Dogme pour dogme – chacun le sien, cher collègue Moreau –, mon avis est évidemment défavorable car l'amendement vise à supprimer l'article unique, donc la proposition de loi. Ses auteurs tirent argument d'une prétendue absence de solutions de remplacement, ce qui aurait des effets désastreux sur notre agriculture. Or, certains travaux de l'ANSES et de l'INRAe démontrent qu'il existe des pratiques et des produits non chimiques susceptibles de remplacer le glyphosate dans ses usages.
Dès lors, on ne peut plus – comme le font le Gouvernement et la majorité à l'Assemblée nationale depuis trois ans – se retrancher derrière des obstacles techniques ou économiques afin de justifier le maintien d'une substance dont les dangers ne font plus aucun doute parmi les scientifiques. Les parlementaires qui ont signé l'amendement ne peuvent pas davantage contester les limites que rencontre une politique consistant à ne pas renouveler les AMM ou d'en restreindre le champ. Comme l'indique l'état des travaux sur la proposition de loi, les ventes de glyphosate sont à nouveau en hausse. Le niveau de consommation moyenne n'a pas faibli en trois ans et demeure comparable à celui de 2013. Dans ces conditions, les pouvoirs publics ne peuvent s'en tenir aux avancées très lentes d'une transition remise aux calendes grecques.
La position dogmatique sur laquelle vous vous arc-boutez et que vous ressassez ne tient compte ni des risques sanitaires et environnementaux que comporte l'usage du glyphosate, ni des perspectives qu'ouvrent les avancées de l'agronomie, qui n'est certes pas une science facile. L'expertise des agriculteurs est à la hauteur de ces défis.
Cette position se révèle d'autant plus incompréhensible qu'elle ne correspond ni aux engagements pris par le Président de la République, ni à la voie que défendait la France en 2017 face à la Commission européenne. Le refus de l'interdiction du glyphosate confine à de l'attentisme – j'ai parlé de procrastination. Il faudra que l'on nous explique pourquoi d'autres États européens s'engagent résolument pour en bannir l'usage. Je souhaiterais aussi comprendre pourquoi certains membres éminents de cette assemblée semblent repousser aux calendes grecques cette échéance, alors que la mission d'information commune sur le suivi de la stratégie de sortie du glyphosate se montrait nettement moins pessimiste. Son rapport suggérait en effet une possibilité de sortie dans des délais bien plus raisonnables.
Adopter l'amendement serait un nouveau renoncement, voire une faute. Mon avis est donc défavorable.