Et la montagne accoucha d'une souris… J'avais mis beaucoup d'espoir dans cette proposition de loi et je suis déçu que le groupe de travail, auquel Dominique Potier faisait allusion, n'ait pas abouti à un consensus.
Notre philosophie n'est décidément pas la même : si nous souscrivons aux objectifs déclinés par le rapporteur – l'installation des jeunes agriculteurs, le renouvellement des générations, la souveraineté alimentaire – nous estimons que la proposition de loi ne fait qu'effleurer les problèmes.
On peut même se demander si le fameux seuil « d'agrandissement excessif » n'aura pas un effet contraire à celui recherché en instaurant une procédure parallèle à l'existant, et inégalitaire en comparaison des procédures utilisées pour le contrôle des structures. Certains se serviront de ce nouvel outil pour constituer des sociétés qui permettront de contourner le contrôle des structures.
Certes, c'est un texte d'urgence, mais il est regrettable que la question du travail délégué n'y soit pas abordée : ce phénomène, en forte croissance, est devenu une méthode de contournement de plus en plus visible et nuisible.
La terre n'est pas un bien comme les autres et il faut beaucoup plus d'ambition pour la préserver et la sortir de ce circuit libéral, qui la mutile de plus en plus. L'accaparement croissant de ce bien commun pour des raisons mercantiles est devenu intolérable. Comment préserver la souveraineté alimentaire et la biodiversité dont tout le monde parle tant, alors que nous validons des processus qui les mettent en péril ?
Contrairement à ce que vous affirmez, je doute que votre proposition de loi concoure à l'installation de jeunes agriculteurs. Ceux-ci doivent réunir ou racheter un capital d'exploitation de plus en plus important – dans ma région, il faut 3 000 à 4 000 euros par hectare pour le constituer, hors foncier –, ce qui éloigne de nombreux jeunes de leur vocation.
La proposition de loi traitera certaines situations particulières et met un pied dans la porte. On peut s'en réjouir, mais elle ne répond pas aux questions essentielles pour l'avenir de l'agriculture.