'ai travaillé au sein du groupe de travail sur le tourisme durant la crise de la covid – dénonçaient certains « trous dans la raquette » qui aujourd'hui n'ont pas été comblés. Certains acteurs du tourisme, dont l'activité se situe exclusivement dans des stations touristiques, ne sont pas éligibles au plan tourisme. Je pense aux commerces alimentaires dans les stations de sports d'hiver ou dans les stations balnéaires, ainsi qu'aux vendeurs de vêtements, de textiles, qui eux non plus, du fait de leur code NAF, ne sont pas éligibles. Ces commerçants ne comprennent pas qu'ils ne puissent pas bénéficier de ces aides, alors que des sommes très importantes sont annoncées.

Si nous devons nous projeter dans la saison prochaine, quelques annonces doivent être faites et quelques clarifications doivent être opérées pour que l'ensemble de ces acteurs puissent être prêts le moment venu. Je pense par exemple à l'éligibilité au chômage partiel pour les contrats saisonniers à venir. Plus tôt la communication sera effectuée, plus les opérateurs touristiques seront prêts à embaucher du personnel. Il est préférable qu'une partie du personnel soit au travail et que l'autre reçoive une compensation de l'État, plutôt que d'avoir un personnel au chômage.

Enfin, le sujet des centres de vacances, qu'ils soient situés à la montagne ou ailleurs, est extrêmement important. Ces centres de vacances attendent un geste fort du ministre de l'éducation nationale – je sais que ce n'est pas de votre ressort – pour inviter les jeunes à se déplacer, lorsque le confinement sera terminé, vers ces centres de vacances. Il s'agit d'un enjeu de survie pour ces structures.

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La santé du secteur du tourisme est préoccupante. Celui-ci est frappé de plein fouet par la crise sanitaire, qui en révèle les défauts structurels. En matière de tourisme, notre pays a certainement trop vécu sur ses acquis. Nous nous rassurons souvent en nous disant que la France est la première destination mondiale – et il faut qu'elle le reste – mais elle s'est laissé distancer dans sa capacité à capter des flux de clientèles nouvelles, elle perçoit des dépenses trop faibles par rapport à la durée du séjour, et elle enregistre des recettes touristiques trop concentrées dans l'espace et dans le temps (60 % des nuitées de touristes internationaux se concentrent dans quatre régions et deux mois de l'année).

Vous avez mis en route un plan qui a été qualifié par M. Vincent Rolland de « Plan Marshall » et qui est tout à fait nécessaire. Quand on voit l'ensemble des mesures, l'on se rend compte du côté transversal du tourisme, qui touche vraiment à tous les secteurs. C'est là que nous réalisons l'importance de cette filière. Vous avez parlé du premier plan de 18 milliards d'euros, mais il y aura également un plan à 50 millions, avec le volet « tourisme durable » du plan de relance.

Dans le cadre de ce plan de relance, vous avez pris la mesure des enjeux de la situation et souhaité répondre aux besoins de l'avenir. Je ne peux que saluer la mise en œuvre d'une opération comme les « 1 000 restaurants durables », qui met en valeur les activités de basse consommation carbone, de circuits courts, de recyclage de biodéchets dans les restaurants, d'autant que le ciblage des villes de moins de 20 000 habitants, en complément du plan « Action Cœur de ville », permettra de faire du tourisme un véritable levier de l'attractivité des territoires et de la revitalisation des centres-villes. Il restera évidemment à résoudre le problème dans les métropoles que vous avez évoqué tout à l'heure.

L'accompagnement de la transition écologique des solutions d'hébergement, avec l'accent mis sur les territoires ruraux, me semble également important, dans le sens où le tourisme de demain sera, à rebours du tourisme de masse, une quête d'authenticité, de durabilité et d'expérience.

Quel calendrier vous êtes-vous fixé, Monsieur le ministre ? Des décisions doivent être prises à court terme, et d'autres à plus long terme, mais il faudra tout de même agir assez vite.

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Les mesures de soutien au secteur touristique, qui sont extrêmement fortes, ont été mises en place au cœur de la crise sanitaire. Aujourd'hui, nous faisons face à une évolution et à une nouvelle donne sanitaire. Cela ne risque-t-il pas de rendre caduc ce plan de relance, ou en tout cas de rendre nécessaire qu'il soit complété ? Envisagez‑vous déjà le renforcement des dispositifs en raison de ce nouveau confinement, notamment pour éviter d'impacter une nouvelle fois le tourisme hivernal ?

J'adhère complètement aux propos de M. Vincent Rolland, et voudrais faire un complément au sujet des stations de ski. Vous avez été destinataire de propositions d'associations d'élus, de maires de stations et de DSF (Domaines skiables de France) au sujet d'un protocole sanitaire et d'un mode de fonctionnement pour la saison hivernale. Je sais que vous y êtes extrêmement attentif. Je voudrais vous demander votre soutien auprès du conseil des ministres afin de bénéficier d'une bienveillance particulière. Vous savez que la réactivité sera extrêmement importante pour réussir cette saison hivernale. Les professionnels sont animés d'une forte volonté et d'un grand sens des responsabilités pour permettre un fonctionnement optimal cette saison. Je ne rappellerai pas ici le poids du tourisme de montagne et d'hiver, puisque vous le connaissez parfaitement.

Enfin, j'insiste sur le fait que les centres de vacances sont extrêmement pénalisés et justifient une mesure particulière.

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Ma question porte sur les métiers d'art et l'artisanat en général, et notamment sur le tourisme de savoir-faire. Comme vous l'avez souligné, le tourisme en France ne s'est pas mal porté cet été ; les Français ont joué le jeu, ils sont restés et ont visité des régions. Mais le panier moyen n'était pas le même que celui d'un étranger. Le tourisme de savoir-faire, par exemple, attire chaque année 12 millions de touristes en France, parmi lesquels 10 % d'étrangers. Ces derniers ont manqué, et leur pouvoir d'achat a manqué. Beaucoup d'entreprises ont élaboré un plan financier autour du tourisme de savoir-faire, ont réalisé des investissements et accueillent énormément de touristes en leur sein, pour montrer leur savoir-faire, le faire découvrir et apprécier. Je pense à Fragonard, qui accueille plus d'un million de personnes ; à Molinard, à Grasse, qui attire des centaines de milliers de personnes ; à la verrerie de Biot, que vous connaissez ; ou encore, pour les gourmands, à Haribo, à Uzès.

Que fera l'État, que fera le Gouvernement pour soutenir ce tourisme de savoir-faire, tant par rapport aux Français, au travers d'une campagne de communication, peut-être, ou de l'attribution d'aides, que par rapport aux 10 % d'étrangers, dont il faut préparer le retour et espérer que leur nombre augmentera ? Une campagne de communication nationale et internationale pourrait être mise en œuvre.

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S'il est un secteur qui a payé un lourd tribut à la crise de la covid-19, c'est bien celui de l'industrie touristique. Certes, l'été a donné lieu à un rebond de la consommation domestique – ce dont il faut se féliciter –, les Français ayant privilégié la destination « France », mais cela s'est révélé insuffisant pour compenser l'effondrement de la fréquentation étrangère, des voyages d'affaires, et une avant-saison qui n'a pas pu véritablement avoir lieu.

Un manque de perspectives vient assombrir quelque peu le paysage. Les acteurs du tourisme savent d'ores et déjà qu'ils ne pourront compter ni sur l'automne, ni sur la saison d'hiver 2020-2021. Ils reposent donc presque exclusivement sur les dispositifs de soutien déployés par le Gouvernement, et ils sont nombreux à appeler au prolongement des aides publiques. Sur ce point, je tiens à saluer la prorogation du dispositif d'activité partielle, la prolongation du fonds de solidarité et la mise en œuvre d'aides mensuelles pouvant atteindre 10 000 euros, ainsi que l'exonération totale des cotisations sociales dues durant le confinement pour les entreprises du secteur du tourisme ayant subi une perte de 50 % de chiffre d'affaires. Concernant les prêts garantis par l'État, j'accueille très favorablement la possibilité d'étaler la durée d'amortissement jusqu'à cinq années supplémentaires et la possibilité d'avoir deux années de différé au lieu d'une. Cela permettra – et c'est important – aux entreprises de faire face plus facilement au mur de dettes qui s'annonce.

Deux questions restent toutefois en suspens selon moi. Où en sont les négociations sur la prise en charge des pertes d'exploitation par les assureurs ? Un nouveau moratoire sur les loyers est-il prévu ?

Enfin, en mai dernier, lors du CIT, vous avez acté dans la mesure 21 le principe d'une déclinaison territoriale du plan de relance du tourisme national. Quand peut-on espérer que soient mises en œuvre les feuilles de route sectorielles et territoriales ?

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Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État

La communauté des Français établis hors de France est une communauté très importante, qui compte plusieurs millions de personnes, et qui fut d'ailleurs la première à être exposée à la covid-19 – souvenez-vous de nos compatriotes qui se trouvaient à Wuhan, en Chine ! Cette communauté continue sur les cinq continents à être soumise à la pandémie et à ses conséquences économiques et sociales. Avec M. Jean-Yves Le Drian, et avec M. Gérald Darmanin à l'époque, nous avions souhaité mettre en place un plan de soutien massif de 220 millions d'euros portant sur trois actions.

La première action concerne le soutien médical et consiste en la mise en place d'avions disponibles 24 heures sur 24 pour des évacuations sanitaires pour des compatriotes se trouvant dans des pays dont l'infrastructure de santé ne permettait pas la prise en charge ; et en la mise en place de télémédecine et d'acheminement de matériels – ceci pour 20 millions d'euros.

La deuxième action concerne le réseau de l'enseignement français à l'étranger. Elle prévoit l'augmentation significative du budget des bourses scolaires (+50 millions d'euros, quand le budget habituel se monte à 100 millions d'euros) et la mise en place d'aides aux établissements au travers d'aides remboursables et d'aides aux familles étrangères (à hauteur de 50 millions d'euros). Ces mesures ont trouvé à s'appliquer ces derniers mois.

Enfin, la troisième action consiste en un dispositif d'aide sociale individuelle pour ceux qui se trouveraient dans des situations compliquées d'un point de vue économique et social. Nous avons, là aussi, instauré une subvention de 50 millions d'euros. Pour l'instant, une somme de 1,8 million d'euros seulement a été dépensée, mais il s'observe une dynamique très forte dans la croissance des bénéficiaires chaque semaine. À ce jour, près de 12 000 personnes ont bénéficié de cette subvention, dont 2 777 nouveaux bénéficiaires la semaine dernière. Le dispositif prend donc de l'ampleur.

Nous avons également veillé à pouvoir mieux doter en subventions un certain nombre d'associations de bienfaisance, les OLES (organismes locaux d'entraide et de solidarité), car ces structures associatives, qui comptent beaucoup de bénévoles qui se donnent avec cœur, soutiennent également nos compatriotes. C'est le cas de la Société française de bienfaisance à Beyrouth, par exemple, ville qui a été exposée à d'autres malheurs avec les explosions. Ce plan de soutien est en train de se déployer. Il a permis une forme de résilience des communautés françaises. Nous craignions que certains Français soient contraints de regagner leur pays – je dis « contraints » car, souvent, leur choix est de construire leur vie hors de France, tout en gardant ce lien avec le pays. Aujourd'hui, nous voyons quelques expatriations qui prennent fin, mais globalement, les communautés françaises sont très résilientes.

Cet été, le tourisme en montagne a bien fonctionné. Les Français étaient en quête de grands espaces et voulaient s'oxygéner. En matière d'accompagnement, les acteurs de la montagne ont été totalement concernés par les mesures de soutien économique. S'agissant des perspectives, c'est l'évolution de la situation sanitaire qui commande. Un point sera fait tous les quinze jours, comme l'a dit le Premier ministre, et c'est à cette occasion que nous pourrons regarder quelles sont les perspectives qui se dessinent.

J'ai bien conscience du poids des vacances de Noël dans le chiffre d'affaires des stations de ski (entre 10 et 15 %). Il est difficile de faire des déclarations définitives aujourd'hui. Je rejoins tout à fait les propos de Mme Marie-Noëlle Battistel sur le fait que les acteurs du tourisme de montagne se sont préparés très soigneusement et méticuleusement. Je l'ai vu en me rendant à la rencontre de DSF à Grenoble, en échangeant avec l'ANEM (association nationale des élus de montagne) Je sais ce qu'ils ont fait et j'espère que l'on pourra leur offrir des perspectives le moment venu, lorsque les conditions sanitaires le permettront.

C'est pourquoi un certain nombre de campagnes de promotion à destination des Européens, menées avec Atout France, ont été interrompues et reportées à une période où les conditions le permettront. À plus long terme, nous avons, notamment avec M. Joël Giraud et Mme Jacqueline Gourault, le souci de bien structurer un programme montagne au sein de l'ANCT (Agence nationale de la cohésion des territoires), afin d'avoir une véritable offre de service pour accompagner les acteurs touristiques de la montagne et d'avoir une vraie stratégie face au changement climatique qui les affecte. Avec France tourisme ingénierie et Atout France, nous avons commencé à travailler, à faire des expérimentations sur la modernisation de l'immobilier de loisir des stations. Il faut maintenant passer à l'échelle, et le programme « montagne » de l'ANCT sera tout à fait précieux de ce point de vue.

Nous veillons, dès que cela est possible, à intégrer certaines activités aux listes S1 et S1 bis, qui correspondent aux métiers et activités éligibles aux mesures du plan tourisme. Certains commerces ont pu y être ajoutés. Ce fut le cas par exemple des commerces de souvenirs religieux en août. Je prends en compte les demandes qui viennent d'être portées à ma connaissance sur ce sujet. Nous allons les étudier. C'est à chaque fois un petit combat au niveau interministériel pour réussir à faire entrer de nouvelles activités, mais les acteurs du tourisme savent qu'ils peuvent compter sur nous pour mener tous les combats. Il y en a que l'on perd, d'autres que l'on gagne, mais nous les menons quoi qu'il arrive.

S'agissant du chômage partiel, une clause de revoyure a été fixée au mois de décembre afin de discuter des suites du dispositif, comme le Premier ministre l'a annoncé. Je ne peux donc pas vous en dire plus aujourd'hui.

Les centres de vacances constituent un sujet de préoccupation commun avec le ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse. Nous avons poursuivi le dispositif des « vacances apprenantes » pendant les vacances de la Toussaint. Près de 50 000 jeunes ont pu partir, ce qui était tout à fait utile. Nous avons mobilisé 7 millions d'euros, en complément des programmes menés cet été, qui avaient déjà permis à 125 000 jeunes de partir en colonie. Le ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse, ainsi que le secrétariat d'État à la jeunesse, travaillent à mettre en place un certain nombre de dispositifs complémentaires pour aider ces acteurs à bénéficier d'un soutien pour passer ce cap compliqué.

La France occupe la première place du podium en matière de fréquentation, mais pas en matière de recettes touristiques. Je dis régulièrement qu'il faut arrêter de considérer que le tourisme est comme la « cueillette ». Nous sommes dans un monde de plus en plus compétitif, de nouvelles destinations ont émergé. Face à cela, nous devons nous réinventer ; nous devons être à la pointe de l'innovation, prendre en compte les évolutions des consommateurs. Pour augmenter le volet des recettes, nous avions déjà pris plusieurs mesures en matière de détaxe, car il s'agit de l'un des leviers permettant de faire en sorte que les visiteurs internationaux dépensent plus sur notre territoire. Hélas, ces mesures ont été percutées de plein fouet par la crise épidémique, et nous n'avons pas pu en voir les effets.

Je voudrais donner des précisions sur le calendrier des mesures visant à favoriser le tourisme durable. S'agissant de l'opération « 1 000 restaurants durables », qui vise à aider un certain nombre d'établissements en matière de tourisme durable, plusieurs appels à projets sont prévus, dont le premier sera lancé ce mois-ci. L'objectif est de sélectionner des structures ayant vocation à communiquer autour du dispositif pour rechercher des projets susceptibles d'être financés par le fonds. L'appel à projets pour les restaurants existants ou en création sera lancé en janvier 2021. Nous ne manquerons pas de vous tenir informés, car le dispositif peut concerner des établissements dont vous auriez connaissance et qui pourraient en bénéficier sur vos territoires.

Le renforcement des dispositifs a été évoqué. Comme je l'ai dit dans mon propos liminaire, nous avons le souci de nous adapter continuellement. Depuis le mois de mars, de nombreux dispositifs ont évolué en fonction des retours du terrain des acteurs du tourisme et en fonction de vos retours. Nous allons continuer à être vigilants.

Sur le protocole sanitaire, j'ai salué le travail mené par les acteurs de la montagne. En ce qui concerne les centres de vacances, je pense avoir donné une réponse à travers celle apportée à M. Vincent Rolland.

Le tourisme de savoir-faire donne à voir de petits joyaux aux touristes, à travers l'ouverture d'entreprises. 4 000 entreprises sont comptabilisées dans ce secteur, dont 2 000 qui ouvrent très régulièrement. Nous avons d'ailleurs soutenu la campagne de promotion lancée par Entreprise et Découverte cet été. Il y a quelques jours, nous avons également engagé un appel à projets avec la DGE (direction générale des entreprises), afin de doubler le nombre d'entreprises ouvertes au public d'ici cinq ans.

Par ailleurs, je voudrais signaler que les entreprises de savoir-faire ont été ajoutées aux listes S1 et S1 bis qui permettent d'être éligibles aux aides du tourisme. Cette demande provenait notamment de Grasse. L'ajout de ces entreprises figure dans le décret du 2 novembre 2020 relatif au fonds de solidarité. Nous continuerons à être aux côtés d'Entreprise et Découverte pour favoriser la visite d'entreprises à la française. Nous faisons également la promotion de ces visites d'entreprises dans le cadre de la semaine de l'industrie, qui est un rendez-vous rituel.

J'en viens aux pertes d'exploitation. La relation contractuelle, nous l'avons vu, n'est pas toujours très simple. Une partie des assurés ayant souscrit à la clause particulière ont pu obtenir des dédommagements, mais d'autres n'en ont pas obtenu. Les professionnels du tourisme m'ont fait part de leur souhait – et d'ailleurs ce n'est pas qu'un souhait, puisque cela s'est matérialisé – que soit mise en place une plateforme visant à abréger les contentieux. J'ai toujours dit aux assurances que leur contribution était attendue. Elles se sont engagées, dans le cadre du CIT du 14 mai, à réaliser un certain nombre d'investissements dans le secteur du tourisme. Nous sommes très vigilants à la réalisation de ces éléments. Les attentes des acteurs sont très fortes, ce que nous rappelons régulièrement aux assureurs.

En ce qui concerne les loyers, il est très compliqué de prendre une mesure uniforme, les bailleurs étant très différents. Certains sont de grandes structures, et pourraient d'ailleurs faire plus facilement des efforts que les retraités dont la location contribue à la retraite. C'est pourquoi nous avons mis en place ce dispositif de crédit d'impôt, pour inciter les bailleurs à faire des abandons ou des exonérations au profit de leurs locataires. Cela est dans leur intérêt car s'ils ne le font pas, ils risquent de se retrouver sans locataire. La situation est compliquée pour certains, même si le fonds de solidarité a été considérablement augmenté, passant de 1 500 à 10 000 euros, notamment pour éponger une partie des charges fixes. Le loyer n'est pas le même dans une ville moyenne, une grande ville, une métropole, ou dans un petit village ; mais le fonds de solidarité peut, dans beaucoup de situations, apporter une réponse. Il sera renforcé, je l'espère, par les bailleurs qui se saisiront du crédit d'impôt.

Je tiens beaucoup à la mesure 21 du CIT du 14 mai. Je l'ai fait ajouter à minuit la veille car il me semblait indispensable qu'il existe une déclinaison territoriale du plan de relance là où les territoires avaient le plus souffert. Les préfets ont procédé à un travail de qualité sur ces territoires. Il nous appartient, en central, d'apporter notre pierre à l'édifice et de mettre en place, sous forme de contrats avec ces territoires, un certain nombre de dispositions complémentaires pour apporter notre soutien. Je mentionnerai en exemple l'enjeu des saisonniers, qui est particulièrement marqué à Lourdes.

S'agissant des feuilles de route sectorielles, nous travaillons sur le rebond, en vue de 2021. Initialement, nous voulions que ce contrat de transformation de la filière se fasse d'ici la fin de l'année. Étant donné la période que nous vivons, les acteurs travaillent davantage au sauvetage dans un premier temps, ce que nous comprenons. Nous continuerons néanmoins à travailler en temps masqué sur la question du rebond.

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La situation sanitaire nous a obligés à remettre en place un confinement, qui est certes plus souple que le précédent mais qui a des conséquences sur bon nombre d'activités. Certains acteurs du secteur touristique voient leurs activités très lourdement impactées, voire rendues impossibles par les contraintes de mobilité. Je pense par exemple aux agences de voyages. Le secteur a bénéficié d'un plan de soutien spécifique, un plan très large et important, qui a été très utile, mais les activités touchées étaient déjà très lourdement impactées par le développement des plateformes numériques. La crise sanitaire a sans doute accéléré la nécessité pour certaines activités de se réinventer si elles veulent survivre.

Ma première question est relative à des recherches effectuées par une équipe du MIT ( Massachussetts Institute of Technology ), à Boston, qui fait remarquer que pour limiter la propagation de la covid-19, la plupart des politiques gouvernementales se sont concentrées sur la réduction de la distance parcourue. Cependant, en analysant les données de la mobilité des personnes, ces chercheurs ont découvert que la fréquence des déplacements – le nombre de déplacements réalisés par personne – était un facteur aussi important que la distance parcourue dans la progression de l'épidémie. Est-ce une donnée que vous allez prendre en compte pour réévaluer la politique gouvernementale en la matière ? Avez-vous connaissance de ces recherches ?

Quel accompagnement est-il prévu en matière d'ingénierie de projets et de financement pour la transformation de certains secteurs ? Là aussi, je pense aux agences de voyages.

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Dans les Alpes-Maritimes et la Côte d'Azur, le tourisme représente plus de 18 % du PIB, soit 10 points de plus qu'au niveau national. Cette année 2020 est et restera une annus horribilis. Le tourisme de congrès et d'événementiel s'affiche à zéro à Cannes, Nice, Antibes et Grasse. La tempête Alex a balayé les trois vallées qui permettent de monter vers nos stations de ski – car nous avons aussi des montagnes et des stations de ski dans les Alpes-Maritimes. La semaine dernière, comme vous le savez, la ville de Nice a été frappée par un terrible attentat. Nous cumulons tout ce que l'on ne pouvait imaginer, en l'espace de quelques mois. Les Alpes-Maritimes et la Côte d'Azur ont besoin d'une attention toute particulière, Monsieur le ministre. Je vous lance une invitation : les professionnels du tourisme seraient très heureux de vous accueillir.

Je voudrais vous sensibiliser sur un point bien particulier, qui est la défaillance des entreprises. Il s'agit d'une vraie crainte partagée par tous les professionnels. En Espagne, 35 % des entreprises de la filière HCR ont déjà mis la clé sous la porte. C'est à ce niveau que se situe l'urgence. Je voudrais vous soumettre trois pistes, qui m'ont été remontées par l'UMIH (Union des métiers et des industries de l'hôtellerie) des Alpes-Maritimes.

La première consisterait à réfléchir à un dispositif juridique permettant de suspendre provisoirement le temps judiciaire. Dans les jours et les semaines qui arrivent, il va y avoir des redressements judiciaires, des liquidations judiciaires et des procédures collectives. Si nous voulons éviter une défaillance massive des entreprises de la Côte d'Azur, et en particulier des Alpes-Maritimes, il faudrait travailler sur ce sujet.

Je pense sincèrement que le monde des assurances n'a pas joué et ne joue pas le jeu. Alors qu'en 2008 nous avions sauvé le monde de la finance – les banques et les assurances –, aujourd'hui les assurances ne jouent pas le jeu.

Enfin, la troisième piste consisterait à transformer les PGE en fonds propres. Un certain nombre d'entreprises de la filière du tourisme ne pourront pas rembourser les PGE. En Allemagne, une idée a été mise en œuvre, consistant à renforcer les fonds propres de ces entreprises. Transformer une partie des PGE en fonds propres permettrait d'avoir un acteur et un partenaire institutionnel dans la filière HCR.

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Ma question n'est pas directement liée à l'aéronautique, mais elle l'est un peu puisque Toulouse est le creuset de la fabrication d'un très bel objet, qui rend possible le tourisme en France métropolitaine, en Outre-mer et un peu partout dans le monde.

Les destinations ultramarines françaises figurent parmi les plus prisées au monde et constituent un atout considérable pour notre pays, qui jouit ainsi d'une présence territoriale répartie sur tout le globe, ainsi que d'un patrimoine exceptionnel. C'est la raison pour laquelle le tourisme occupe une place centrale dans les économies de l'Outre-mer. À lui seul, ce secteur représente en moyenne 10 % du PIB, contre 7 % seulement en métropole, et plusieurs dizaines de milliers d'emplois directs, notamment dans le transport aérien.

Or, comme toute la métropole, nos territoires d'Outre-mer sont également fortement touchés par la covid-19 ; depuis plusieurs mois, certains connaissent une situation critique. À l'approche des vacances de fin d'année, qui sont traditionnellement une période de forte affluence, cette crise fait peser un risque sur l'économie et la vitalité de ces territoires. Ceux-ci pourront-ils accueillir des touristes français et étrangers d'ici la fin de l'année ? Si oui, sous quelles conditions ? Vous nous avez dit tout à l'heure qu'un plan de soutien spécifique à la filière du tourisme en Outre-mer était envisagé. Que contiendra-t-il ?

La grande majorité des 88 États et gouvernements rassemblés au sein de l'OIF (Organisation internationale de la francophonie) paie un lourd tribut à la pandémie de coronavirus et affronte une terrible récession économique. Comment la mobilisation des institutions de la francophonie s'est-elle matérialisée ces derniers mois, notamment en matière de francophonie économique ? Quelles sont les priorités diplomatiques de la France vis-à-vis du monde francophone en cette période de crise ?

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Lors du CIT du 12 octobre 2020, vous avez affiché un plan de relance pour l'Outre-mer. Tout en vous félicitant pour l'action que vous menez, Monsieur le ministre, je ne vois pas trop de différenciation par rapport à ce qui est fait dans l'Hexagone. Le poids du tourisme dans l'économie locale ultramarine est essentiel. C'est pratiquement un effondrement qui s'observe. Dans l'Hexagone, il est possible de faire des transvasements touristiques de territoires en territoires, mais la plupart des territoires ultramarins sont des îles, à l'exception de la Guyane. Il y a donc une catastrophe en Polynésie, en Guadeloupe, à la Réunion, en Martinique. Quelles sont les mesures de différenciation de soutien que vous pourriez apporter à ces territoires, dans lesquels le poids du tourisme est beaucoup plus fort que sur le plan national ?

En ce qui concerne le PGE, je suis tout à fait d'accord avec la proposition qui a été formulée tout à l'heure. Les entreprises se remettent à niveau par un endettement, que vous le vouliez ou non, même si l'on reporte de deux ans et que l'on étale sur cinq ans. C'est toujours un remboursement. Ne peut-on pas trouver des solutions pour consolider ces entreprises ?

Enfin, s'il existe vraiment une ambition de différenciation, comment aborder la question non pas seulement des hôtels, qui ont besoin d'aide, mais aussi des métiers autour du tourisme ? Je rappelle que la consommation touristique s'élève à 173 milliards d'euros, ce qui est énorme. Quel type d'aide pourrions-nous mettre en place ? Ne peut-on pas passer par un effacement des dettes sociales et fiscales pendant une période donnée ? Cela a été fait en 2000 dans le cadre d'une grosse crise. C'est une piste intéressante pour relancer cette économie.

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Je représente une région très touristique, à savoir la région de Saint-Malo, Dinard et de leurs communes environnantes. Je voudrais vous parler du Royaume-Uni. Pensez-vous qu'un accord puisse être trouvé pour le Brexit ? Nous sommes à moins de deux mois de la date fatidique. Chez nous, beaucoup de citoyens britanniques sont propriétaires de résidences secondaires. À compter du 1er janvier 2021, ces citoyens ne pourront plus résider dans l'Union européenne au cours d'une période excédant 90 jours. Pour une zone touristique comme la nôtre, cela entraînerait des conséquences non négligeables sur le plan économique. Le Gouvernement prévoit-il de créer un statut spécial pour ces citoyens britanniques possédant une résidence secondaire en France, ou ceux-ci devront-ils écourter leur séjour sur notre territoire ?

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Selon une enquête réalisée par la chambre de commerce et d'industrie (CCI) et la chambre de métiers et de l'artisanat (CMA) de Seine-et-Marne auprès de 9 043 établissements du département, 52 % d'entre eux ont été concernés par une fermeture administrative durant le premier confinement. 70 % d'entre eux ont vu leur chiffre d'affaires diminuer. La Seine-et-Marne est la deuxième destination touristique d'Île-de-France après Paris. Le château de Champs-sur-Marne, par exemple, a enregistré une baisse importante du nombre de visiteurs.

Ce deuxième confinement est un nouveau coup dur pour le secteur du tourisme seine‑et-marnais. Comment l'État peut-il travailler avec le département et les communes pour apporter des aides spécifiques au secteur du tourisme ?

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Je souhaiterais vous alerter sur la situation préoccupante des agences de voyages, et notamment des agences indépendantes, puisque nombre des chefs d'entreprise risquent d'engager sous peu leurs biens personnels.

La plupart des frontières étant fermées, les voyages sont annulés. Aujourd'hui, les agences de voyages doivent en conséquence rembourser les avances payées par leurs clients. Or, elles n'ont plus forcément la trésorerie le permettant, surtout après huit mois avec un chiffre d'affaires égal à zéro. Si elles n'arrivent pas à rembourser, leurs assurances, comme l'APST (Association professionnelle de solidarité du tourisme), se chargeront certes de rembourser les clients, mais viendront ensuite récupérer les sommes déboursées sur les biens personnels des gérants, en activant les contre-garanties personnelles, dans la mesure où ils ne pourront pas justifier d'un cas de force majeure, l'épidémie de la covid-19 n'étant pas reconnue comme telle.

Il est inadmissible que l'on vienne chercher les biens personnels de personnes dont la seule faute est d'avoir entrepris en France. Étant donné la gravité et l'urgence de la situation, il est nécessaire que l'État intervienne auprès de l'APST ainsi qu'auprès des autres assureurs, pour garantir qu'ils n'engageront pas la responsabilité des gérants d'agences de voyages en l'absence de faute de gestion. Pouvez-vous nous assurer, Monsieur le ministre, que les agences de voyages qui n'ont pas la trésorerie suffisante pour rembourser les avances payées de leurs clients, ne verront pas engagée la responsabilité personnelle de leurs gérants ?

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Je voudrais alerter au sujet de la situation des agences de voyages, sachant qu'une nouvelle vague de la covid risque d'impacter de manière dramatique nos entreprises. Des mesures ont déjà été annoncées, mais elles doivent aller plus loin. Le Gouvernement doit avoir un plan massif de soutien pour accompagner ce secteur d'activité, car malheureusement une reprise franche ne se fera pas avant plusieurs mois. Disposant d'un vrai maillage sur le territoire, l'impact économique de la disparition de ces agences est catastrophique pour notre pays. Il en va de même pour toutes les entreprises, hôtels, restaurants, parcs, transporteurs, emplois, saisonniers, musées, qui vivent du tourisme et qui sont aussi durement touchés en cette période.

Pour soutenir les agences de voyages et sauver les emplois, il est urgent de maintenir le chômage à 100 % pour les personnels, au moins pour le premier trimestre 2021. Monsieur le ministre, pourriez-vous vous y engager ?

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Je vous avais interpellé au mois de juin, et vous m'aviez fait à l'oral une réponse bienveillante, mais je voudrais connaître les suites de la prise en compte de tous les acteurs de l'agritourisme, secteur qui a souvent été exclu des aides publiques car les entreprises concernées ne remplissaient souvent pas le critère de 80 % de pertes de chiffre d'affaires. Existe-t-il des mesures spécifiques ? Quelle prise en compte est-elle prévue ? Quels sont les moyens pour accorder des aides publiques à ces acteurs souvent dispersés, pour qui le tourisme et l'accueil des publics sont une activité secondaire ?

Vous avez évoqué – et je vous en remercie – la création d'un fonds de transition du tourisme vers le slow tourism, le tourisme équitable, le tourisme à forte dimension humaniste et humaine. Pouvez-vous nous préciser, au-delà du montant annoncé tout à l'heure, quelles sont les modalités de mise en œuvre de ce fonds de transition du tourisme, qui pourrait être positionné idéalement pour l'été prochain et les années qui viennent ? S'agit-il d'appels à projets ou d'autres procédures de financement ? Pouvez-vous nous le détailler et nous dire quels seront les interlocuteurs privilégiés sur le territoire ?

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Dans le Finistère, j'ai rencontré un acteur du tourisme social qui possède 11 centres d'hébergement. Il était très satisfait des mesures proposées dès le printemps. Il a bénéficié du chômage partiel, d'un PGE, et cela l'a aidé à passer l'été avec un taux de remplissage de 70 %. Il a également participé au dispositif des « colonies apprenantes », qui ont bien fonctionné, en toute sécurité. Aujourd'hui, il se demande s'il ne serait pas souhaitable, dans le contexte actuel, d'ouvrir les classes « découverte », les classes de mer, qui sont bénéfiques pour le tourisme mais surtout pour les élèves, car elles leur permettent de s'aérer, tout en déchargeant des classes.

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Dans le tourisme rural, il y a énormément de petites structures touristiques, et d'autres, liées à la restauration ou à l'activité culturelle, qui n'ont pas connu ce rebond d'activité dont nous avons parlé tout à l'heure, surtout lorsqu'elles sont éloignées des côtes ou des grands lieux touristiques.

Pour pouvoir survivre et faire venir des touristes chez elles, ces petites structures touristiques doivent avoir affaire à leurs offices de tourisme, qui sont toujours financés par des fonds publics. Et à chaque fois elles doivent payer. Si elles doivent solliciter dix offices de tourisme, elles doivent payer dix fois.

Enfin, le plan de relance comporte des aides pour les investissements, mais comment financer et tout au moins rembourser un financement lorsque l'on a des difficultés ? Cela a été dit, mais j'insiste : quand ils feront face à des difficultés, certains ne pourront pas rembourser les prêts garantis par l'État.

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Je suis élu du secteur de Colmar, ville de 70 000 habitants qui accueillait à Noël plus d'un million de visiteurs, et 4 millions sur toute l'année, ce qui constitue un ratio par rapport au nombre d'habitants dix fois supérieur à celui de Paris. Nous sommes donc très touchés par la situation actuelle.

Plusieurs « trous dans la raquette » subsistent, dont celui du fonds de garantie qui emporte une caution, y compris sur les biens personnels des entreprises, ce qui évidemment pose un problème. Les dirigeants mandataires et non-salariés ne perçoivent aucun soutien depuis le mois de mars et sont en situation difficile. Les commerces qui vendent des souvenirs mais qui ne vendent pas d'objets religieux, ou qui vendent des produits alimentaires comme le foie gras, des produits du terroir, ont très peu de clients en raison du confinement et ne sont pas éligibles au dispositif de 10 000 euros mais uniquement à celui de 1 500 euros, ce qui n'est évidemment pas suffisant pour eux.

Enfin, pour les entreprises qui perçoivent des aides lorsqu'elles enregistrent un chiffre d'affaires inférieur à 50 000 euros sur l'année n-1, y compris la rémunération du dirigeant, est-il possible de faire sauter le plafond des 60 000 euros de bénéfices pour obtenir des aides du fonds de solidarité ?

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Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État

Dès que le premier confinement a été décrété, en mars, nous avons vu que les agences de voyages étaient massivement exposées. Il fallait déjà gérer le retour de 300 000 Français bloqués hors de France, toutes les frontières ayant été fermées. Plusieurs agences ont dû faire face à cela, et nous avons dû aider à rapatrier un certain nombre de personnes.

Ensuite, nous avons constaté que de très nombreux voyages avaient été programmés pour les mois à venir, et que la mise en œuvre de la directive européenne qui imposait le remboursement immédiat aurait entraîné une faillite générale, les agences n'étant pas en mesure de procéder de façon immédiate à de tels remboursements. C'est pourquoi nous avons mis en place le dispositif des avoirs, que vous avez voté au printemps. Ces avoirs ont pu être délivrés jusqu'au 15 septembre dernier, et c'est cette disposition, je crois, qui a permis de passer le cap et d'assurer le maintien des agences de voyages. Il est vrai que la situation actuelle demeure très préoccupante. Souvent, les agences ont dû maintenir quelques ressources humaines pour gérer les contrats, les reports, etc., sans enregistrer de recettes. Nous travaillons au quotidien avec « Entreprises du Voyage », avec son président M. Jean-Pierre Mas et sa déléguée générale Mme Valérie Boned, qui préside, par ailleurs, une commission dans le cadre du comité de filière Tourisme. Ce travail est très fluide. Nous allons encore nous montrer très vigilants.

Mme Typhanie Degois a évoqué l'APST, l'une des institutions qui permettent de garantir les charges des agences. Nous avons un œil très attentif car, à la suite de la défaillance de Thomas Cook, l'APST elle-même s'est trouvée très sollicitée. C'est pourquoi nous conduisons un travail chaque semaine avec cette association. Je salue l'action de sa présidente, qui a fait en sorte de céder le siège social pour faire entrer de l'argent et pouvoir faire face à un certain nombre de dépenses. J'ai entendu le cri du cœur lancé par plusieurs entrepreneurs sur les garanties personnelles. Le message est reçu, nous serons très attentifs à cela.

S'agissant de l'activité partielle, nous restons dans le cadre général ; le dispositif a été reconduit jusqu'au 31 décembre 2020 pour le secteur du tourisme, avec une clause de revoyure en décembre. Compte tenu de la situation, à mon sens, ce sujet devra faire l'objet d'un travail interministériel. Je ne vois pas comment nous pourrions éviter la poursuite d'un certain nombre de dispositifs. Il faudra voir quels outils nous utilisons, mais un soutien dans la durée sera nécessaire, et nous sommes crédibles en l'évoquant, compte tenu du soutien déployé depuis le mois de mars.

En ce qui concerne la situation sur la Côte d'Azur, nous avons vu combien la région avait été impactée par l'annulation d'un grand nombre d'événements, de congrès, de salons, y compris en septembre, alors que la reprise pouvait poindre. Nous travaillons avec la région Sud, avec M. Renaud Muselier – je parlerai d'ailleurs ultérieurement de ce travail partenarial avec les collectivités locales.

A été évoquée la transformation en fonds propres des PGE. Nous avons le souhait d'éviter le mur de la dette – d'où le différé de deux ans, l'étalement jusqu'à cinq ans des remboursements. Outre le PGE, nous avons mis en place d'autres outils, comme le prêt tourisme, qui présente l'intérêt d'avoir un différé de deux ans et une maturité pouvant aller jusqu'à dix ou douze ans. J'en parle parce que cette audition peut être l'occasion de mieux faire connaître ce dispositif. Nous avons engagé 1 milliard d'euros sur le prêt tourisme, dont 300 millions ont déjà été consommés, et nous espérons avec Bpifrance atteindre les 500 millions à la fin de l'année. Une maturité de dix ans peut constituer une vraie réponse. Nous avons mis en place d'autres dispositifs de renforcement des fonds propres, qui trouveront à mon avis à s'appliquer.

Sur les assurances, les acteurs ont une attente très forte et relativement fondée.

S'agissant des Outre-mer, j'aimerais mentionner quelques chiffres éloquents. Les territoires d'Outre-mer ont bénéficié des dispositifs de soutien. Au titre du PGE, près de 400 millions d'euros ont été accordés, pour un montant moyen de 180 000 euros par entreprise, ce qui est très supérieur au montant moyen constaté en métropole, qui se situe entre 95 000 et 100 000 euros. Les PGE Outre-mer représentent environ 4 % du total national. Le volet 1 du fonds de solidarité s'est monté à environ 35 millions d'euros, pour 23 000 entreprises en Outre‑mer. Si l'on ajoute au secteur « hébergement et restauration » celui des activités récréatives et culturelles, nous montons à 45 millions d'euros.

Par ailleurs, près de 100 000 salariés ont été pris en compte dans le dispositif de chômage partiel, pour 8,7 millions d'heures chômées. Les dispositifs ont donc trouvé à s'appliquer, mais notre souhait est d'aller plus loin ; c'est pourquoi nous avons récupéré les projets de feuilles de route élaborées dans les différents territoires, la situation étant très différente d'un bassin à l'autre (Polynésie, océan Indien,Antilles-Guyane). Il faudra que l'on travaille sur des contrats avec chaque territoire, avec des ajustements qui ne seront pas identiques, au regard des spécificités.

La francophonie s'est mobilisée pendant cette période de la covid. Une plateforme collaborative, « Solidarité covid-19 », a été mise en place par l'OIF. Elle a permis de faire connaître les projets innovants. Près de 200 projets y ont été mis en ligne : par exemple, sur des techniques pour réussir à fabriquer des respirateurs. Cette plateforme de partage a si bien fonctionné que l'OIF a décidé de la pérenniser. Un travail a également été initié sur la continuité pédagogique, entre l'OIF, le ministère français de l'éducation mais aussi d'autres ministères de l'éducation, afin d'établir une déclinaison francophone du dispositif « ma classe à la maison ».

Par ailleurs, un certain nombre d'opérateurs de la francophonie ont mis en place leur propre projet. L'Agence universitaire de la francophonie a lancé un appel à projets international pour soutenir les initiatives d'étudiants et de jeunes chercheurs liées à la pandémie. L'Association internationale des maires francophones a mis en place un fonds d'urgence en soutien à des villes.

La stratégie économique, qui datait de 2014, est en train d'être actualisée et sera discutée lors de la prochaine conférence ministérielle de la francophonie à la fin du mois. L'idée est de pouvoir recentrer l'activité de l'OIF sur ses actions à forte valeur ajoutée en matière d'économie. La francophonie économique est un secteur dans lequel il y a encore beaucoup à faire. Nous sommes en deçà du potentiel, par rapport à l'espace économique que représente l'ensemble des pays membres de l'organisation. Je sais qu'une structuration du réseau des patronats est en train de se faire, qu'une plateforme de mise en relation des entrepreneurs, innovateurs et investisseurs, est en cours de réflexion. Tout cela progresse grâce à la dynamique de la secrétaire générale de l'OIF, Mme Louise Mushikiwabo.

Il m'est difficile de m'exprimer sur le Royaume-Uni car nous sommes dans le « money time ». Vous avez suivi tous les épisodes. La situation est très volatile. Je me garderai bien de faire des prévisions sur le contenu d'un accord, sur la possibilité même de l'accord, car cela reste toujours très complexe, même si l'échéance se rapproche. Je prends bien note de votre préoccupation liée au statut des Britanniques ayant une résidence secondaire en France. Nous allons creuser ce point. Nous avons déjà ressenti une moindre présence de cette clientèle britannique sur nos territoires cet été. Cela était surtout lié à la pandémie, mais l'impact a été très fort pour certains établissements bretons. s.

Depuis le début de la pandémie, un travail a été mené avec les départements, les communes, les territoires. J'ai d'ailleurs souhaité qu'au sein du comité de filière Tourisme, une vice-présidence soit confiée aux territoires à travers Mme Marie-Reine Fischer, qui est elle‑même vice-présidente d'ADN Tourisme, qui fédère les offices de tourisme, les comités départementaux de tourisme, les comités régionaux de tourisme. Mme Marie-Reine Fischer participait toutes les semaines à nos travaux au sein de l'équipe de direction. Nous avons très bien travaillé pour mettre en place, avec les régions volontaires, des chèques-vacances pour lesquels l'État abondait l'effort réalisé par les régions. Un certain nombre de départements ont pris des initiatives pour mettre en place des séjours pour les soignants, ou pour des publics ayant des difficultés à partir en vacances. Nous avons bien fonctionné tous ensemble.

Par ailleurs, il va de soi que les fermes pédagogiques ou les fermes-auberges entrent pleinement dans le secteur du tourisme. Il faut s'assurer que les listes S1 et S1 bis les prennent en compte. Aucun dossier concret ne m'a été remonté. Quand les gens ne sont pas pris en compte, d'habitude, j'en entends parler de façon directe ou indirecte. Si certains d'entre vous entendent parler de problèmes sur leurs territoires, qu'ils n'hésitent pas à m'en parler pour que l'on puisse trouver les meilleures solutions. Nous allons surtout nous assurer qu'ils sont bien pris en compte dans les listes S1 et S1 bis.

S'agissant du fonds « tourisme durable », c'est l'ADEME qui est chargée de décliner et de porter le projet. Nous sommes en train de lancer l'appel à projets sur le volet « restaurants ». Cela se fera dans les prochaines semaines. Je propose que nous communiquions auprès de vous par mail au fur et à mesure que les appels à projets se lancent, afin que vous en ayez connaissance et que vous puissiez inciter des entreprises que vous connaîtriez et qui pourraient être intéressées.

Je suis très attaché au dispositif des classes « découverte ». Naturellement, nous avons des difficultés à avoir de la visibilité en raison de la situation sanitaire. Je plaide auprès de M. Jean-Michel Blanquer pour que, le moment venu, il puisse passer un message fort. Il est acquis à la cause, lui aussi, mais parfois les décisions des rectorats ou des départements ne sont pas dans l'esprit de l'engagement du ministre de l'éducation nationale. Ce hiatus est un peu dommage. Sa parole doit être forte urbi et orbi, car c'est sa conviction intime.

J'insiste sur les outils particuliers mis en place pour le tourisme. Le prêt tourisme peut être une solution ; c'est un outil financier à utiliser. Il ne faut pas hésiter à faire en sorte que les porteurs de projets éventuels que vous connaîtriez se rendent sur la plateforme plantourisme.fr et se rapprochent de Bpifrance, parce que nous pourrons leur donner toute la palette des différents outils mis en place, parfois avec les régions d'ailleurs, pour leur apporter des réponses financières ou des réponses en matière d'investissement.

La situation de Colmar a été évoquée. Cette ville a fait l'objet d'une enquête il y a peu dans un grand journal du soir. Il y a quelques mois, nous nous préoccupions d'un éventuel « sur-tourisme » ici et là, et aujourd'hui nous touchons du doigt les dangers du « sous-tourisme », avec tout l'impact que cela entraîne sur nos territoires.

La mesure stipulant que les entreprises ayant enregistré plus de 60 000 euros de bénéfices ne pouvaient pas entrer dans le fonds de solidarité a été supprimée. Davantage d'entreprises peuvent donc y entrer, parmi lesquelles des agences de voyages. Le nouveau décret en tient compte.

En ce qui concerne les dirigeants mandataires non-salariés, nous allons regarder de près ce qu'il en est.

Puisque le tourisme d'affaires a été évoqué, j'ajouterai que nous avons un groupe consacré au sujet, avec un certain nombre d'acteurs, afin de préparer la reprise, avec l'objectif de faciliter la reprise des salons professionnels le moment venu. Les salons grand public, en revanche, ne pourront se tenir que dans un second temps. Nous devons être attentifs et contrer la concurrence de certains voisins qui restent très dynamiques. S'agissant des salons professionnels, nous avons des actions à mener pour être au rendez-vous le moment venu.

Les perspectives sont difficiles à tracer dans le temps. Tout dépend du reflux de l'épidémie, de cette deuxième vague. Je constate qu'il y a eu une forte résilience pendant la première vague. Nous ferons tout pour que cette résilience soit encore au rendez-vous. Nous avons besoin de préserver les talents, les emplois, les entreprises, parce que si nous étions sur la première place du podium – même si c'est en fréquentation et non en recettes – c'est grâce à l'engagement de ces territoires, de ces salariés et de ces entreprises.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous avons plus que jamais besoin d'engagement pour soutenir le secteur du tourisme et lui donner des perspectives, et espérer passer cette période difficile avec l'espoir d'en sortir avec des perspectives positives. Je vous remercie, Monsieur le ministre, et vous souhaite bon courage.

Informations relatives à la commission

La commission a créé un groupe de travail transpartisan sur les conséquences économiques du confinement, comportant un membre de chaque groupe et conduit par MM. Stéphane Travert (LaREM) et Julien Dive (LR). Sont nommés membres de ce groupe : MM. Stéphane Travert (LaREM), Julien Dive (LR), Philippe Bolo (MoDem), Dominique Potier (Soc), Philippe Huppé (Agir ensemble), Thierry Benoit (UDI-I), Mmes Sylva Pinel (L et T), Bénédicte Taurine (LFI) et M. Sébastien Jumel (GDR).

Mme Anne Blanc a été nommée rapporteure chargée des pétitions renvoyée à la commission des affaires économiques, en application de l'article 148 du règlement de l'Assemblée nationale.