Intervention de Chloé Ridel

Réunion du mercredi 29 septembre 2021 à 15h00
Mission d'information visant à identifier les ressorts de l'abstention et les mesures permettant de renforcer la participation électorale

Chloé Ridel, présidente de l'association Mieux voter :

Lors d'un jugement majoritaire, l'électeur vote en donnant son opinion sur tous les candidats. Il attribue à chacun une mention sur une échelle allant de « très bien » à « à rejeter ». Tous les candidats sont évalués indépendamment les uns des autres. Il est possible de valider ou de rejeter tous les candidats. Vous pouvez nuancer votre opinion, ce qui répond à une demande forte des électeurs. Chaque candidat reçoit le même nombre de mentions et tous sont évalués par l'ensemble du corps électoral et obtiennent un profil de mérite avec un score dans chaque mention. Pour chaque candidat, nous déterminons la mention majoritaire. Il s'agit de la mention médiane, obtenue en additionnant les mentions identiques jusqu'à franchir les 50 % de l'électorat. La mention dans laquelle le candidat franchit les 50 % est sa mention majoritaire. Ensuite, les candidats sont classés en fonction de leur mention majoritaire. En cas d'égalité de mention majoritaire, il demeure possible de les départager en fonction de leur pourcentage. Cette méthode dispose de nombreuses vertus. Le vote s'avère plus satisfaisant pour l'électeur. En 2017, les électeurs ont massivement voté « utile » au premier tour. Au second tour, nous comptabilisons quatre millions de bulletins nuls ou blancs et 25 % d'abstention, soit un record depuis 1969. Ce scrutin a entrainé une terrible frustration et, au second tour, beaucoup d'électeurs ont dû voter contre Marine Le Pen.

Il existe une fatigue démocratique qui s'exprime de manière profonde et qui a des conséquences potentiellement désastreuses. Le vote par jugement majoritaire s'avère plus satisfaisant pour l'électeur qui peut évaluer tous les candidats. Il peut également nuancer son opinion et rejeter les candidats qui lui déplaisent. Le vote utile disparaît, puisqu'il est possible de juger plusieurs candidats. Ce système permettrait des candidatures différentes au sein d'un parti politique avec les nuances qui prévalent dans le cadre du débat démocratique sans que ces candidatures s'annulent. Aujourd'hui, deux candidats d'une même famille politique et proche tendanciellement s'annulent dans le cadre de l'élection, alors que leur parole pourrait recueillir un suffrage majoritaire. Il s'agit d'un biais majeur qui porte le nom de paradoxe d'Arrow. Il est démontré par la science depuis des dizaines d'années. Avec le jugement majoritaire, le vote blanc n'a plus de raison d'être, puisqu'il est possible de noter tous les candidats.

J'ai lu avec attention la note de l'Association pour la reconnaissance du vote blanc qui indique que cette expression électorale ne constitue pas une rupture de ban par rapport au scrutin, puisque l'électeur se déplace pour voter. Le vote blanc indique qu'aucun candidat ne convient à l'électeur. Avec le jugement majoritaire, vous pouvez exprimer ce mécontentement tandis que votre voix compte et influence le résultat de l'élection. Ce scrutin se déroule en un tour de vote. Nous pensons que ce processus mobilise davantage l'électeur tout en s'avérant plus économique. Les choix sont plus démocratiques puisque l'opinion est mesurée. Le scrutin sert ainsi à mesurer l'opinion. Aujourd'hui, ce dernier départage les candidats au détriment des électeurs. Avec le vote majoritaire, le choix est davantage consensuel. Aujourd'hui, lors d'un premier tour, vous pouvez rassembler 16 % des voix et, au second tour, réunir par la magie du scrutin 60 % des voix. Or ce phénomène ne reflète pas l'opinion publique. Ce système est dommageable d'un point de vue démocratique. Avec le jugement majoritaire, l'opinion est pondérée tandis que le biais face au candidat clivant est supprimé. Rejeté par la majorité des électeurs, son score diminue en effet.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.