Intervention de Julien Denormandie

Réunion du jeudi 6 janvier 2022 à 9h40
Commission des affaires économiques

Julien Denormandie, ministre :

Certains d'entre vous ont demandé pourquoi les non-assurés seraient in fine moins indemnisés que les assurés. Au-delà du fait qu'il est, somme toute, assez logique que les premiers reçoivent moins que les seconds, le projet de loi ne fait que reprendre les 50 % imposés par le droit européen, par ailleurs respectés par le CNGRA aujourd'hui.

L'absence d'offre assurantielle a également été soulevée. Je renvoie au dispositif, dont le troisième étage prévoit qu'au-delà d'un seuil défini en fonction des cultures, la solidarité nationale interviendra. Aujourd'hui, la part de la surface agricole utile assurée est de 18 %, mais cette proportion cache des réalités très différentes : elle atteint 30 % dans la viticulture et dans les grandes cultures mais tombe à 6 % dans l'arboriculture et jusqu'à 1 % dans la prairie. Le taux de non-assurance n'est pas le fait de l'irresponsabilité des agriculteurs, il démontre simplement que le système fonctionne mal.

Celui-ci, qui repose à la fois sur l'assurance récolte privée et le régime de calamité agricole, est fondé sur un principe incroyable puisqu'il a été décrété que ceux qui étaient considérés comme assurables ne pouvaient pas bénéficier du FNGRA. Établir une différence entre les cultures était une approche dénuée de sens, qui a fait que le dispositif ne pouvait fonctionner dans la durée. Le nouveau système est basé sur l'universalité, il est ouvert à tous : au-delà d'un seuil défini pour chaque culture, la solidarité nationale fonctionnera. C'est une avancée fondamentale.

Que faire si, au deuxième étage, les assureurs proposent des contrats au coût exorbitant ? L'article 7 prévoit la mise en place d'un pool, avec des règles actuarielles qui permettent de définir le niveau des primes d'assurance. C'est une forme de régulation, toutefois limitée par le principe constitutionnel de libre contractualisation : cela reste un contrat, proposé par un assureur à un agriculteur. Si l'on s'aperçoit que les prix sont exorbitants sur un territoire donné ou que les assureurs ne sont pas suffisamment nombreux, l'article 3 entre en jeu.

Cet article est celui qui fonde le seuil de mobilisation du troisième étage, selon la nature des productions et le type de contrats d'assurance souscrits. En revanche, l'alinéa 6 de l'article 3 renvoie à un décret le soin de fixer le niveau d'indemnisation. C'est d'ailleurs ainsi que fonctionne aujourd'hui le CGNRA, qui recouvre au-delà d'un seuil de pertes 30 %. Cette approche, qui perdurera, tient compte de la réalité du contexte assurantiel. Cela mériterait, je pense, d'être précisé dans la discussion lors de l'examen en séance publique.

Je réfute les critiques du président Chassaigne sur l'aspect électoraliste du projet de loi, mais j'assume le renvoi à un décret. Fixer les seuils par culture ne relève pas de la loi, ce serait folie que de le prévoir. J'ai un immense respect pour le travail parlementaire, mais imaginez-vous décider ici du seuil pour le lavandin, puis pour le houblon, et ainsi de suite ? La loi comprendrait un nombre insensé d'articles… et malgré tout le plaisir que j'ai à vous rencontrer, il faudrait que je revienne devant vous à chaque fois que nous nous serions trompés ! Alors, si la voie réglementaire suppose que la prochaine législature ait la même envie, la même détermination et la même vision, le moyen le moyen le plus simple est de ne pas changer de majorité .

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