Monsieur Prud'homme, j'ai décortiqué votre rapport. Il m'a surpris puisque vous avez choisi d'abandonner la rhétorique habituelle de La France insoumise : pas de dénonciation de Monsanto – qui d'ailleurs n'existe plus –, des OGM ou des affres du capitalisme sauvage. Je n'y ai pas trouvé non plus de remise en question de l'économie de marché ou de l'Union européenne, en particulier de l'EFSA, ni de critique de l'organisation du service de l'État, en particulier de l'ANSES. Votre rapport n'a donc rien de révolutionnaire, ni de décroissant et m'en deviendrait presque sympathique.
J'ai surtout trouvé votre rapport, et les explications qu'il contient, très clair et je vous en félicite. Vous y présentez de façon pédagogique le cadre législatif existant sur l'autorisation et la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques. J'ai essayé pendant des années dans l'hémicycle de vous convaincre. J'ai l'impression donc d'avoir servi un peu à quelque chose, au moins sur ce point-là.
Quelques points pourraient en revanche être améliorés.
Vous écrivez qu'aucune mesure nationale n'a été prise, tout en rappelant – et c'est contradictoire – que sur 201 produits contenant du glyphosate, 69 détiennent encore aujourd'hui une AMM. En réalité, le processus de sortie du glyphosate est donc déjà largement engagé puisque deux tiers des autorisations de mise sur le marché ont été retirés. Vous critiquez entre les lignes le délai de grâce accordé aux industriels. Nous avons déjà eu ce débat lors du vote sur la loi « climat et résilience », en particulier sur les produits réfrigérants utilisés par les fabricants de réfrigérateurs. Autre regret, vous faites référence aux travaux de votre collègue Bénédicte Taurine et à ceux de nos collègues sur la mission d'information sur la sortie du glyphosate. En revanche, rien sur la mission d'information commune sur le glyphosate qui avait été présidée en début de législature par notre collègue Élisabeth Toutut-Picard. Son travail a posé les bases d'une meilleure compréhension des problèmes auxquels nous devons faire face, tels que l'impact sur les systèmes de production, notamment sur les techniques culturales simplifiées, ou la réduction des gaz à effet de serre. Il aurait été intéressant d'avoir les chiffres les plus récents des ventes de glyphosate en France en 2021 mais peut-être les obtiendrons nous avant le débat en séance publique.
Votre rapport contient une inexactitude. Vous affirmez que le Luxembourg a interdit l'ensemble des produits phytopharmaceutiques sur son territoire. C'est faux : l'interdiction ne concerne que le glyphosate.
Enfin, le titre de votre proposition de loi vise à interdire le glyphosate, alors que vous savez très bien que la France n'a pas la compétence juridique d'interdire la molécule du glyphosate. Elle ne peut que légiférer sur les usages qui en sont faits sur son territoire, en raison des particularités locales et sectorielles.
Vous comprendrez donc qu'il y a encore de la marge avant que je ne vote une proposition de loi présentée par La France insoumise.