Intervention de Jean-Luc Lagleize

Réunion du mardi 12 octobre 2021 à 17h15
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Luc Lagleize, rapporteur pour avis :

Les crédits du programme 147 ont effectivement vocation à garantir l'égalité des chances et à lutter contre l'assignation à résidence dont souffrent trop souvent les personnes qui sont nées dans ces quartiers prioritaires de la ville.

Monsieur Bazin, je partage votre remarque au sujet des conditions d'examen de ces crédits. Moi-même, j'ai dû commencer mes auditions avant d'avoir le bleu budgétaire et je n'ai terminé mon rapport que dimanche, en début d'après-midi. Nous nous sommes tous plaints de ces conditions de travail loin d'être idéales.

Vous avez raison, le taux de chômage des jeunes est deux fois plus important dans les quartiers que dans le périmètre de leur agglomération. Le dispositif des emplois francs n'a pas encore produit tous les effets escomptés, mais il faut le poursuivre.

Depuis une cinquantaine d'années, on constate effectivement que dès qu'une famille réussit à sortir de la misère, elle quitte le quartier et est remplacée par une famille dont les revenus sont bien plus faibles. C'est la même chose dans le logement social : une famille qui quitte un logement social parce qu'elle ne répond plus aux critères est remplacée par une famille qui, elle, les remplit. En fin de compte, on en vient à stigmatiser des quartiers par les populations que l'on y fait résider. Une réflexion beaucoup plus globale s'impose, notamment autour de la loi SRU, qui a fini par créer des ghettos de riches et des ghettos de pauvres.

De même, savoir si la qualification QPV n'induit pas de fait une dégradation de l'image de ces quartiers est une vraie question. Les communes et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) engloutissent des millions d'euros dans le marketing pour changer l'image de leurs quartiers, mais si on leur colle d'emblée une étiquette de quartier difficile ou sensible, c'est assez contre-productif.

Le manque de cohérence entre le zonage des QPV et celui de l'éducation prioritaire, je le note aussi dans mon rapport : 70 % seulement des enfants relèvent des deux zonages. Une refonte de ces zonages est en cours : par le ministère de l'éducation nationale pour celui de l'éducation prioritaire ; par le ministère de la ville pour celui des QPV. Une feuille de route commune a été définie pour aboutir à une harmonisation d'ici à 2023.

Comme Mme Crouzet, je demande la coordination des dispositifs dans mon rapport. Lorsqu'un dispositif est coordonné à la fois par l'éducation nationale, l'État et la commune ou la collectivité locale qui reçoit des aides, il connaît généralement une belle réussite. Il y aurait probablement intérêt à ce que cette coordination ne se limite pas aux cités éducatives, mais qu'elle concerne l'ensemble des dispositifs relevant du programme 147.

Je propose, moi aussi, de pousser plus loin la contractualisation. Jusqu'à la création des cités éducatives, tout le monde travaillait en silo. À partir du moment où la contractualisation a touché tous les niveaux – national, local et ministères –, les choses ont avancé beaucoup mieux. Il faut donc amplifier la démarche et la pérenniser – il reviendra aux gouvernements suivants de le faire.

En ce qui concerne le renouvellement urbain, vous vous souvenez peut-être que, l'année dernière, j'avais consacré la seconde partie de mon rapport à la mixité sociale dans les quartiers et au renouvellement urbain. Je m'étais déjà ému du faible budget attribué à l'ANRU. Or, chaque fois, on me dit que la trésorerie de l'ANRU est pléthorique mais qu'elle finance assez peu de constructions de logement. Parce qu'il y a eu beaucoup moins de constructions et de renouvellements dans les quartiers, l'ANRU a moins financé. On en revient à la question de l'inacceptabilité sociale de l'acte de construire. Si les maires signent moins de permis de construire, c'est aussi parce qu'ils savent que des recours seront déposés.

Aidons les maires à trouver un nouveau mode de communication. Il faut qu'ils puissent expliquer aux habitants de leurs communes que la ville a besoin d'évoluer, que s'ils veulent des transports en commun plus performants, ils devront accepter d'être un peu plus nombreux. Sinon, ils devront aller vivre plus loin, dans des endroits où ils auront besoin d'une voiture, et ils devront se garer en périphérie des villes, devenues zones à faibles émissions (ZFE).

J'émets un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission Cohésion des territoires consacrés à la politique de la ville.

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