Lors des débats parlementaires qui ont conduit à l'adoption de la loi du 14 novembre 2020, je vous avais indiqué que le Gouvernement saisirait le Parlement au début de 2021 sur un projet de loi visant à créer un régime juridique pérenne pour répondre aux crises sanitaires et à sortir de la politique du stop and go et des prorogations de mesures dérogatoires. Il me semble en effet que nous pouvons parvenir à un dispositif solide et durable, susceptible de rassurer les juristes, les parlementaires et les équipes chargées du pilotage de la politique sanitaire.
La commission des Lois a décidé la création de cette mission d'information à la même période et j'avais précisé que ses travaux nourriraient le travail législatif à venir. Cette audition permettra donc de réaliser un point d'étape.
Le travail de préparation du projet de loi est en bonne voie mais, dès lors qu'il n'est pas finalisé et que tous les arbitrages n'ont pas été rendus, je ne peux, à ce stade, que vous faire part des grandes orientations qui seront retenues.
Premièrement, le régime proposé devra permettre de disposer d'un cadre général suffisamment polyvalent pour répondre à différentes crises sanitaires. Certes, notre référence demeurera la gestion d'une épidémie de grande ampleur, mais nous devons également pouvoir utiliser cet outil pour répondre à une autre situation sanitaire exceptionnelle qui pourrait se présenter.
Deuxièmement, ce régime devra comprendre toutes les garanties nécessaires pour que les atteintes aux libertés et droits constitutionnellement garantis soient justifiées et proportionnées aux enjeux sanitaires. Cela passera par l'inscription d'exigences suffisantes dans la loi et par l'accès plein et entier au juge pour, le cas échéant, contester les mesures réglementaires ou individuelles. L'information et l'intervention régulières du Parlement en seront des éléments essentiels.
Troisièmement, ce régime devra être clair et opérationnel pour permettre aux autorités compétentes de prendre des mesures utiles dans des délais réduits et dans le cadre de procédures simples, de manière à garantir leur sécurité juridique.
Enfin, quatrième grand principe, l'élaboration de ce régime devra valoriser les retours d'expériences acquises depuis le mois de mars. Sans constituer une référence unique, l'acquis juridique de la gestion de crise doit en effet être pris en compte. Le Conseil d'État ayant invalidé certaines dispositions, il importe de prendre des mesures solides en cas de recours.
Sur la base de ces différents objectifs, le Gouvernement vous soumettra donc prochainement un projet de réforme. Les dispositions récentes, dont l'équilibre est satisfaisant et qui ont fait leurs preuves lors de la gestion de l'épidémie, seront en grande partie reprises.
Nous envisageons un système à deux niveaux en fonction de la gravité de la situation sanitaire, de manière à préciser et à simplifier l'articulation encore un peu complexe entre le régime des menaces sanitaires, celui de l'état d'urgence sanitaire, et celui de sortie de l'état d'urgence sanitaire.
Ce texte sera également l'occasion de préciser certains points concernant la répartition des compétences entre autorités publiques nationales et locales et de mutualiser certaines dispositions de l'état d'urgence sanitaire qui pourraient être utilement appliquées à la gestion de menaces sanitaires graves, quand bien même seraient-elles de moindre ampleur.
De manière ponctuelle, le projet de loi apportera des précisions ou des clarifications sur certaines prérogatives accordées aux autorités administratives.
Le texte aura également pour ambition de bâtir un cadre pérenne pour les systèmes d'information de crise. Une disposition législative est ainsi nécessaire pour autoriser des dérogations au secret médical, dans la stricte limite de leur objet, comme c'est déjà le cas dans le cadre de l'épidémie de covid-19.
Une telle base de discussion pourra évidemment être enrichie lors des travaux parlementaires. Nous partageons avec vous le souci de disposer d'un outil pérenne, adaptable, disposant de garanties suffisantes pour assurer la protection des Français dans les meilleures conditions.