Intervention de Romain Rambaud

Réunion du mercredi 22 septembre 2021 à 14h35
Mission d'information visant à identifier les ressorts de l'abstention et les mesures permettant de renforcer la participation électorale

Romain Rambaud, professeur de droit public à l'université de Grenoble Alpes :

. Réfléchir à des évolutions institutionnelles générales demeure un point central. Toutefois, nous ne sommes pas obligés de réfléchir aux deux aspects dans le même temps. Nous pouvons mener une réflexion parallèle en les dissociant. Certaines questions institutionnelles restent fondamentales et il est nécessaire de les réinvestir pour réimpliquer les électeurs.

Nos conceptions diffèrent quant à la méthode à employer. Il s'agit là de la limite des raisonnements globaux, l'absence d'accord freinant un éventuel avancement. Nous risquons la paralysie à ne pas vouloir traiter des questions d'ordre pratique qui ne résoudront pas tous les problèmes, mais qui pourraient améliorer la situation. Nous parlions de liturgie démocratique, d'un rituel républicain fort. Néanmoins, les traditions n'ont pas toute vocation à perdurer. Nous devons nous interroger sur ce que signifie cette liturgie, ce rituel pour d'autres populations plus jeunes qui ont évolué, tout au long de leur vie, avec internet. Je pense notamment à la primaire écologique.

L'introduction du vote par internet ne rencontre pas de consensus immédiat. Cependant, d'autres modalités de vote davantage sécurisées comme le vote par correspondance peuvent être envisagées. Il existe de mauvais rituels, des rituels démodés à remettre en cause. L'hypothèse de l'expérimentation à laquelle Mme la députée Isabelle Florennes se référait constitue une bonne piste. Si nous souhaitons avancer, nous pouvons nous appuyer sur la mission du Sénat qui suggère, dans son rapport, que nous tentions des expérimentations lors de consultations locales. Ce rapport s'avère particulièrement intéressant. Il donne l'impression que des craintes telles que la fraude ou les votes communautaristes sont levées. Nous pouvons prendre appui sur ce premier rapport, très riche sur le plan du droit comparé, pour avancer dans la mise en œuvre de propositions.

S'agissant de l'enjeu, la métropole de Lyon devait devenir un exemple, mais elle demeure contestée. En revanche, parmi les questions à traiter pour diffuser de l'information, de la communication et de l'apprentissage, il subsiste la question des campagnes électorales. Nous pouvons nous interroger quant à leur cadre juridique par trop restrictif et parfois peu adapté aux nouveaux modes de communication. Leur fonctionnement ne permet pas de procéder à de véritables campagnes pouvant influer sur la participation. Une réflexion sur ce sujet permettrait d'avancer sur la question de l'abstention.

Pour conclure, la mobilisation demeure forte lors de belles campagnes électorales. La crise sanitaire et l'absence de campagne électorale dense, riche et puissante ont entraîné une démobilisation. Cependant, l'abstention repose également sur la mauvaise compréhension des institutions décentralisées.

J'ai souligné que la question de la recherche scientifique demeure primordiale afin de lever ces obstacles psychologiques et opérationnels. Lorsque nous effectuons des travaux de droit comparé, notre compréhension des ressorts de la réticence progresse. Il serait donc particulièrement intéressant d'encourager les recherches sur ces sujets afin d'améliorer nos connaissances. En Islande, le vote par anticipation s'étale sur huit semaines et il est possible de modifier son vote au dernier moment. En Australie, le vote par correspondance et par anticipation permet également de changer son vote au dernier moment. Ces comparaisons démontrent que d'autres systèmes fonctionnent ailleurs dans le monde. N'essuyons-nous pas un retard technique et opérationnel, retard que nous aurions tendance à alimenter du fait d'un conservatisme regrettable ? En France, nous avons probablement un handicap : nous ne disposons pas d'une autorité indépendante pour gérer les scrutins, le ministère de l'Intérieur détient donc un rôle central. Les pays qui disposent d'autorités indépendantes montrent davantage de dynamisme.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.