Intervention de Olivier Véran

Réunion du lundi 10 mai 2021 à 10h30
Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Olivier Véran, ministre :

Il faut renforcer le niveau départemental. Le Premier ministre s'y est d'ailleurs engagé et j'y suis très favorable. Tous les postes fonctionnels qui doivent être créés le seront à l'échelle départementale afin de permettre au délégué départemental de faire face à la multiplicité de ses missions. Cela permettra en outre de renforcer les relations avec les collectivités.

Un cadrage interdépartemental est souhaitable, mais un schéma identique ne permettrait pas de tenir compte de la particularité de chaque département. On ne peut pas comparer l'Isère et la Lozère. La crise sanitaire, mais aussi la gestion quotidienne nous ont montré qu'une certaine souplesse était nécessaire. Il faut prendre garde à ce que la décentralisation ou la déconcentration ne s'accompagnent pas de règles strictes établies au niveau national. De nombreux directeurs généraux d'ARS se plaignaient que les priorités nationales de politique sanitaire à appliquer dans les territoires consommaient 90 % de leur FIR, transformant ainsi un fonds qui devait être dédié à l'innovation et à l'intervention directe en un budget qui taisait son nom. Les choses se sont améliorées, mais il faut faire attention. Je précise que les sommes allouées au FIR sont fongibles, sauf la partie consacrée à la prévention, qui est sanctuarisée et ne peut être amputée.

La réserve de support est fondamentale. Elle a d'ailleurs été activée au niveau central et au niveau territorial. J'ai moi-même pu voir cette réserve en action puisque la bibliothèque du ministère a été transformée en un immense open space où se côtoyaient des personnes venues de partout pour nous prêter main forte. Le secrétariat général des ministères chargés des affaires sociales fait un gros travail pour garder la mémoire des personnes ayant travaillé dans ce cadre tout au long de la crise sanitaire. Leur participation a été plus ou moins longue. Certains l'ont fait de façon bénévole et les profils étaient divers : des personnes venant du secteur public – des militaires, des pompiers, des gendarmes – de la société civile ou du secteur privé. On m'a reproché d'avoir fait appel à des acteurs privés, mais je ne le regrette pas, car ils ont fait preuve d'un savoir-faire incroyable, notamment en matière logistique.

La plupart des ARS souhaitent avoir davantage la main sur les « cellules d'intervention en région » (CIRE) qui, aujourd'hui, relèvent de Santé publique France. J'ai d'ailleurs observé un manque de liaison en certains endroits entre les CIRE et les ARS. Il faudra en tirer les conclusions une fois la crise passée.

La santé environnementale est un sujet passionnant. Pas plus que les autres pays, la France ne dispose d'une capacité parfaitement adaptée dans ce domaine et j'ai pu constater comme député et comme médecin les lacunes de notre système, mais il s'agit d'un domaine émergeant dans lequel nous avons encore tout à apprendre.

La santé environnementale et son organisation territoriale demandent des moyens importants car il s'agit de mener des actions de prévention, d'information et d'intervention, y compris dans l'urgence. Lors de l'incendie de l'usine Lubrizol, la communication avait été faite par secteur plutôt que de façon globale : sur la qualité de l'eau d'abord, puis, deux jours plus tard, sur la qualité de l'air. Je m'attendais naïvement à voir des médecins en blouse blanche expliquer aux habitants qu'ils pouvaient vivre en toute sécurité dans la périphérie de l'usine, mais on a préféré fonctionner de façon très sectorielle. Je ne suis pas certain que les médecins du travail aient été appelés en urgence, alors qu'ils étaient les plus à même de connaître la nature des produits stockés dans l'usine et dont la combustion aurait pu provoquer des dégâts sanitaires. Je ne suis pas convaincu non plus que l'on appelle en premier lieu les médecins du travail et les vignerons en cas de pollution agricole à côté d'une école, alors qu'ils connaissent les produits et la zone d'épandage. La réponse aux cas d'agénésie des bras, qui, dans l'Ain et ailleurs, faisaient peur à la population n'a pas été suffisamment globale et structurée.

Les réponses aux enjeux de santé environnementale doivent être améliorées et nécessiteront d'importants moyens publics. Le métier de préventologue pourrait être une piste d'amélioration : il serait chargé, dans le cadre d'une pensée globale, de former, d'informer et d'enquêter sur place, avec une équipe capable de se projeter immédiatement pour réaliser des prélèvements d'eau et d'air.

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