Mesdames et Messieurs les députés, je suis en effet venu il y a un an à la sortie du premier confinement, mais aussi il y a six mois pour évoquer la partie du plan de relance dédiée au tourisme. Aujourd'hui, nous parlerons des derniers kilomètres de ce marathon que nous courons bien malgré nous depuis plus d'un an et qui a percuté nos vies.
En 2021 comme en 2020, le petit Chablis en terrasse et le tartare au comptoir relèvent de la conquête sanitaire. Le 30 avril dernier, le Président de la République a fait part des quatre étapes du calendrier de réouverture, quatre pas vers la liberté recouvrée : 3 mai, 19 mai, 9 juin, 30 juin. Le Président et le Premier ministre ont souhaité que ce chemin soit parcouru dans la concertation avec le Parlement, les territoires et les professionnels. J'ai d'ailleurs rencontré le comité de filière tourisme la semaine dernière.
Pour ce propos liminaire, j'aborderai quatre aspects : des précisions sur le calendrier de réouverture dans le secteur du tourisme ; l'adaptation des aides économiques – c'est M. Bruno Le Maire qui entrera dans le détail ; l'ouverture des frontières et la mobilité ; et la communication qui doit valoriser la destination France et redonner des couleurs au tourisme « bleu blanc rouge » auquel je suis attaché.
Le calendrier de réouverture est caractérisé par un principe de progressivité : il faut bien assurer chaque pas avant d'en faire un autre. Tout rouvrir tout de suite aurait compromis l'ensemble du processus. Il fallait éviter le scénario du pire, celui du stop-and-go qui nous aurait obligés à tout refermer dans quelques semaines, avec les conséquences non seulement économiques et sociales, mais aussi psychologiques qu'on peut imaginer.
Parmi les annonces phares figure la réouverture, à partir du 19 mai, des terrasses des restaurants, avec des tablées de six personnes maximum et un protocole adapté. Les restaurants pourront rouvrir en intérieur à partir du 9 juin, moyennant une jauge à 50 % et un protocole adapté. Le 30 juin, la jauge reviendra à 100 %.
La cellule interministérielle de crise (CIC) a entériné : une petite victoire, les hôteliers pourront, dès le 19 mai, servir leurs clients en salle comme en terrasse pour les services des petits-déjeuners, déjeuners et dîners. C'était une attente forte de la profession. Il en va de même pour les villages de vacances et autres formules tout inclus, dans le respect d'un protocole restant à définir, en concertation avec les professionnels.
Les parcs à thème pourront rouvrir le 19 mai, en suivant les règles applicables aux établissements recevant du public (ERP) qu'ils regroupent. En revanche, leur partie attraction ne rouvrira que le 9 juin, avec un plafond de 5 000 personnes par ERP. La CIC étudie aussi l'utilisation du pass sanitaire au-delà de 1 000 personnes mais les professionnels que nous avons entendus, notamment le Syndicat national des espaces de loisirs, d'attractions et culturels, ont souligné la difficulté qu'il représente pour eux dans la mesure où leur public, en grande partie familial, se détermine à venir quasiment le jour même et comprend beaucoup d'enfants ou adolescents qui n'auront pas toujours eu accès à la vaccination et qui devront donc être testés. Nous relayons le sujet dans nos travaux – la concertation sert aussi à cela. Au 30 juin, la jauge passera à 100 % pour une reprise à plein.
Les parcs zoologiques pourront rouvrir dès le 19 mai, avec des jauges de 50 % d'abord, puis de 65 % le 9 juin et de 100 % le 30 juin. La concertation nous a permis d'obtenir, dès le 19 mai, la réouverture très attendue par les professionnels des espaces intérieurs de types aquariums, serres tropicales ou vivariums. Tous les parcs, monuments historiques et jardins botaniques pourront également rouvrir dès le 19 mai.
Le segment du tourisme d'affaires et de l'événementiel professionnel a été très touché : excepté le mois de septembre dernier, il n'a pas du tout travaillé depuis un an. La reprise d'événements, de congrès, de séminaires dès le 19 mai, même avec des jauges plafonnées à 800 personnes, est un signal positif. Surtout, dès le 9 juin, cette jauge sera portée à 65 %, avec un plafond à 5 000 personnes et l'utilisation du pass sanitaire au-delà de 1 000 personnes.
Les foires et salons professionnels pourront rouvrir dès le 9 juin, selon une jauge de 50 %, pour des événements B2B. Les professionnels que nous avons rencontrés avec MM. Bruno Le Maire et Alain Griset sont très satisfaits de cette perspective. Il était important pour eux de conduire de premiers événements dès le mois de juin pour roder la machine avant de redémarrer à plein au mois de septembre, sachant que leur activité est toujours réduite en juillet-août.
Les hébergements, campings et hôtels sont déjà ouverts mais leurs conditions d'exploitation sont dégradées, par exemple avec la restauration à prendre dans la chambre. La réouverture des piscines extérieures dès le 19 mai est un élément d'attractivité pour eux, en particulier pour les campings qui, selon la Fédération nationale de l'hôtellerie de plein air, enregistrent un rattrapage remarquable des réservations. Ces hébergements pourront rouvrir le 9 juin leurs piscines couvertes, avec une jauge à 35 %.
Les remontées mécaniques, qui nous ont bien occupés cet hiver, vont rouvrir. La montagne se vit en effet aux quatre saisons et certaines activités en ont besoin. C'était là aussi une demande des professionnels. Je rappelle que, pour ce qui est de la partie hivernale, nous avons déployé un dispositif d'indemnisation ad hoc : la deuxième tranche de versement pour les remontées mécaniques a d'ailleurs eu lieu cette semaine. À la demande du Premier ministre, M. Joël Giraud et moi travaillons à un plan d'investissement pour le tourisme de montagne. Nous avons rencontré certains d'entre vous et vos collègues du groupe d'études montagne à ce sujet.
Les établissements thermaux chers à M. Jean-Bernard Sempastous et aux autres membres de son groupe d'études pourront rouvrir dès le 19 mai, avec une jauge à 50 %. La décision, obtenue de haute lutte, est logique, le public étant souvent senior et donc largement vacciné. C'est important pour nombre de territoires ruraux qui vivent de l'activité générée par les stations thermales. M. Jean-Yves Gouttebel, président du conseil départemental du Puy‑de‑Dôme, propose des pistes de rebond dans le rapport qu'il a présenté ce matin à la demande du Premier ministre. Le thermalisme pourrait d'ailleurs avoir une place dans le traitement des syndromes liés au covid long. Les établissements de thalassothérapie, eux, rouvriront le 9 juin.
Les casinos rouvriront en deux temps : dès le 19 mai, les espaces de machines à sous seront rouverts, moyennant une jauge de 35 %, tandis que les tables de jeux rouvriront le 9 juin, la jauge augmentant progressivement. Quant aux loisirs d'intérieur de type bowling ou escape game, ils rouvriront le 9 juin, avec une jauge d'abord de 50 %.
La France, c'est du patrimoine. Pour redécouvrir ses richesses, dès le 19 mai, les guides conférenciers titulaires de la carte professionnelle pourront prendre des groupes sans limite de nombre de participants, aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur. C'était une demande forte d'un secteur qui espère reprendre des couleurs.
Les croisières reprendront dans la dernière phase, à partir du 30 juin, dans les ports métropolitains, avec une jauge de 100 %. C'est une excellente nouvelle. La France, c'est 4 millions de croisiéristes, dont 2 millions passent par Marseille : c'est un élément important de l'économie territoriale.
Pour les outre-mer en revanche, la levée de l'obligation des motifs impérieux pour justifier les déplacements n'est pas encore annoncée. Nous nous employons, avec M. Sébastien Lecornu et le ministère des solidarités et de la santé, à donner aux professionnels du tourisme la visibilité qu'ils attendent. Dans les territoires insulaires, les systèmes de santé doivent être particulièrement protégés, mais nous entendons relayer l'attente forte des acteurs du tourisme.
J'en viens au soutien économique. Le déconfinement étant progressif, les chiffres d'affaires aussi reviendront de façon progressive. Il ne faut pas interrompre brutalement les dispositifs de soutien économique, ce serait contre-productif. Grâce aux mesures massives que le Parlement a votées, et je l'en remercie, nous avons pu depuis un an préserver l'emploi, les talents, les compétences nécessaires au rebond. Le Président nous demande maintenant d'adapter ces dispositifs à la situation. Cette semaine, avec M. Bruno Le Maire, Mme Élisabeth Borne et M. Alain Griset, nous avons reçu les représentants du secteur HCR (hôtellerie, cafés, restauration), de l'événementiel, des parcs, des discothèques, et nous continuons à affiner les dispositifs avec eux. Jusqu'à présent, le Fonds de solidarité était réservé aux entreprises perdant au moins 50 % de leur chiffre d'affaires. Il ouvrait droit à une aide pouvant atteindre 10 000 euros ou 20 % du chiffre d'affaires perdu. À partir du mois de juin, le plancher de 50 % disparaîtra afin d'inciter à la réouverture et les entreprises bénéficieront de l'accompagnement financier de l'État même si elles ne perdent « que » 15, 20 ou 30 % de leur chiffre d'affaires. Bruno Le Maire y reviendra sans doute en détail.
L'aide à l'activité partielle, autre pilier du soutien économique, sera adaptée en conservant un fort niveau pour les secteurs dits « protégés ». Les fameuses listes d'entreprises du secteur S1 et S1 bis ont été élargies progressivement pour prendre en compte, outre le secteur du tourisme, des secteurs annexes et connexes ainsi que les secteurs fermés administrativement, avec une prise en charge à 100 % jusqu'à la fin juin. Ensuite, le reste à charge augmentera un peu au fil de la reprise d'activité : là aussi, les paramètres sont en cours de discussion et de calage. Nous aurons à cœur de faire en sorte que les entreprises fermées ou qui continueront à perdre plus de 80 % de leur chiffre d'affaires bénéficient d'un reste à charge plus faible. Nous pensons notamment au monde de la nuit et des discothèques, qui reste sans horizon.
J'en viens à la réouverture des frontières – je sais combien y est attaché le président Lescure, représentant des Français d'Amérique du Nord, qui se voit comme un « député sans aile ». Un an après leur fermeture, il est grand temps de relancer la mobilité internationale. Le 19 avril dernier, parlant au public américain, le Président de la République disait notre souhait de les accueillir à nouveau. À partir du 9 juin, la France pourra recevoir les voyageurs étrangers, dans le respect des précautions sanitaires. Cette levée des restrictions de déplacement est une très bonne nouvelle pour le tourisme tricolore : l'été dernier, un certain nombre de territoires comme le littoral et la montagne ont tiré leur épingle du jeu, mais d'autres, comme Paris et la Côte d'Azur, ont souffert de l'absence des clientèles lointaines, en particulier américaine. Vous évoquerez ces sujets lors de l'examen du projet de loi relatif à la gestion de la sortie de crise sanitaire lundi, en séance publique.
Dans le même temps, les Français pourront voyager dans l'espace européen, comme c'est déjà le cas, et dans les pays dits verts, c'est-à-dire l'Australie, la Corée du Sud, Israël, le Japon, la Nouvelle-Zélande, le Royaume-Uni et Singapour. Le travail se poursuit au niveau européen pour déterminer les pays relevant de cette catégorie en fonction de critères sanitaires objectifs.
Dès lors que l'offre comme la mobilité reprennent, le tourisme peut repartir, mais dans un contexte très concurrentiel. Des pays voisins comme l'Italie, l'Espagne et la Grèce développent un marketing offensif et nous ne comptons pas rester en arrière. La semaine prochaine, avec des partenaires comme Atout France ou les régions, je lancerai une vaste campagne de communication pour promouvoir la destination France et faire en sorte que les vacances « bleu blanc rouge » soient de nouveau un tube de l'été 2021, par une campagne domestique et une autre à destination de dix marchés clés européens. Comme l'an dernier, votre serviteur prendra son bâton de pèlerin pour rencontrer les tour-opérateurs et la presse des principaux marchés afin de transmettre le message de bienvenue de la France, accompagné de celui de rester prudents et vigilants, qu'il faut continuer à marteler en dépit de la montée en puissance de la vaccination. Nous veillerons à ce que les territoires accueillant beaucoup de monde l'été soient suffisamment dotés en doses pour que les Français ayant engagé le processus de vaccination chez eux puissent l'achever sur leur lieu de vacances.
Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, entre l'accélération de la vaccination et les réouvertures prévues, l'alignement actuel des planètes peut nous rendre optimistes. Après la résilience, nous sommes dans la relance. Au sortir de la crise, nous devrons être assez offensifs pour conserver le rang de première destination mondiale que nous occupions auparavant.