Intervention de Marguerite Deprez-Audebert

Réunion du mercredi 5 janvier 2022 à 9h30
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarguerite Deprez-Audebert :

Notre volonté commune de préparer la sortie du glyphosate ne fait pas débat et le groupe Mouvement démocrate (MoDem) et démocrates apparentés partage l'objectif de réduire progressivement l'utilisation du glyphosate avant d'y mettre fin. Néanmoins, nous considérons que l'interdiction immédiate prise dans un cadre purement national, comme le propose ce texte, n'est pas une solution adéquate pour répondre à ce défi sanitaire, agricole, environnemental et économique. Au contraire, il est nécessaire d'avancer avec pragmatisme mais aussi avec honnêteté vis-à-vis des citoyens et des agriculteurs. Être honnête, c'est reconnaître que pour l'instant, nous ne disposons pas d'alternatives pérennes et satisfaisantes au glyphosate qui permettraient de répondre aux nombreux enjeux auxquels est confronté le secteur agricole en France. En effet, les impacts de cette interdiction immédiate seraient nombreux sur la productivité de notre modèle agricole, et donc sur la souveraineté alimentaire, ainsi que sur la viabilité des exploitations agricoles. L'interdiction du glyphosate engendrerait des coûts considérables, entre 50 et 150 euros supplémentaires par hectare. S'y ajoute, comme l'a souligné le Président de la République, l'enjeu de la concurrence équitable, qui serait remise en question pour nos agriculteurs vis-à-vis des autres producteurs européens en cas de sortie immédiate et unilatérale du glyphosate. Ce sont aussi les raisons pour lesquelles l'objectif formulé par le Président de la République de mettre fin à l'utilisation du glyphosate en 2021 n'a pu être tenu. Mais nous y travaillons à l'échelle nationale et européenne.

Les nombreuses difficultés ne nous ont pas empêché de limiter l'utilisation du glyphosate en France, faisant de notre pays l'un des États les plus ambitieux en la matière. Depuis janvier 2017, le glyphosate est interdit dans les espaces publics et son utilisation par les particuliers l'est aussi depuis 2019. À l'échelle européenne, n'oublions pas que c'est la France qui s'est mobilisée pour que l'autorisation du glyphosate soit renouvelée pour une durée de cinq ans, et non de dix comme le prévoyait initialement la Commission européenne.

En outre, concernant la consommation de produits phytosanitaires en général, nos actions portent leurs fruits. Leur utilisation a diminué de 20 % en 2020 par rapport à la période 2012-2017. Par ailleurs, l'utilisation des substances les plus préoccupantes, relevant de la catégorie CMR 1, a baissé de 93 % entre 2016 et 2020. Les plans France Relance et France 2030 viennent également s'ajouter à nos efforts en prévoyant des investissements massifs afin de soutenir le déploiement d'alternatives au glyphosate, de développer davantage la transition agro-écologique et de réduire les autorisations de mise sur le marché (AMM) de nombreux produits utilisant du glyphosate.

Nous ne nions pas l'ampleur du défi : les quantités de glyphosate vendues ont augmenté entre 2019 et 2020, malgré une baisse significative l'année précédente. Nous avons aussi décidé l'an dernier de limiter l'utilisation du glyphosate aux seuls cas où il n'y aurait aucune alternative. Toutefois, les effets chiffrés de cette décision ne pourront être observés qu'en 2022. Par conséquent, au lieu de voter une interdiction immédiate et sans concertation avec nos partenaires, nous souhaitons intensifier les efforts de développement et de recherche afin de développer des alternatives fiables permettant le remplacement du glyphosate. De plus, il est nécessaire de trouver une solution européenne, et ce, avant la fin de l'année, lorsqu'une nouvelle décision devra être prise à l'échelle de l'Union sur l'éventuelle prolongation de la licence autorisant l'utilisation du glyphosate. La France devra peser de tout son poids pendant sa présidence du Conseil de l'Union européenne pour trouver une solution permettant de respecter l'équilibre entre, d'une part, la protection de l'environnement et de la santé et, d'autre part, la préservation de la compétitivité de notre modèle agricole.

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