Intervention de Dominique Potier

Réunion du mercredi 12 mai 2021 à 9h30
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Potier :

Sur tous les continents, depuis des siècles, le partage de la terre est le gage d'une prospérité agricole concourant à la sécurité alimentaire collective. Il va partout de pair avec des sociétés démocratiques et est le meilleur moyen de lutter contre la pauvreté : plus on partage, plus l'agriculture et les sociétés sont prospères. Cette règle quasiment universelle est décrite dans le livre que j'ai publié avec MM. Benoît Grimonprez et Pierre Blanc, à partir des travaux législatifs entamés en 2012.

C'est dire l'enjeu d'une richesse économique, sociale et écologique liée au partage. L'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (INRAE), le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD) et tous les instituts scientifiques montrent que les mosaïques paysagères et la diversité des exploitants sont non seulement un gage de recherche de valeur ajoutée économique mais qu'elles garantissent aussi, sur le plan écologique, la biodiversité – ce que nous pouvons considérer comme une assurance vie. Le débat est capital.

C'est dire aussi mon dépit. Dès 2012, en tant que député, j'ai apporté au débat public cette question qui bruissait dans les campagnes. Dans le collectif que j'ai formé avec mes collègues de tous horizons politiques, je n'ai eu de cesse de défendre des propositions, souvent de manière transpartisane – en 2014, dans la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt ; en 2016, dans la loi sur la transparence, la lutte contre la corruption et la modernisation de la vie économique (« Sapin 2 ») ; puis dans la loi relative à la lutte contre l'accaparement des terres agricoles et au développement du bio contrôle 2017, issue d'une proposition de loi – et de lutter contre l'accaparement des terres et l'absence de transparence des sociétés. Maîtriser, réguler le marché foncier au service de la prospérité est le combat que je mène, avec les socialistes et d'autres collègues, depuis longtemps.

La mission d'information en 2017 a permis d'élargir le champ et d'envisager une grande loi foncière. Malgré nos nombreuses interpellations des ministres de l'agriculture, elle n'a pu aboutir. Nous avons donc pensé une loi d'urgence. Alors qu'avec MM. Jean-Paul Dufrègne, Jean-Michel Clément, Jean-Bernard Sempastous, Yves Daniel et tant d'autres, un collectif était en veille et demandait des rendez-vous au ministre, la proposition de loi a jailli. En réaction, j'ai écrit ce qui me semblait être l'esprit d'une telle loi d'urgence : la contre‑proposition inspirera mes amendements. Dans le même temps, je tente de dépasser l'énorme blessure personnelle, le sentiment d'une trahison du travail collectif et d'un dévoiement de l'intention qui était la nôtre.

Le pire serait de faire illusion avec un instrument législatif qui ne concourrait pas à nos visées. Au nom du combat pour le monde paysan, pour la planète, pour le bien commun, je soutiendrai des amendements à ce texte dont je crains – les expertises le montrent – qu'il ne réponde pas aux objectifs que nous nous sommes fixés.

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