Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, la stratégie du Gouvernement, en matière économique et financière, est simple, claire et lisible.
Le premier temps a consisté à protéger massivement les entreprises et les salariés, avec de nombreux dispositifs simples : Fonds de solidarité, prêts garantis par l'État (PGE), activité partielle, exonération de charges ou encore aide au paiement de cotisations.
Par le Fonds de solidarité, 22 milliards d'euros ont été versés à deux millions d'entreprises. Les prêts garantis par l'État ont représenté 137 milliards d'euros et ont aidé 670 000 entreprises. L'activité partielle a couvert plus de huit millions de salariés au plus fort de la crise.
Nous avons évidemment sans cesse adapté les dispositifs. Nous avons modifié le Fonds de solidarité, nous avons pris en charge les coûts fixes des entreprises et nous allons mettre en place une aide forfaitaire au paiement des stocks ; elle sera versée automatiquement le 25 mai, à quelque 36 000 commerces de l'habillement, de la chaussure, de la maroquinerie et du sport. Cette aide aux stocks correspondra à 80 % de l'aide perçue au titre du Fonds de solidarité pour le mois de novembre.
Nous arrivons maintenant dans la période de reprise de l'activité. Après la protection, le maître mot est « accompagnement » des entreprises. Nous voulons avancer sur la base de trois principes, de trois ambitions.
La première ambition est d'accompagner les entreprises. Nous n'avons pas protégé les restaurants, les bars, les hôtels, les salles de sport pendant des mois pour les laisser tomber du jour au lendemain. Nous avons donc prévu un dispositif que j'ai négocié avec les entreprises des secteurs concernés, S1 et S1 bis, depuis plusieurs semaines, de dégressivité très progressive des aides.
Même si les terrasses rouvrent le 19 mai, nous maintiendrons l'intégralité des dispositifs, notamment du Fonds de solidarité. C'est à partir du mois de juin que nous allons en changer le fonctionnement. Jusqu'à présent, pour y avoir droit, il fallait, soit être fermé administrativement, soit avoir perdu au minimum 50 % du chiffre d'affaires, par rapport à l'année de référence, à savoir 2019.
Quand les entreprises de ces secteurs vont rouvrir, certaines ne perdront que 15 à 25 % de leur chiffre d'affaires. C'est peu et beaucoup en même temps, surtout en période de redémarrage. C'est la raison pour laquelle nous avons décidé de procéder à un changement structurel du fonds de solidarité : à partir de début juin, toutes les entreprises des secteurs S1 et S1 bis, quelle que soit la perte de leur chiffre d'affaires, auront accès au Fonds de solidarité.
Par exemple, si une entreprise a perdu 20 % de son chiffre d'affaires par rapport à 2019, nous prendrons en charge l'indemnisation de cette perte à un taux que nous avons défini ensemble et qui est soumis au dernier arbitrage du Premier ministre. Ce taux sera décroissant sur trois mois – juin, juillet et août – afin d'aider à la reprise d'activité. Nous avons fixé à la fin du mois d'août une clause de rendez-vous pour s'assurer que la mesure aura permis d'accompagner les entreprises concernées et que les choses se seront bien passées pour ces deux secteurs.
J'ajoute, s'agissant de cet accompagnement, que nous tiendrons compte de la situation spécifique de certains secteurs. Je pense, par exemple, à l'événementiel. En effet, même si nous rouvrons le 19 mai, les organisateurs de foires et de salons ne verront pas leur activité redémarrer cet été. Nous leur avons donc signifié que, pour eux, la dégressivité commencera à la fin du mois d'août. Nous ferons du sur-mesure en fonction de la reprise de l'activité de chacun, avec des clauses de rendez-vous pour garantir un accompagnement le plus approprié et le plus efficace possible.
Deuxièmement, le déblocage de l'épargne : 163 milliards d'euros ont été mis de côté par les ménages. C'est un carburant puissant pour la croissance et la relance. Nous voulons donc inciter les ménages à débloquer leur épargne, en la consommant, en la donnant à leurs enfants ou encore en l'investissant dans des placements qui permettront le financement de l'économie française. Il me semble que nous pouvons encore simplifier les plans d'épargne en actions (PEA) ainsi que certains placements, notamment dans l'assurance-vie. Une autre bonne façon de garantir le déblocage de l'épargne, c'est de garantir aux Français, comme le fait la majorité depuis le début de la crise, que nous ne nous procéderons à aucune augmentation d'impôt.
Troisièmement, la transition pour les petites et moyennes entreprises (PME) et les entreprises de taille intermédiaire (ETI). Nous voulons, une fois encore, faire du sur-mesure et assurer un suivi extrêmement attentif pour éviter les vagues de faillite et perdre en quelques mois ce que nous protégeons depuis plus d'un an.
Des entreprises vont avoir besoin de fonds propres. Ce sont celles qui veulent réinvestir, mais qui sont très endettées. Pour elles, nous avons prévu les prêts participatifs. Nous avons déjà débloqué 11 milliards d'euros sur les 20 milliards demandés – 11 milliards d'euros qui ont été levés par dix-huit compagnies d'assurance et par la Caisse des dépôts et consignations.
D'autres entreprises – quelques milliers – risquent la faillite alors même qu'elles sont viables, au motif que leur environnement économique reste très dégradé. Je pense aux PME sous-traitantes du secteur de l'industrie aéronautique et aux ETI dans le secteur de l'événementiel. Il n'est pas question de voir disparaître des entreprises viables qui sont en difficulté financière ou de trésorerie du fait de la situation conjoncturelle. Nous mettrons en place un dispositif d'alerte, de suivi et d'accompagnement de ces entreprises pour faire le pont entre la situation actuelle et la période de reprise, que nous anticipons. Je préciserai ce dispositif dans les semaines à venir.
Je voudrais vous dire à quel point je suis convaincu que l'économie française rebondira vite et fort après les contraintes sanitaires qui ont pesé sur elle. J'en veux pour preuve quelques indicateurs économiques très concrets. D'abord, le taux de croissance du premier trimestre 2021 : 0,4 %, soit le meilleur chiffre des grands pays européens. Ensuite, le niveau d'investissement reste élevé, notamment dans le secteur industriel.
Enfin, et cela va poser des difficultés, les tensions qui existent dès maintenant sur les recrutements des salariés et le prix des matières premières. Vous avez tous eu, j'en suis sûr, des remontées du terrain de la part des PME et d'entreprises du bâtiment et des travaux publics (BTP) sur l'explosion des coûts des matières premières, notamment du bois, avec un problème d'approvisionnement au Canada qui crée des tensions sur l'offre – une forte demande des États‑Unis –, mais aussi de l'acier, de l'aluminium, du zinc et du cuivre pour les composants et les couvertures de toitures. Les prix de ces matières premières ont augmenté de 30, 35 ou 40 %, ce qui est aussi le signe d'un démarrage économique puissant.
Je confirme notre ambition de parvenir à 5 % de croissance en 2021, un chiffre très élevé, mais qui est à notre portée. Le bon décaissement du plan de relance – un tiers du plan de relance, soit plus de 30 milliards d'euros, a déjà été engagé – va permettre de nourrir ce retour de la croissance et la création d'emplois.
Je ne serai pas plus long et vous remercie à nouveau de cette audition, utile et précieuse pour moi.