Intervention de Julien Dive

Réunion du mercredi 10 février 2021 à 9h30
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJulien Dive :

Monsieur le rapporteur, votre proposition de loi fait tristement écho à l'actualité. Les chaînes d'information ont récemment diffusé des reportages sur les files d'attente composées de centaines d'étudiants venus récupérer les colis alimentaires distribués par des associations, ces colis étant constitués de nourritures invendues. La précarité alimentaire s'est accrue durant la crise sanitaire et la lutte contre le gaspillage alimentaire doit être renforcée.

La prise de conscience concerne aussi bien les consommateurs que les distributeurs. Toutefois, les mesures sanitaires provoquent une accumulation des pertes alimentaires. La fermeture des restaurants provoque ainsi un surstockage de certaines denrées – par exemple la pomme de terre – et, malgré la bonne volonté des associations soucieuses de les récupérer, il faut du temps pour créer une synergie entre les différents acteurs et les associations. L'État avait pris du retard dans la lutte contre le gaspillage alimentaire, lequel représente pourtant un triple non-sens : écologique, puisqu'il est émetteur de gaz à effet de serre – 15,5 millions de tonnes de dioxyde de carbone par an, soit 3 % des émissions de gaz à effet de serre de la France, selon l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME)  ; social, puisque 10 millions de tonnes de nourriture sont jetées chaque année ; économique, enfin, puisque ces denrées jetées par la fenêtre représentent une perte de 16 milliards d'euros.

Pendant des années le gaspillage alimentaire a été attribué au seul comportement des consommateurs, à tort puisqu'il concerne l'ensemble des acteurs de la filière de l'alimentation. Sur les 10 millions de tonnes alimentaires gaspillées chaque année en France, 33 % le sont lors de la phase de la consommation, 32 % pendant la phase de la production, c'est-à-dire au plus près du champ, 21 % lors de la transformation et 14 % lors de la distribution. C'est à tous ces niveaux que le législateur doit agir pour faire cesser cette absurdité.

Les associations telles que les Restos du Cœur ou la Banque alimentaire ont souvent pallié l'inefficacité de l'État en matière de précarité et de gaspillage alimentaires. Mais cela ne sera pas suffisant s'il n'y a pas un accompagnement, s'il n'y a pas des mesures permettant de faciliter le travail de toutes ces associations. L'État et l'ensemble des acteurs de la chaîne alimentaire doivent prendre leurs responsabilités et les mesures nécessaires pour réduire ces non-sens. La contrainte est un outil pour réduire le gaspillage alimentaire mais il faut aussi inciter les différents acteurs à agir.

C'est pourquoi les députés Les Républicains ont déposé plusieurs amendements visant à accompagner les agriculteurs dans cette lutte, en favorisant, par exemple, les investissements consentis pour lutter contre le gaspillage, que ce soit par la création d'ateliers pour transformer les surplus ou par l'amélioration des techniques de récolte, voire le stockage de ces denrées.

Les distributeurs ont un rôle essentiel. Depuis la loi de 2016 que vous avez fait adopter, Monsieur le rapporteur, au-delà d'un seuil réglementaire de 400 mètres carrés, les grandes et moyennes surfaces sont tenues de conventionner avec des associations caritatives pour définir les modalités de don de leurs invendus. Or, depuis, les modes de consommation, particulièrement avec la crise sanitaire, et les modes de distribution ont évolué : on voit fleurir de plus en plus de petites enseignes, de petites surfaces. C'est la raison pour laquelle nous plaidons pour un abaissement de ce seuil à 200 mètres carrés, afin d'inclure les commerces alimentaires de proximité qui sont sous pavillon de ces grandes enseignes.

Cette proposition de loi ne révolutionnera pas la lutte contre le gaspillage alimentaire mais elle a le mérite d'apporter des éléments complémentaires, dont certains constituent de véritables avancées, comme le « bon pour bien manger » ou encore la prime à l'assiette vide. Les députés Les Républicains dans leur ensemble soutiendront ce texte, en y apportant quelques adaptations.

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