Intervention de Mathilde Panot

Réunion du mardi 11 janvier 2022 à 21h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMathilde Panot :

Mon attachement va plutôt à la Loire, dernier fleuve sauvage d'Europe, mais je remercie le rapporteur pour sa proposition de loi. Comme il l'a souligné, l'énergie n'est pas un bien comme les autres : elle est notre bien commun, et il est bon de le réaffirmer fortement dans la période que nous vivons.

Ce texte nous permet de réaffirmer notre opposition au projet Hercule, pour l'instant heureusement enterré, qui vise à démanteler EDF, comme notre opposition à l'injonction de la Commission européenne, que le Gouvernement semble également pour l'instant abandonner, d'ouvrir à la concurrence les barrages de notre pays – nous parlions de « privatisation », ce qui faisait parfois hurler les ministres.

Nous sommes opposés à cette ouverture à la concurrence des barrages car l'énergie est un bien commun, un de ceux qui sont indispensables à notre vie et que nous devons retirer des griffes du marché, parce que celui-ci ne fait pas des choix allant dans le sens de l'intérêt général.

Les barrages posent aussi des problèmes de sécurité. Sachant que 25 % d'entre eux ont plus de 70 ans, l'ouverture à la concurrence, qui entraîne un certain dumping social, pourrait créer des problèmes de sécurité dans notre pays.

Troisièmement, mettre la main sur les barrages serait une opération extrêmement rentable pour les entreprises privées, alors que leur coût est aujourd'hui amorti. Or c'est un investissement qui a été payé par les Français.

Les barrages, première source d'énergie renouvelable, jouent un rôle très important de régulateur du système électrique puisqu'ils permettent une régulation rapide de la quantité d'électricité produite et injectée dans les réseaux. Or le Rhône, fleuve le plus nucléarisé de France, va connaître une baisse de débit de 10 % à 40 %, selon les scientifiques : les conflits d'usage de l'eau se multiplieront donc dans les années à venir. Il serait néfaste que les arbitrages se fassent non grâce à la décision commune, par le biais des collectivités ou de l'État, mais selon des objectifs de rentabilité.

Voilà pourquoi nous sommes opposés à l'ouverture à la concurrence et considérons que la proposition de loi va dans le bon sens, puisqu'elle permet à un opérateur historique de garder la main sur l'hydroélectricité.

Certaines dispositions du texte nous inquiètent pourtant. L'article 5, qui dispose que « À compter du 1er janvier 2023, le préfet peut abroger les décisions d'attribution d'énergie réservée accordées par l'État antérieurement à cette date » fait craindre une moindre attribution d'énergie réservée, notamment aux services publics locaux. De même, le fait que la redevance liée aux ventes de l'électricité pour l'État devienne proportionnelle au lieu de fixe fait craindre, si le prix de l'énergie baisse, que la redevance due à l'État diminue également.

Un petit regret, aussi : la proposition de loi n'évoque pas assez les missions de transport et d'irrigation qui échoieront à CNR, alors qu'elles participent de manière forte à la bifurcation écologique, notamment avec la nécessité du report modal et du développement du transport fluvial.

La proposition de loi pourrait aller beaucoup plus loin et créer un pôle public de l'énergie. Je suis du moins satisfaite d'avoir entendu la secrétaire d'État dire qu'elle était pour une planification : je l'invite à mettre ses actes en accord avec ses paroles !

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