Intervention de Didier Guillaume

Réunion du jeudi 9 janvier 2020 à 14h30
Mission d'information commune sur le suivi de la stratégie de sortie du glyphosate

Didier Guillaume, ministre de l'Agriculture et de l'Alimentation :

Monsieur Lurton, je suis d'accord avec vous, le monde agricole ne perçoit pas tout à fait l'aide dont il peut bénéficier et je comprends qu'il s'interroge parce que nous sommes en pleine mutation. Dans les nombreux départements où je me rends, tous me font part de leur inquiétude et me disent qu'ils ne savent pas faire, qu'ils n'y arriveront pas... C'est le rôle des chambres d'agriculture et des filières de les accompagner. Des plans stratégiques de filières ont été définis à la suite des États généraux de l'alimentation. Sur le papier, ils sont tous très bons. Mais le papier doit se décliner en actions concrètes.

Je ne dis pas que cela ne se fait pas. Il y a tout pour réussir : les plans stratégiques de filières sont en place ; les chambres d'agriculture vont jouer leur rôle ; plus de 200 millions d'euros peuvent être mobilisés pour aider la transition. Nous allons essayer d'avancer. À partir du 1er janvier 2021, le conseil obligatoire devra être fait deux fois tous les cinq ans. Nous allons tout faire pour régler le problème. Nous travaillons beaucoup avec l'APCA pour avancer. J'ai une pensée pour M. Cochonneau, président des Chambres d'agriculture décédé brutalement pendant les fêtes.

Madame Limon, je suis navré de constater l'augmentation des achats de phytopharmaceutiques et ne peux vous en dire les causes. C'est la raison pour laquelle nous avons demandé à l'INRA et à l'ANSES de rapidement analyser la situation. Utilise-t-on plus de produits parce qu'ils sont moins efficaces et qu'il faut faire plusieurs passages ? C'est mon observation. Ce bilan n'est pas un échec. Il est vrai que nous ne sommes pas encore dans les objectifs que nous nous sommes fixés, mais il y a une sensibilisation qui progresse, des transitions qui se réalisent, des filières qui s'organisent ; tout cela est très important.

Madame Le Feur, moi qui ai fait, modestement, de mon département le premier département bio de France, je suis également opposé à l'évolution des règles si on ne peut contrôler leur mise en œuvre. Nous ne pouvons faire n'importe quoi. Mais j'y suis favorable si la labellisation et les contrôles restent possibles. Il existe peut-être des situations envisageables. De fait, lorsqu'on cultive des carottes, des pommes de terre ou de la vigne, on n'utilise pas les mêmes produits ou pas au même moment. Si l'organisme certificateur est capable de mener ces contrôles, je serai favorable à cette évolution parce que le mieux est l'ennemi du bien. Je veux aller en haut ; si je n'y arrive pas totalement, je préfère faire la moitié du chemin plutôt que de rester en bas. C'est mon objectif. Il est parfois critiqué, mais le Gouvernement veut nous faire avancer. Pour aller d'un point A à un point B, il faut quitter le point A. Or, il y a toujours une bonne raison de ne pas bouger.

De la même manière, il faut évidemment déployer tous les moyens mécaniques disponibles avant les pulvérisateurs. J'ai créé, il y a une douzaine d'années, le salon Tech&Bio dans la Drôme. Il s'agit du premier salon en Europe des techniques alternatives du bio, où passent des dizaines de milliers de gens. Les premières techniques alternatives sont l'agronomie, la transition agro-écologique et toutes les pratiques agraires que nous devons mettre en place. Nous sommes d'accord sur l'objectif. Toutefois, certaines pratiques culturales, comme en arboriculture, ne peuvent encore renoncer totalement au glyphosate. Je préfère alors que nous n'en utilisions que 20 % plutôt que 100 %.

Madame Toutut-Picard, je vous ai trouvé très dure sur la PAC. Les agriculteurs français n'ont pas l'impression qu'il n'y a pas de contrôle, ils ont même parfois l'impression qu'il y en a trop. Il faut sans doute aller plus loin mais de nombreux contrôles sont réalisés. L'Europe n'est pas corrompue ; ses aides ne sont pas attribuées n'importe comment à des gens qui ne le méritent pas ; mais nous avons des histoires différentes. Certains pays comme le nôtre sont entrés dans la communauté européenne il y a plus de 50 ans ; d'autres en 2004. Malgré tout, les aides de la PAC évoluent très fortement en faveur de la transition agro-écologique. Rendre l' eco-scheme obligatoire dans le premier pilier n'était pas gagné et nous y arrivons. On regarde concrètement à quoi sert l'argent distribué. C'est faux de dire que ce sont les plus gros qui reçoivent toujours. La prime aux premiers hectares est une réalité. Tous les jours, nous faisons en sorte que l'argent soit utilisé au mieux, avec les contrôles nécessaires. Quand on touche de l'argent public, il faut accepter d'être contrôlé.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.