Avec le reconfinement d'octobre, l'État a immédiatement réactivé les dispositifs de soutien définis au printemps. Il les a aussi renforcés significativement, notamment en augmentant les indemnisations du Fonds de solidarité. Elles ont ainsi été revalorisées jusqu'à un plafond de 10 000 €, dans un premier temps, puis jusqu'à 20 % du chiffre d'affaires un mois plus tard. Il a par ailleurs créé de nouveaux fonds de soutien sectoriels pour les filières culturelles, les plus touchées par la longueur de leur mise à l'arrêt. Les aides budgétaires de l'État sont alors montées à une moyenne de 15 milliards d'euros par mois de confinement.
Tous les professionnels auditionnés par notre groupe de suivi ont salué le volontarisme du Gouvernement et l'ampleur inédite de son soutien. Malgré tout, des inquiétudes demeuraient en fin d'année sur la durabilité des aides nationales et sur les difficultés particulières rencontrées par certaines filières ou certaines entreprises.
En annonçant l'abaissement du couvre-feu le 14 janvier, le Gouvernement a également apporté plusieurs réponses à ces préoccupations.
D'abord, en étendant aux entreprises du secteur S1 bis qui subissent une perte d'au moins 70 % de leur chiffre d'affaires mensuel la possibilité d'être indemnisées à hauteur de 20 % de ce même chiffre d'affaires, et en prévoyant un complément jusqu'à 70 % des coûts fixes pour les entreprises au chiffre d'affaires supérieur à 1 million d'euros, les nouvelles aides du Fonds de solidarité couvrent une plus grande partie, et souvent la totalité, des charges fixes incompressibles de ces entreprises, dont les loyers.
Le Gouvernement a par ailleurs levé, pour les plus importantes des aides du Fonds, la limite de taille qui les réservait jusqu'à présent aux entreprises de moins de 50 salariés.
Il a enfin ouvert un droit à différer d'une deuxième année le remboursement des prêts garantis par l'État. Selon les filières rencontrées en effet, nombre de leurs entrepreneurs redoutaient l'approche des premières échéances, prévues dès ce printemps.
Plus fondamentalement encore, le Gouvernement a donné l'assurance que ses aides seront maintenues le temps de la crise.
Néanmoins, si ces évolutions représentent une étape suplémentaire dans l'engagement de l'État au secours des entreprises françaises, nous constatons que certaines problématiques continuent à peser sur leur survie ou leur future relance.
Nous relevons ainsi qu'un certain nombre d'entreprises se sont retrouvées avec des stocks d'invendus qu'elles n'ont pas toujours réussi à valoriser. Ces stocks ont non seulement immobilisé une part importante de leur trésorerie, mais aussi supporté les prélèvements de TVA correspondant, sans que les aides existantes ne permettent de couvrir ces frais. Laisser ce problème sans solution découragera les entreprises ayant besoin de stocks importants de refaire leurs réserves en temps voulu, au risque de tarder à retrouver une activité quand les restrictions seront levées.
Ce sujet soulève également la question des délais de paiement aux fournisseurs. S'il est inenvisageable d'accorder un moratoire de droit ou d'accélérer les règlements entre des acteurs privés fragilisés par la crise, nous suggérons en revanche de réfléchir à une accélération des paiements des collectivités territoriales, voire à des avances sur facture.
Nous rappelons aussi que les entreprises attendent un soutien plus important des commandes publiques, en particulier dans le cadre de projets de construction.
Une autre difficulté vient de la composition des listes d'activités S1 et S1 bis ouvrant droit au Fonds de solidarité. Même si elles ont été progressivement complétées, de nombreux professionnels déplorent encore qu'elles n'aient pas le niveau de finesse suffisant pour identifier tous les cas qui justifieraient un accompagnement par l'État. C'est notamment lié aux catégories statistiques utilisées (les codes NAF et APE), parfois inadaptées – comme le monde des forains nous l'a signalé plusieurs fois –, trop floues ou trop restrictives, ou difficiles à interpréter. Certaines filières sont ainsi écartées d'emblée des aides, d'autres ont été difficiles à classer (commes les métiers des forains encore), etc.
Nous nous interrogeons en conséquence sur la pertinence de ces références et, plus fondamentalement, sur le principe-même d'une liste S1 bis énumérant limitativement les « secteurs liés », car elle ne peut raisonnablement recenser toute la diversité des situations. Aussi, nous suggérons d'évaluer l'alternative que serait un accès aux aides se fondant sur la seule démonstration d'un niveau minimal de perte de chiffre d'affaires et de lien commercial avec l'un des secteurs de la liste S1, sans lister explicitement les filières concernées.
Enfin, nous soulignons l'impasse dans laquelle vont se retrouver les secteurs qui connaissent un décalage important entre la reprise du travail et la rentrée de leurs recettes, quand viendra le temps de la relance. C'est le cas des filières de l'événementiel, des scènes privées et des spectacles musicaux, que nous avons auditionnées en janvier. En relançant l'organisation d'événements et la préparation de spectacles, leurs entreprises perdront notamment la prise en charge des salaires au titre de l'activité partielle, alors qu'elles ne généreront toujours aucun revenu. En outre, supportant un arrêt presque total de leurs activités depuis le début de la crise, elles n'ont plus les moyens d'investir pour préparer leurs reprises.
Il existe certes des crédits d'impôt spécifiques ; mais ils n'interviennent que bien après et les professionnels demandent que leur dispositif soit amélioré.
Dans la mesure où la prise de risque est beaucoup plus élevée en cette période de crise, il nous semblerait en effet opportun de revoir ces crédits d'impôt.
Nous invitons surtout le Gouvernement à réfléchir à un accompagnement particulier pour ces métiers, afin de les aider à investir au bon moment dans leur relance, mais aussi de les soutenir jusqu'à ce qu'ils retrouvent une rentabilité viable.
C'était le dernier point que nous tenions à souligner pour conclure l'ensemble des travaux que nous avons menés. Il serait en effet prématuré de réfléchir à des mesures de relance plus ambitieuses.
Nous vous remercions pour avoir participé à ces travaux. Nous remercions aussi les collègues qui nous ont suggéré certaines thématiques, comme le tourisme de montagne qui est à l'arrêt.