Intervention de Graziella Melchior

Réunion du mercredi 10 février 2021 à 9h30
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGraziella Melchior :

LaREM). Le gaspillage alimentaire est une aberration économique, écologique et sociale. C'est vous, Monsieur le rapporteur, qui avez commencé la croisade législative contre ce fléau, avec la loi du 11 février 2016. Fondement et cadre cohérent d'une véritable politique publique antigaspillage, elle est encore saluée par tous les acteurs de l'alimentation, de la distribution et de l'aide alimentaire. Elle introduit une hiérarchie qui va de la prévention du gaspillage alimentaire à la valorisation énergétique ; elle interdit surtout la destruction des invendus consommables et oblige la grande distribution à les donner à des associations d'aide alimentaire. En 2018, la loi EGALIM a étendu les dispositions de ce texte au secteur de la restauration collective et aux industries agroalimentaires.

J'ai ensuite eu le plaisir de mener avec vous une mission d'évaluation de cette loi, dont nous avons rendu les conclusions en juin 2019. Plusieurs recommandations ont alors pu trouver leur place dans la loi AGEC : renforcement des sanctions pour destruction d'invendus, création d'un label national antigaspillage. Les parlementaires se sont donc bien emparés de la lutte contre le gaspillage, lorsqu'un véhicule législatif le permettait. Le groupe LaREM est donc favorable à l'objectif auquel cette proposition de loi entend répondre : franchir une nouvelle étape contre le gaspillage alimentaire.

Vous proposez tout d'abord de faire de la lutte contre ce fléau une grande cause nationale. Bien que l'attribution de ce label ne se fasse que par voie réglementaire, l'objectif est louable car cela permettrait de passer des messages forts au niveau national. Nous partageons aussi l'idée d'une plus forte éducation contre le gaspillage alimentaire dans les enseignements scolaires. Cela rejoint une des propositions de la Convention citoyenne pour le climat, englobée dans une sensibilisation à l'éco-responsabilité.

Votre proposition de créer, toujours dans un objectif de sensibilisation, une prime à l'assiette vide pour les étudiants nous laisse en revanche perplexes. En effet, dans le contexte de précarité actuelle, alors que les centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (CROUS) proposent aux étudiants des repas à un euro, l'idée ne nous semble pas bienvenue.

Par ailleurs, des études ont montré qu'un tiers du gaspillage alimentaire provient des particuliers. En raison d'une confusion entre la DLC et la DDM, ils jettent trop tôt des denrées encore consommables. Il est important de mesurer l'impact de ces dates sur le gaspillage.

Lors de la préparation de notre rapport d'évaluation, les associations nous avaient signalé une baisse de la qualité des dons. Ce sujet a été pris en considération dans la loi EGALIM, puis dans la loi AGEC, mais il faut vérifier l'application des contrôles par les opérateurs. Il y a certes une avancée, mais est-elle suffisante ? C'est une question que l'on a raison de se poser.

La France s'est fixée pour objectif de réduire de moitié le gaspillage alimentaire à l'horizon 2025, mais cela n'a de sens que si nous avons des instruments de mesures adéquats et correspondant aux exigences attendues au niveau européen. La mesure est importante et il faut qu'on s'y attarde.

Monsieur le rapporteur, vous plaidez pour la création d'un fonds national de lutte contre le gaspillage alimentaire. Cela était sans doute prégnant quand les aides étaient réduites et le gaspillage mal identifié. Or la crise sanitaire est passée par là et le plan France Relance a permis d'assurer une plus grande solidarité. Les 260 millions d'euros consacrés à l'aide alimentaire, aux plans alimentaires territoriaux, aux équipements des cantines rurales contribuent en partie à la lutte contre le gaspillage alimentaire. Irriguer directement les territoires semble mieux répondre aux besoins locaux.

Enfin, nous sommes conscients qu'il est utile d'aider les personnes qui n'en ont pas les moyens à découvrir une alimentation saine et durable. Toutefois, le 14 décembre dernier, le Président de la République a annoncé la création d'un chèque alimentaire. Son mécanisme, élaboré par des députés La République en marcheMarche, est plus abouti et sera prochainement dévoilé.

En conclusion, bien que le groupe LaREM ait quelques divergences sur certaines des dispositions du texte, il reste favorable à son adoption. Cette proposition de loi permettra de remobiliser tous les acteurs et d'aller plus loin dans la lutte contre le gaspillage alimentaire.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.