Comme je l'ai dit en préambule, il faut que ces comités regroupent tous les acteurs : les grands donneurs d'ordres, leurs entreprises coréalisatrices et sous-traitantes, l'État mais aussi les collectivités territoriales où elles sont implantées et les organisations syndicales pour que soient représentés tout à la fois les salariés et les citoyens. Il faut que ces comités de filière soient les plus larges possible et réunissent tous les acteurs, sans pour autant devenir des usines à gaz. Une entreprise est implantée dans un territoire et le territoire lui-même a un effet important. Nous l'avons vu sur le chantier naval : les entreprises locales vont entrer au capital de STX France : c'était une revendication de leurs représentants et ils ont obtenu satisfaction de l'État.
Il faut aussi que ces comités de filière aient des moyens – si ce n'est de financement, du moins d'accès au financement. Pour un bateau qui coûte 1 milliard d'euros, 20 % de la somme est versée à la commande, ce qui veut dire qu'il faut en financer 800 millions d'euros. Et quand vous négociez un prêt, selon qu'il y ait confiance ou pas, votre taux d'intérêt passe de 1 à 6 %… Imaginez ce que cela représente en termes de marges quand vous faites le calcul à la fin ! Nous sommes dans un métier où on ne gagne pas d'argent. Regardez les résultats de l'entreprise depuis de nombreuses années : sur un chiffre d'affaires d'1,4 ou 1,5 milliard d'euros cette année, on dégagera peut-être 1 ou 2 millions d'euros de bénéfices… Ce n'est même pas l'épaisseur du trait. L'aspect financier est donc devenu un aspect de compétitivité essentiel. STX France a dû aller se faire financer par des pools bancaires en faisant le tour du monde parce que certaines banques en France ne voulaient pas jouer le jeu.