Monsieur le rapporteur, vous avez évoqué plusieurs fois le soutien de la profession. J'ai travaillé pendant des années avec l'ensemble des syndicats, l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture (APCA) ou les SAFER, j'ai été un compagnon de route de leurs combats et j'avoue ne pas comprendre comment ce renversement a pu s'opérer. Quel jeu d'acteurs a permis de faire émerger cette proposition susceptible de légitimer les logiques sociétaires d'agrandissement ? Comment les jeunes agriculteurs et tous ceux qui se battent pour l'installation des agriculteurs ont-ils été amenés à soutenir cette initiative, de toute évidence contraire à l'objectif affiché ?
Il ne faut pas confondre la définition de la prise de contrôle d'une société – point sur lequel le Conseil d'État s'est exprimé, proposant de retenir les 40 % du code de commerce plutôt que les 25 % du code monétaire et financier – et le seuil de déclenchement du contrôle. Je rappelle à l'attention des non-initiés que, dans le cadre de la politique des structures, le contrôle s'exerce en deçà d'un seuil – minimal – de dimension économique viable et au-delà d'un seuil – excessif – de superficie. Or vous proposez de fixer un seuil quantitatif supérieur, assorti de coefficients d'augmentation.
Je rappelle qu'il y a deux mois, nous avons écrit avec MM. Julien Dive, Jean-Paul Dufrègne et Jean-Michel Clément au ministre de l'agriculture, lui demandant de saisir le Conseil d'État pour vérifier si le seuil sur lequel est fondé le contrôle des structures est un seuil admissible au regard de notre objectif. De fait, le Conseil d'État n'a pas été sollicité sur ce point, mais je ne doute pas qu'il aurait répondu par l'affirmative !
Si je suis agriculteur, propriétaire d'une centaine d'hectares. Si M. Nicolas Turquois transforme son exploitation en société dont je rachète 99 % des parts, je deviens exploitant en doublant ma surface. Celle-ci, inférieure au seuil de déclenchement, est hors radar. Aucun contrôle ne s'exercera sur cette opération qui pourrait compromettre une installation. D'un point de vue républicain, il est inadmissible de favoriser ainsi la voie sociétaire et de discriminer les requérants individuels. Vous instituez l'agrandissement par la voie sociétaire !